La crise immobilière américaine et le Maroc

4 septembre 2007 - 01h03 - Economie - Ecrit par : L.A

La crise immobilière qui a éclaté cet été aux Etats-Unis s’explique essentiellement par une évaluation insuffisante du risque du crédit et de la prime de risque destinée à le couvrir. Dans le cas de l’immobilier certes, la valeur du bien sert de garantie première et son appréciation permet de la conforter. Or cette valeur dépend des prix du marché et donc de l’offre et de la demande.

C’est le déséquilibre entre ces deux derniers qui a causé aux Etats-Unis le crash des prix de l’immobilier et engendré la panique des banques et des fonds d’investissements, lesquels ont financé la croissance de ce secteur en dépit du surendettement d’une frange de la population américaine, la classe moyenne en particulier. Le déséquilibre du marché de l’immobilier américain est lui-même venu, d’une part, de la diminution rapide des investissements dans ce secteur et, d’autre part, de la spéculation sur les prix par les promoteurs. La correction qui en a suivi fut donc salutaire pour la remise à niveau du risque et de sa couverture afin que les « subprime » soient réévaluées.

L’exemple américain et le cas marocain

Cette crise de l’immobilier aux Etats-Unis devrait servir d’exemple car le crédit en général et le crédit immobilier en particulier doivent se baser sur une adéquation entre le risque établi et le taux d’intérêt appliqué.
Au Maroc, vu sous cet angle et compte tenu de la réelle explosion du secteur immobilier ces dernières années, on peut se permettre de faire une comparaison avec l’économie américaine. En effet, selon une note de conjoncture publiée par Bank Al-Maghrib à la fin du mois de juin dernier, les concours à l’économie marocaine ont augmenté de 9,4%, à 371 milliards de dirhams pour les 5 premiers mois de l’année 2007 contre 339 milliards de dirhams à la fin décembre 2006 et 292 milliards de dirhams à la fin mai 2006. Or, cette évolution, qui intervient après de longues années de quasi-stagnation des crédits à l’économie, est principalement due à la progression de 33% des crédits immobiliers, d’un montant de 82 milliards de dirhams pour les cinq premiers mois de l’année en cours uniquement.

Par comparaison, les crédits à l’équipement ont crû de 27,2%, s’établissant à 66,8 milliards de dirhams et ceux à la consommation de 41,3%, atteignant 15,5 milliards de dirhams.

Il est vrai que le Maroc a mis en place une politique d’encouragement au logement social pour l’acquisition du premier logement par l’exonération des intérêts immobiliers au titre de l’impôt sur le revenu et le maintien des taux de crédit à des niveaux attractifs.

La Banque Centrale vient, dans un contexte de baisse des taux moyens pondérés des bons du Trésor, de revoir à la baisse pour la deuxième fois de l’année les taux des crédits immobiliers à 4,64% conte 4,72 % sur 7 ans et à 5,07% contre 5,15% pour ceux dont la durée est de 7 à 25 ans.
De même, BAM, pour la facilitation du crédit immobilier, a décidé que les crédits à taux variable soient révisables tous les trois mois sur la base de l’évolution des taux moyens pondérés des intérêts servis sur les bons du Trésor sur les différentes maturités.

Mais, c’est aussi, et pour beaucoup, la demande des résidences secondaires par les nationaux et les étrangers qui est en train de créer une bulle immobilière dans notre pays.

Les chiffres des investissements et prêts privés étrangers ont augmenté de 41,9% entre 2006 et 2007, en s’établissant à 14,283 milliards de dirhams sur les 5 premiers mois de l’année.

De plus, depuis le 1er Août 2006, l’Office des Changes a habilité les banques, en tant qu’intermédiaires agréés, à octroyer des crédits immobiliers en dirhams aux personnes physiques étrangères non résidentes. De même, les banques locales peuvent émettre des cautions en faveur des banques étrangères qui accordent des prêts à des personnes physiques étrangères non résidentes, dans le but d’acquérir des résidences au Maroc et ce, à hauteur de 70% de la valeur du bien.
Pour bénéficier de cette facilité, la personne étrangère concernée doit effectuer un apport en devises d’un minimum de 30% du prix du bien immeuble à acquérir ou à construire.

En outre, le 15 Août 2006, l’Office des Changes a autorisé les banques intermédiaires à émettre ou accepter des cautions au titre des relations commerciales entre résidents et non résidents, en substitution d’une retenue de garantie correspondant à la part payable en devises dans le cadre d’un marché public ou privé attribué à un non résident.

Attention à la bulle

Mais, la Banque Centrale commence à exprimer des craintes dans ce contexte d‘expansion effrénée des crédits à l’économie et des activités financières en général. Le Wali lui-même attire l’attention sur une éventuelle formation de bulles immobilière et financière. C’est qu’au titre du premier semestre 2007, les banques marocaines auraient octroyé plus de 30 milliards de dirhams de crédits immobiliers, dépassant les prévisions annuelles de 28 milliards de dirhams.

En conséquence, l’accroissement de l’agrégat M3 a atteint un niveau record de 19% et doublé ainsi les prévisions de 10%.

L’impact d’une crise sur la croissance économique d’un pays étant inéluctable, les analystes ont révisé les prévisions de croissance des USA à la baisse.

Dès juin dernier, sur les marchés de change internationaux, le dollar subissait l’impact des appréhensions des intervenants sur les marchés financiers quant à l’imminence d’une crise immobilière aux Etats-Unis. Début août, la crise éclatait à Wall Street, se prolongeant sur les places européennes et asiatiques, obligeant les banques centrales à déverser des milliards pour assurer les liquidités des banques commerciales et des fonds.

La Nouvelle Tribune - Afifa Dassouli

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Sujets associés : Immobilier - États-Unis

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