Maroc, France, UPM : Les raisons d’un faux-bond

21 juillet 2008 - 23h09 - France - Ecrit par : L.A

Le sommet fondateur de l’Union pour la Méditerranée, UPM, a bien eu lieu en fin de semaine dernière à Paris et les objectifs principaux recherchés par son initiateur, le président français Nicolas Sarkozy, ont été globalement atteints.

Une surprise de taille a cependant marqué ces premières rencontres euroméditerranéennes d’importance depuis le sommet de Barcelone de 1995, l’absence de SM Mohammed VI, Roi du Maroc et fervent partisan d’un rapprochement structuré et pérenne des Etats et des peuples des deux rives du Mare Nostrum.

Le Royaume, comme chacun sait, était représenté à Paris par SAR le Prince Moulay Rachid, porteur de surcroît d’un message aussi explicite que positif du Souverain. Mais cette présence princière marocaine n’a point empêché en France interrogations et commentaires des observateurs et des analystes et même quelques articles maladroits, bien souvent construits à partir d’une sérieuse méconnaissance des réalités régionales, maghrébines, arabes.

Plusieurs raisons au moins expliquent et justifient le « faux-bond » royal de dernière minute.

La première, la plus visible sans doute, tient au revirement inattendu de l’Elysée sur la question de la désignation du secrétaire général de l’UPM.

En effet, au terme de contacts discrets entrepris au printemps dernier à Paris entre un émissaire royal connu pour la qualité de son portefeuille relationnel et sa longue expérience des affaires internationales et le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, (inspirateur d’ailleurs du concept d’union euroméditerranéenne), il était quasiment acquis que le secrétariat général de l’UPM serait dévolu à un Marocain. On parlait même à l’époque de M. Hassan Abouyoub, ancien ambassadeur à Paris, pour ce poste.

Cette promesse n’a pas été tenue, essentiellement parce que l’Elysée, soucieuse d’obtenir la participation algérienne, a cédé aux pressions du président Abdelaziz Bouteflika qui, à l’occasion du sommet du G8 au Japon, assura devant la presse internationale qu’il se rendrait au sommet parisien au terme de « pourparlers » avec son homologue français.

Le vieux président algérien, connu pour son habileté (le respect dû à un chef d’Etat nous interdit de parler de rouerie), a ainsi « roulé Sarkozy dans la farine », au point où même la question du futur siège de l’UPM n’a pu trouver de solution, alors que Rabat était sur les rangs avec La Valette, Barcelone et Tunis. Contre sa participation au sommet du 13 juillet, Alger, qui sait si bien faire monter les enchères, n’a pas craint de provoquer un refroidissement léger, mais perceptible, entre Paris et Rabat, avant d’accueillir en grandes pompes la chancelière allemande Angéla Merkel qui va payer très cher auprès de la Sonatrach sa volonté de se libérer de la dépendance gazière envers le russe Gazprom !

Le président français est ainsi doublement le dindon de la farce, sachant que l’UPM était au départ une « grande idée » française que l’Allemagne a su, en quelques mois, réduire et affaiblir considérablement en l’attelant au concept, très dévalorisé et si peu productif, de « processus de Barcelone ».

Une autre raison de cette décision royale tient également à la présence, très peu compréhensible de prime abord, de l’émir du Qatar à Paris lors de ce sommet euroméditerranéen. Même avec beaucoup d’imagination, il est difficile de rattacher cet émirat du Golfe à la région méditerranéenne, mais le Qatar, qui dispose de moyens financiers puissants pour servir les ambitions de son monarque, a noué avec la présidence française des liens qui ne s’expliquent pas seulement par l’implication qatarie dans le dossier syro-libanais.

L’Emir, d’ailleurs, a su jouer la vedette lors de ce sommet et Nicolas Sarkozy semblait plus empressé envers lui qu’il ne l’était envers le « co-président » de l’UPM, le Raiss Hosni Moubarak.

Le Maroc, douché par la volte-face de la France, devait-il envoyer au Sommet son plus haut représentant pour servir de faire valoir à un cheikh ambitieux qui ne se prive pas d’instrumentaliser sa créature médiatique Al Jazeera pour porter atteinte à son Histoire, ses nobles causes, mais aussi pour s’immiscer de façon inacceptable dans son processus électoral des législatives ou ériger des rumeurs infâmes en informations vérifiées ?

Le Royaume, qui ne remet pas en cause son appui et sa participation à l’UPM, a voulu, ainsi, montrer à tous et à chacun que les relations internationales sont d’abord faites de respect mutuel et réciproque.

« Pacta sunt servanda » disaient les Latins, ce que M. Sarkozy aura peut-être oublié…

Mais également, en recevant à la veille même du sommet parisien, pour un séjour de quelques heures, le Président du Conseil des ministres espagnols M. José-Luis Zapatero, le Royaume a finement indiqué à ses autres partenaires qu’il n’était ni isolé, ni sans solution de rechange.

M. Zapatero, dont la visite dans notre pays était officiellement programmée pour septembre prochain, a pu trouver quelques heures pour ce rendez-vous oujdi avec SM le Roi. « Li ma endo sido, endo lallah »…

Source : La Nouvelle Tribune - Fahd Yata

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Sujets associés : France - Mohammed VI - Diplomatie - Nicolas Sarkozy - Union pour la Méditerranée

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