Adil Jazouli : un conseiller éclairé

17 mars 2003 - 22h20 - Culture - Ecrit par :

Conseiller du délégué de la ville Madame Brévan et auteurs de plusieurs ouvrages sur les banlieues françaises Adil Jazouli raconte son parcours et donne son avis sur l’immigration maghrébine en France. Un entretien réalisé par Abla Ababou.

Menara : Vous êtes aujourd’hui conseiller du délégué de la ville de Paris. Parlez nous un peu de votre parcours ?

Adil Jazouli : Je suis né à Rabat en 1955. J’ai eu mon baccalauréat littéraire au lycée Moulay Youssef. Là, j’ai eu le choix entre accepter une bourse aux Etats-Unis ou faire des études de psychologie à Nancy. J’ai opté pour « le plus dur » c’est-à-dire la psychologie. Mes années d’étudiant ont été marquées par le militantisme. Au Maroc, c’était l’époque des arrestations massives surtout parmi les membres du « 23 mars. » Il nous fallait continuer le combat en France. Je suis un révolutionnaire mais non un révolté. Je tiens à marquer cette nuance.

Pendant 7 ans, j’ai également été membre fondateur de : « vraie revue », un journal vendus à plus de 7000 exemplaires dans lequel j’écrivais des articles. L’impact du journal était important car il était beaucoup lu par les politiciens et les membres des associations. En parallèle je préparais un DEA sur les jeunes issus de l’immigration. Un thème qui se rapprochait un peu de celui de l’imminent professeur Alain Touraine qui travaillait sur le monde ouvrier. Durant des années j’ai travaillé à ses côtés.

Grâce à lui j’ai appris le métier de chercheur en devenant totalement impartial et en me penchant vers l’abnégation sans jamais perdre de vue mes valeurs. En demeurant dix années au côté d’Alain Touraine le goût de la politique s’est mêlé à celui de la recherche. Entre temps j’avais soutenu une thèse : « La formation de l’action collective des jeunes maghrébins en France » publiée en 86 chez L’Harmattan.

Et puis je me suis mis à étouffer dans la recherche et l’idée d’enseigner ne me plaisait pas. J’ai quitté Alain Touraine et j’ai vivoté durant un an en faisant du conseil auprès de collectivités locales et de ministères. En 1990, j’ai crée « Bonoscopie » car avant les années 1990 la France rencontrait beaucoup de problèmes avec les jeunes issus de l’immigration. Les médias ont eu leur part de responsabilité en ne focalisant que sur les Arabes et les Noirs pour dénoncer la délinquance.

J’ai publié un rapport qui a fait scandale dans la presse car je remettais en question son rôle trop partial. J’ai aussi suggéré la création d’un observatoire sur le phénomène des banlieues mais les politiques n’étaient pas d’accord. Si non, j’ai aussi été pendant 4 ans conseiller de cabinet du ministre de la ville Monsieur Bartolone.

Menara : Et vos publications ?

Adil Jazouli : Mes deux dernières publications remontent à 1992 pour « les années banlieues » publié chez du seuil et puis en 1995 : « une saison en banlieue » chez Plomb. Par le biais de mes écrits, j’ai toujours tenté de sensibiliser les esprits sur le phénomène des banlieues. La cause des enfants des immigrés me tient particulièrement à cœur. Il ne s’agit pas aujourd’hui de représenter les immigrés mais surtout de les aider à s’adapter.

Menara : Que pensez vous aujourd’hui de tous ces débats véhiculés dans les médias français sur la question ?

Adil Jazouli : Bien loin car il existe encore bien trop de problèmes dans les pays du Maghreb. C’est une histoire douloureuse sur laquelle il faut travailler sérieusement. Les pays du Maghreb ne travaillent pas assez sur la politique d’immigration car ils sont dans la logique : « La France est coupable. » Il faut arrêter avec cet argument et agir.

Menara : Que pensez-vous de cette immigration maghrébine massive en France ?

Adil Jazouli : Il faut que la France trouve la politique adéquate à ce sujet. J’ai toujours eu l’impression d’être ici un étranger plus ou mois admis. Il ne faut pas croire que tout le monde peut vivre en France. Il y’a une limite à cette immigration. Ceux qui viennent ici doivent avoir un intérêt croisé avec la France et le pays d’origine. Je suis pour un modèle clindien à savoir un nombre déterminé de personnes pour tel travail, une sorte d’immigration à la canadienne. Je suis aussi contre le droit d’asile. Des milliers de gens sont installés ici en se prétendant réfugiés territoriaux alors que c’est totalement faux. !

Menara : Que pensez vous de l’intégration de la communauté maghrébine en France ?

Adil Jazouli : Elle se fait doucement J’entends par intégration la manière dont des personnes ou des groupes trouvent leur place dans des rapports sociaux à travers leurs actions collectives ou individuelles au niveau culturel, social économique et politique. Ceci devrait se passer de manière à ce que ces actions puissent modifier les codes existants de manière positive.

Abla Ababou pour menara.ma

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