« Au Maroc, « psst psst » est également utilisé pour faire signe à un chat de rue curieux. Comme c’était normal que, quand j’étais adolescent, des hommes me regardaient et m’appelaient comme ils le feraient pour une petite créature innocente sans abri. Je ne méritais même pas d’être abordé dans des pensées complètes — bien que les mots qu’ils utilisaient n’aient jamais été meilleurs. […] Mes parents se souciaient toujours de ce que je portais quand je quittais la maison pour le lycée », raconte l’écrivaine marocano-américaine Yasmina Achlim, dans une tribune publiée par The New Arab soulignant que ses parents ne sont pas des conservateurs mais avaient peur des réactions que ses tenues pourraient susciter.
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« Le fait qu’on me dise de porter un pantalon long ou de me couvrir les épaules — généralement par des gens bien intentionnés — n’a fait que simplifier à l’extrême la réalité complexe et multiforme selon laquelle je ne pouvais pas marcher dans les rues de Casablanca sans me tendre le corps. […] Le bonheur, la colère, la tristesse, la curiosité ou tout autre sentiment pourraient être interprétés à tort comme flirter ou demander l’attention de tout homme à la recherche de son prochain voyage d’ego », dit-elle, notant qu’il est difficile d’éradiquer la misogynie. Selon elle, l’idéal serait que tout parent s’assure que sa fille ne soit pas la prochaine cible. L’écrivaine dit avoir trouvé des mécanismes lui permettant de lutter contre le harcèlement de la rue. Il s’agit d’une multitude d’insultes en darija, des regards et des commentaires.
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Le phénomène est sous-estimé. « Le harcèlement n’est jamais du harcèlement. C’est toujours un “compliment”, un “malentendu” ou la preuve que vous ’ne supportez pas une blague’, poursuit-elle. Mais le Maroc est loin d’être le seul pays qui contribue à la normalisation du harcèlement de rue. » « Quand je vivais et travaillais à Londres, j’ai été traitée de chat par un employé du magasin à côté de mon bureau. En racontant cela à ma supérieure, on m’a simplement dit de « prendre cela comme un compliment ». J’avais 19 ans et tout ce que je voulais, c’était pouvoir aller au travail tous les jours sans avoir l’impression que ma sécurité était compromise », se souvient cette diplômée de l’Université St-Mary de Londres.
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"“Psst”me fera toujours frissonner. Cela me rappellera toujours que peu importe ce que je porte ou combien j’ai travaillé dur pour devenir qui je suis aujourd’hui, je suis toujours “juste” une femme ».