Maroc-Espagne : Un cas pratique de l’immigration choisie

7 septembre 2007 - 00h47 - Espagne - Ecrit par : L.A

Le reportage en a frappé plus d’un. Une recruteuse de chaînes hôtelières basées en Espagne dépêchée à Rabat, au Maroc. Objectif : ramener 200 candidats marocains spécialisés dans les métiers de l’hôtellerie sur la péninsule ibérique. Le pays a besoin de cette main-d’oeuvre et ses entreprises vont la chercher là où elle se trouve, qualifiée certes, mais surtout bon marché.

Cette opération de sélection de candidats à l’eldorado espagnol n’est-elle pas la matérialisation de l’immigration choisie, théorie chère au président français ? Les Espagnols, eux ne font pas dans la théorie et vu le succès de l’opération, les détracteurs de l’immigration choisie auront du mal à convaincre les candidats marocains que partir dans ces conditions revient à piller les ressources de leur pays.

D’ailleurs, ils n’en ont cure. Les candidats à ce type d’immigration pensent d’abord à leur avenir personnel, aux revenus qu’ils peuvent tirer pour eux-mêmes et pour leurs familles. Les plus ambitieux reviendront au pays et ouvriront leur propre affaire, peut-être. Car l’opération reste une aventure avec toutes ses incertitudes, même si les migrants rejoignent le pays d’accueil en vol régulier et souvent aux frais du recruteur et avec en sus un contrat de travail en bonne et due forme dans les mains.

Ici, c’est une formule qui arrange bien les deux pays. Le Maroc exporte une partie de sa main-d’oeuvre, à qui il n’aurait pas pu offrir un emploi. Il est vrai que dans le lot, ils sont nombreux ceux qui vont abandonner leur poste pour rejoindre Madrid. Mais enfin, ne libèrent-ils pas des places pour les autres ?

Pour le pays demandeur, c’est une expertise bon marché. Et tant pis pour ceux qui crient au pillage des cerveaux africains. Ce flux migratoire organisé nous éloigne des scènes humiliantes d’Africains qui meurent dans leur tentative de se faire une place au soleil en Occident ou de clandestins que l’on rapatrie de force par des charters.

Le tort de Sarkozy est d’avoir ouvertement conceptualisé une pratique qui existe depuis longtemps. La loterie américaine n’est rien d’autre qu’une immigration choisie. Sous le couvert d’un jeu du hasard, des candidats avec un pre-réquis en matière d’instruction peuvent y participer. Le même type de sélection existe pour le Canada où l’on est plus regardant sur ce que le candidat possède comme savoir-faire.

C’est donc de bonne guerre que les pays occidentaux ciblent leurs besoins de cette façon. On ne saurait leur faire un mauvais procès. Le vrai défi que les Africains doivent relever est de mieux former leurs diplômés et de valoriser la ressource humaine au plan local. Cela suppose que les formations doivent être adaptées à leurs besoins de développement.

L’Afrique doit donc travailler à développer ses intelligences et ses capacités à former et à absorber ses diplômés d’abord. Vu l’écart entre les revenus, l’Occident sera toujours plus attractif en terme de salaire. Mais si l’emploi y est bien rémunéré, seuls les prétendants les plus compétents, c’est-à-dire bien formés, y ont leur place.

Le Maghreb, d’une certaine façon, a compris qu’il doit s’adapter aux enjeux de la mondialisation en matière d’offre et de demande d’emploi. Aujourd’hui, il joue sur la proximité avec l’Europe pour légaliser une certaine forme de migration. Le Maroc, une fois de plus a développé un ingénieux système qui consiste à recruter des travailleurs saisonniers pour aller faire la récolte dans les champs de fraise. 5 000 postes sont disponibles cette année et une agence a été créée à cet effet.

L’expérience connaît un tel succès que certains pays européens vont bientôt se jeter à l’eau. Le public cible visé est celui de la paysannerie. Trois mois en Europe dans les champs d’agrumes avec la garantie d’y revenir si le travailleur est exemplaire, tels sont les termes du contrat. Là encore, les candidats sont soumis à des critères rigoureux.

Faut-il interdire ce type de recrutement qui, quoi qu’on dise, a des retombées positives pour les travailleurs et par ricochet pour le pays ?

Visiblement, il s’agit là d’une alternative à l’immigration clandestine qui ruine tant de familles et fait tant de victimes. Ce n’est certainement pas la panacée dans la mesure où l’Europe est obsédée par le durcissement des conditions légales de séjour des étrangers sur son sol.

La vraie question aujourd’hui est de savoir si l’Europe est vraiment demandeuse et comment l’Afrique peut saisir cette opportunité !

Le Pays

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