Union méditerranéenne : Ce qu’en pense Bruxelles

28 décembre 2007 - 23h53 - France - Ecrit par : L.A

Un Maroc favorable à condition que cela ne remette pas en cause son « statut avancé » avec l’UE, un Parlement européen plutôt sceptique, une large majorité d’Etats membres de l’UE passablement dubitatifs et par-dessus tout une Commission européenne qui reste sur ses gardes.

Le projet d’Union méditerranéenne du président français Nicolas Sarkozy peine à convaincre. Dans cet entretien, Benita Ferrero-Waldner, commissaire européenne aux Relations extérieures et à la Politique européenne de voisinage (PEV), analyse la portée de ce chantier.

Au cours de votre dernier déplacement au Maroc, il a beaucoup été question du projet d’Union méditerranéenne suggéré par Sarkozy. Comment évaluez-vous cette initiative ?

J’y suis favorable si effectivement l’Union méditerranéenne est un projet complémentaire du Processus de Barcelone et de la Politique européenne de voisinage (PEV), et si naturellement tous les Etats membres de l’UE sont d’accord et peuvent aussi y être associés. Et, ce qui est très important aussi, si elle apporte une valeur ajoutée. J’entends par là si elle prévoit par exemple un partenariat pour des projets concrets dans le domaine de l’industrie, des PME-PMI, des projets dans le domaine de l’eau, l’environnement, etc.

Mais de tels projets concrets sont déjà prévus et développés dans le cadre du Processus de Barcelone et de la PEV, quel est donc ce « plus » dont pourrait se prévaloir une éventuelle Union méditerranéenne ?

Le partenariat Euromed et la Politique européenne de voisinage comme nous les avons maintenant sont les bases, elles sont là et elles vont le demeurer.

Elles bénéficient d’instruments financiers qui sont très importants. Je pense qu’il y a toujours place pour des projets concrets qui peuvent s’y ajouter et nous permettre de nous rapprocher encore plus de nos partenaires sud-méditerranéens. Si cette possibilité d’une valeur ajoutée est présente, je ne peux qu’être favorable à une telle idée.

Si l’on suit vos explications, le Processus de Barcelone et la PEV resteraient l’architecte principal, le « maître d’oeuvre » en quelque sorte et l’Union méditerranéenne serait une sorte de « sous-traitant » de la coopération Euromed ?

Non. Je dirais plutôt que ce serait un instrument complémentaire. Car ce que nous voulons, ce que nous souhaitons c’est de faire davantage pour le renforcement, l’approfondissement des relations euroméditerranéennes. S’il y a quoi que ce soit de concret qu’on puisse ajouter au Processus de Barcelone je suis preneuse.

Qu’est-ce qui vous fait penser que le Processus de Barcelone et la Politique européenne de voisinage gardent toujours la cote auprès des partenaires sud-méditerranéens ?

Je pense qu’il y a beaucoup de pays qui veulent aller encore plus loin dans l’approfondissement de leurs relations avec l’UE. Pensez au statut avancé du Maroc, pensez au statut spécial avec Israël, à l’accord de coopération renforcé avec l’Ukraine. Tous ces pays bénéficient vraiment d’une large coopération avec l’UE et c’est dommage que des pays comme par exemple l’Algérie n’en fassent pas encore partie…

Votre déplacement au Maroc a coïncidé un peu avec la visite du roi espagnol Juan Carlos aux villes de Sebta et Melilia. Pensez-vous que cet évènement pourrait avoir une quelconque conséquence sur les relations futures Maroc/Espagne et Maroc/UE ?

Je rappelle que je suis commissaire européenne aux Relations extérieures et de la Politique européenne de voisinage. Je suis commissaire pas seulement pour un pays mais pour 27. Je l’avais d’ailleurs dit à ma conférence à Rabat. Nous avons des domaines de coopération beaucoup plus vastes qu’un seul thème de relations bilatérales. J’ai lu naturellement les journaux au Maroc. Je connais un peu ce problème difficile mais, moi, lors de ma visite au Maroc, je ne me suis pas du tout impliquée dans cette affaire. Les deux partenaires que sont le Maroc et l’Espagne sont à même de trouver des solutions pour surmonter cette petite crise.

Il y a de grands sujets qui nous préoccupent pour l’instant comme l’énergie, l’environnement, l’éducation qui est si importante, notamment quand vous réalisez par exemple qu’il reste encore presque 80% de femmes rurales totalement analphabètes au Maroc. Il y a tellement de choses importantes à faire et c’est sur tout cela que nous avons travaillé à Rabat.

Parcours

Benita Waldner, plus connue sous le nom de Benita Ferrero-Waldner, est née le 5 septembre 1948 à Salzbourg en Autriche. Ce docteur en droit depuis 1970 fut la première femme de l’histoire à devenir chef du service du protocole de l’ONU (durant le mandat de Boutros Boutros-Ghali). 1995-2000 : secrétaire d’État aux Affaires étrangères de l’Autriche. Entre 2000 et 2004, elle est ministre des Affaires étrangères de l’Autriche, dans les gouvernements successifs dirigés par Wolfgang Schüssel.

Elle fut surnommée « la lionne souriante », en raison du féroce combat qu’elle a mené contre l’Union européenne lorsque celle-ci avait pris des sanctions contre son pays lors de l’arrivée au pouvoir du gouvernement de coalition avec le parti d’extrême-droite de son ancien camarade Jörg Haider.

Le Parti du peuple autrichien (ÖVP, conservateur) soutint sa candidature à la présidence de la République en avril 2004, élection qui fut remportée par son adversaire social-démocrate Heinz Fischer. Désignée pour les Relations extérieures, poste clef s’il en est, dans la nouvelle Commission européenne (Commission Barroso). Elle a pris ses fonctions le 22 novembre 2004, pour un mandat venant à échéance le 31 octobre 2009. Elle a notamment contribué à la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien injustement accusés en Libye d’avoir inoculé le virus du sida à des enfants.

L’Economiste - Aziz Ben Marzouq

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Sujets associés : France - Union européenne - Nicolas Sarkozy - Union pour la Méditerranée

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