Marocaines d’ici et d’ailleurs : Emploi, éducation, politique... les revendications

24 décembre 2008 - 22h45 - Maroc - Ecrit par : L.A

Beaucoup d’émotion dans des témoignages poignants. Ceux de femmes courageuses qui, sans aucune préparation, ont défié leurs conditions d’abord, celles d’un pays parfois peu accueillant ensuite, et y ont réussi. Elles ont témoigné à Marrakech de leur ténacité et surtout de leur appartenance « au Maroc ».

Elles sont « plurielles », ont des trajectoires différentes et revendiquent leur combat. Le témoignage d’une sexagénaire qui s’est sacrifiée pour élever 9 frères et sœurs et immigrer en Grande-Bretagne en a interpelé plus d’une. Elle y était partie pour subvenir aux besoins de sa famille devenue orpheline après le décès de sa mère. Dans son sacrifice, elle a défié le temps, séjourné sans papiers, méconnaissant la langue, exercé en même temps plusieurs boulots, se cachant des voisins, faignant d’ignorer l’hostilité du pays accueillant et, plus important, elle a oublié sa vie à elle.

La situation de ces femmes « d’ailleurs » est parfois similaire à celle des femmes « d’ici » quant il s’agit de sacrifice, d’inégalités, d’injustice et de violence conjugale. Auxquels s’ajoutent de nombreux clichés et des condamnations ou au mieux l’indifférence de la société. Ailleurs, cette situation est fermement prise en charge par des associations sur place. Mais « ici », on assiste encore à de scandaleuses inversions de la responsabilité lorsque la victime s’auto-culpabilise et revient « à la maison », et se dit que finalement elle méritait cette « correction ».

La lutte contre les violences faites aux femmes est aussi au cœur des débats pour les femmes « d’ici », rappelle Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité. Et, en attendant, toute une panoplie de mesures ont été prises en compte via les centres d’écoute. Est-ce suffisant ? Non, répondent les militantes. Il faut penser peut-être à de plus lourdes sanctions.

Dans tous les cas, la rencontre internationale des femmes marocaines du monde, clôturée le 20 décembre à Marrakech, sous le thème « Femmes d’ici et d’ailleurs » a été une occasion pour dresser un état des lieux sur la contribution des femmes marocaines dans les différents pays de résidence.

Une occasion de porter un regard croisé sur leurs expériences, analyser les avancées, les défis et les contraintes en matière d’égalité. « Nous appelons à la mise en place et au développement de relations d’échange et de partenariat entre les organisations des Marocaines du monde et leurs homologues étrangères, le but étant d’étendre le rayonnement de notre pays dans le concert des nations et d’en défendre les causes justes », a appelé le Souverain dans un message dont lecture a été donnée par Zoulikha Nasri.

« Ici » n’est pas comme « ailleurs », insiste, pour sa part, Zakia Daoud, écrivain marocaine, qui, elle-même, a souffert du cliché de « nesrania » toute sa vie. « Ailleurs ou ici, il faut savoir assumer sa différence, la fructifier tout en se fondant sur des valeurs qui n’ont pas de frontières, l’égalité entre autres ».

Celles qui ont réussi

La liste des femmes pionnières de l’émigration marocaine est longue et plusieurs histoires relatent leurs voyages. En France, en Belgique et aux Pays-Bas, les Marocaines représentent désormais 47% de la population migrante. 33% et 30% respectivement en Espagne et en Italie. Et c’est également le cas dans les pays arabes. Ces émigrées sont de plus en plus présentes sur le marché de l’emploi avec des taux variables, entre 45% en France et 14% en Espagne pour les femmes âgées de 25 à 50 ans.

Certaines ont pu s’imposer et opérer des réussites remarquables, occupant de hauts postes de responsabilité dans les pays d’accueil. Les recommandations de cette 1re rencontre insistent d’ailleurs sur l’éducation et un nouvel élan à donner au code de la famille pour protéger davantage la femme qu’elle soit chef de famille, femme au foyer, chef d’entreprise ou prostituée. « On n’est pas là pour juger, mais pour protéger ».

Ce sont là les défis futurs des femmes et ceux de la première rencontre du genre au Maroc initiée par le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger en partenariat avec le Fonds des Nations unies pour la femme (UNIFEM) et l’Association pour la célébration du 1200e anniversaire de la fondation de Fès.

Qui dit lutte contre les inégalités dit lutte contre la discrimination envers les femmes dans tous les centres de prise de décision. Un état de fait partagé par toutes les femmes du monde, à quelques nuances près, confie Zineb Benjelloun Touimi, directrice régionale des programmes de l’Unifem pour l’Afrique du Nord. C’est là un sujet qu’affectionne particulièrement Nouzha Skalli. Elle, qui a milité longtemps pour cette équité. Ministre aujourd’hui dans un gouvernement comprenant 7 femmes, elle a bien sûr salué le seuil minimal de la représentation politique des femmes porté à 12% par le nouveau code électoral au lieu de 0,5%. Skalli renvoie toutefois la balle aux partis politiques. « Ce seuil pourrait être porté au tiers des sièges si les partis jouent le jeu et apportent un soutien ferme aux candidatures féminines ».

340 femmes d’horizons différents

Quelque 340 femmes issues de l’immigration ou vivant au Maroc même ont pris part à cet évènement. Elles sont dans différents domaines : universitaires, femmes d’affaires, cadres et responsables associatives, élues, politiques, artistes, journalistes… Elles sont venues, outre du Maroc, de 20 pays d’accueil dont la Tunisie, la France, la Belgique, la Hollande, la Mauritanie, le Sénégal…

Source : L’Economiste - B. B. et H. H.

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