Nouvelle constitution marocaine : un oui vigilant

28 juin 2011 - 23h10 - Maroc - Ecrit par : L.A

Le projet de nouvelle Constitution qui sera soumis au référendum le 1er Juillet 2011 présente des avancées certaines, mais également des limites par rapport à une monarchie parlementaire proprement dite.

Les avancées sont incontournables par rapport à la Constitution précédente de 1996. On peut indiquer à ce sujet la consécration des fondements de l’identité marocaine plurielle et ouverte, la grande place accordée aux droits et libertés individuelles et collectives, avec notamment le renforcement de l’égalité homme-femme. Le projet reconnaît que la souveraineté appartient à la nation, et que le choix démocratique est irréversible. Il insiste sur la séparation des pouvoirs, renforce les attributions du Parlement et du Chef de gouvernement issu des élections législatives, et érige la justice en pouvoir indépendant. Il consacre le rôle des partis politiques et des syndicats, et reconnaît un véritable statut à l’opposition parlementaire et à la société civile. Il constitutionnalise la régionalisation avancée, et consacre l’élection des Conseils régionaux au suffrage direct, et le droit des pétitions. Enfin il énonce des principes forts en matière de bonne gouvernance, de moralisation de la vie publique et d’Etat de droit économique.

Cependant, on ne peut pas dire que ce projet instaure une monarchie parlementaire, du fait des pouvoirs très importante conservés par le Roi. Ce dernier dont la personne est inviolable, détient des pouvoirs exclusifs en matière religieuse et militaire, et des attributions importantes dans le pouvoir exécutif. Il préside le Conseil des Ministres, qui en fait détermine et conduit la politique de l’Etat dans ses orientations stratégiques. Il nomme aux plus hautes fonctions publiques, et a même la possibilité de révoquer individuellement un ou plusieurs ministres. En outre, il peut demander au Parlement une seconde lecture des lois, et dissoudre les deux Chambres ou l’une d’elles. Enfin il préside le Conseil supérieur des Oulémas, le Conseil supérieur de sécurité, et le Conseil supérieur de pouvoir judiciaire.

Tenant compte de cette analyse, je voterai cependant oui pour ce projet de Constitution, tenant compte des avancées décrites, et afin d’assurer la stabilité de notre pays, qui n’a heureusement pas connu les violences et l’effusion de pays qu’on connus d’autres pays arabes pendant de ce premier semestre 2011.

D’autre part, le oui à ce projet de Constitution barrera la route aux extrémistes, et confortera la position du Maroc sur le plan international, notamment sur la question du Sahara. Mais un oui vigilant, afin d’une part de mettre réellement en application les nouvelles dispositions constitutionnelles, en veillant tout particulièrement à l’élaboration des lois organiques, qui vont fixer les détails des principes énoncés dans la Constitution. L’après-référendum doit s’axer principalement sur l’organisation des futures élections législatives, qui sont la clé de voûte de tout le système politiques à venir. Il faudra déterminer le scrutin électoral, le découpage des circonscriptions, et les mesures à prendre pour promouvoir une majorité gouvernementale solide, et une transparence des élections, loin de toute influence de l’administration et de l’argent, A mon avis, il faut laisser une peu de temps à l’administration et aux partis politiques de s’organiser, c’est pour cela qu’il serait souhaitable de fixer la date des élections législatives à Janvier 2012.

En ce qui concerne l’avenir, et afin de parvenir à une monarchie parlementaire à moyen terme, il faudrait que les partis politiques se renforcent, que l’analphabétisme et la grande pauvreté soient éradiqués, et que la qualité de l’éducation s’améliore. Il faudrait reprendre également le droit à la liberté de conscience, dont le principe a été fortement attaqué par les islamistes, mais qui constitue néanmoins un droit fondamental de l’homme. Il serait souhaitable également de développer davantage dans la prochaine Constitution la régionalisation avancée, dont le projet actuel ne fixe que les principes. A ce moment là, rien n’empêchera une nouvelle révision de la constitution.

Jawad Kerdoudi

Président de l’IMRI, Institut Marocaine des Relations Internationales

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