Négociations agricoles Maroc-UE : Un accord win-win ?

1er octobre 2003 - 08h42 - Monde - Ecrit par :

Les producteurs et les exportateurs espagnols de tomates voient rouge. En revanche, leurs homologues marocains sont aux anges. La volonté politique de l’UE de réparer l’injustice à l’encontre du Maroc l’a remporté sur les intérêts purement économiques.

15 jours après que les rideaux soient tombés sur la cinquième conférence de l’OMC de Cancun, les négociations Maroc-UE marquent une avancée importante. Lors d’un entretien exclusif accordé à L’Economiste (www.leconomiste.com), le commissaire européen au Commerce, Pascal Lamy, avait déjà annoncé la couleur, qualifiant le consensus auquel étaient parvenues les deux parties d’accord gagnant-gagnant. Cela n’enlève en rien toutefois à la ténacité de la délégation marocaine menée par le secrétaire général du ministère de l’Agriculture, Hassan Abderrazeq, qui a obtenu gain de cause après près de deux ans d’âpres négociations.
L’accord auquel sont parvenus le Maroc et l’UE à Bruxelles prévoit en effet de porter les exportations de tomates marocaines à 190.000 tonnes au cours de cette campagne puis à 220.000 t dans quatre ans. Selon l’accord intérimaire, les Marocains ne pouvaient pas dépasser un contingent de 150.600 tonnes par an. Le nouvel accord est donc plus généreux. Si les exportateurs marocains sont de bons élèves, les quotas seront augmentés de 10.000 tonnes chaque campagne jusqu’à 2.004. Les exportateurs marocains espéraient certes mieux, ou au moins revenir au seuil initial qui était de l’ordre de 216.000 tonnes. Le contingent actuel n’en reste pas moins un peu plus confortable. Sans compter que le calendrier a été élargi jusqu’à fin mai. De plus, cet accord est signé avec l’Europe des Quinze et il sera renégocié en cas d’adhésion de nouveaux membres européens. Les pays de l’Est et la Russie avec l’Amérique du Nord restent des débouchés importants en absorbant des quantités non négligeables des tomates marocaines.
L’accord prévoit également une flexibilité supplémentaire. La nouveauté, selon Samir Tazi de l’APELEF, c’est que les exportateurs marocains ont désormais le droit au dédouanement GATT tout en respectant le contingent. Ce qui n’était pas le cas auparavant. Les Marocains ont droit aussi à une flexibilité de 20% d’un mois à un autre. Tout ce qui n’a pas été réalisé lors d’un mois sera ajouté au mois suivant. Le contingent additionnel fixé à 15.000 tonnes peut être utilisé du mois d’octobre à décembre. Ce n’est que le 15 janvier que les Européens font le décompte. En cas de dépassement, il faut s’attendre à des sanctions. Le contingent estimé à 5.000 tonnes pour le mois d’octobre (pic de la production) auparavant, sera de 10.000 tonnes. Paradoxalement, ce sont les Espagnols qui ont milité pour l’augmentation de ce contingent lorsqu’ils ont demandé aux pays du Nord, dont la campagne s’achève fin octobre et démarre à la mi- avril, de supporter avec eux la concurrence des productions marocaines. Ce consensus sur la principale production agricole marocaine, qui intervient après un an et demi d’âpres négociations, a toutefois une contrepartie. Les Européens ont en effet obtenu que leurs exportations de blé tendre vers le Maroc atteignent 1 million de tonnes lorsque la production nationale est inférieure à 2,1 millions de tonnes. Elle peut être ramenée à 0,4 million de tonnes au cas où la production marocaine est supérieure au seuil des 2,1 millions de tonnes. A la reprise des négociations en janvier 2002, la partie européenne n’entendait pas tomber au-dessous de 1,4 million de tonnes. In fine, c’est la délégation marocaine qui a obtenu gain de cause.

Derniers détails à Rabat

L’accord de Bruxelles n’est pas encore finalisé. Une nouvelle réunion devrait se tenir à Rabat pour préciser quelques détails techniques. Après cette réunion, la Commission européenne présentera au Conseil des Ministres de l’UE le texte de l’accord final pour approbation. Mais l’accord peut entrer en vigueur avec effets rétroactifs, c’est-à-dire à partir de la nouvelle campagne qui commence aujourd’hui.

Noureddine FASSI pour l’economiste

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