Être voilée au Maroc aujourd’hui

30 novembre 2007 - 00h22 - Maroc - Ecrit par : L.A

« Les jeunes voilées ont beaucoup de difficultés à définir clairement le hijab. En fait, le port du voile est souvent un choix non réfléchi », explique le sociologue Driss Bensaïd. Tel est le constat qui ressort de la dernière étude réalisée par le groupe des jeunes de l’Association démocratique des femmes du Maroc (ADFM) avec le soutien de l’Unifem.

Les objectifs de cette recherche qualitative sont de : connaître les différentes perceptions du hijab chez les jeunes citadins des deux sexes et appartenant à différentes couches sociales ; comprendre les raisons profondes qui poussent un nombre croissant de jeunes à adopter le voile comme mode vestimentaire ; saisir les diverses significations et perceptions du hijab et enfin en percevoir l’impact sur la participation des jeunes filles aux activités politiques et associatives. « En réalisant cette étude, notre but était de faire un état des lieux et non pas de prendre position ni de porter des jugements.

C’est une enquête qualitative qui a été menée auprès de jeunes citadins âgés de 15 à 25 ans choisis parmi les élèves, les lycéens, les membres des associations et les ouvrières de la région de Rabat », précise Rabéa Naciri, présidente national de l’ADFM.

Ainsi, l’enquête a révélé que la mode est le principal critère de choix du type de hijab, de sa coupe et de ses couleurs. Un autre constat fait est que la plupart de ces jeunes ont des connaissances fragmentaires et perturbées des versets coraniques et des hadiths relatifs au hijab. Et souvent, le hijab de la jeune fille, particulièrement l’adolescente, est négocié par la famille comme une condition préalable à la scolarité de la jeune fille au-delà du cycle primaire. Ce choix vestimentaire est représenté par les familles comme un important rempart contre les « risques » de la mixité dans les lieux publics (écoles, usines…).

En fait, cette étude constitue sans aucun doute une première. Puisque étant dans un pays musulman, la question du port du voile ne se pose pas. D’ailleurs, lors de cette enquête, Driss Bensaïd a relevé chez une bonne partie des jeunes non voilées l’existence de sentiment diffus de culpabilité. « Elles cherchaient absolument à justifier le fait qu’elles ne portaient pas de voile », dit-il. Quant aux jeunes garçons, ils sont plus exigeants que les filles en ce qui concerne la sobriété du voile qui est perçu comme l’une des principales preuves de la bonne moralité de la future épouse. « Ils estiment que le voile n’est pas là pour contrôler les filles mais plutôt pour qu’ils se contrôlent eux ! », souligne Driss Bensaïd.

Autre conclusion faite : le corps de la femme et sa présence dans l’espace public font encore l’objet d’enjeux et de débats politiques déterminants. Et si la mouvance islamiste revendique pleinement le hijab et considère les jeunes voilées comme le résultat et le prolongement naturel de son projet, le mouvement démocratique et associatif reste encore influencé par certaines représentations du hijab qui sont largement dépassées par la réalité, ce qui se traduit par un double cloisonnement des jeunes femmes voilées. D’ailleurs, nombreuses sont celles qui déplorent la discrimination dont elles font l’objet en milieu de travail. Elles se considèrent victimes de l’image négative des mouvements islamistes les plus extrémistes. Une perception qui existe notamment chez les jeunes qui revendiquent la modernité et pour qui la tolérance est, en principe, le mot d’ordre !

Elles restent coquettes

« Le port du voile est l’objet d’un véritable engouement chez les jeunes marocaines. Par contre, et en parallèle avec cette dynamique, le hijab passe pratiquement chez la grande majorité des jeunes, du registre sacré et du militantisme très présent chez les jeunes des années 80 au registre profane de la mode. Aujourd’hui, le hijab est considéré comme un simple choix vestimentaire qui obéit en premier lieu aux inclinations personnelles et aux exigences de la mode et non comme une identification.

A ce titre, exception faite du port du foulard, les autres parties du corps sont habillés et traitées selon les mêmes normes de la mode et de l’habillement », souligne Driss Bensaïd. Sur ce point, les jeunes voilées expliquent que le fait de porter le foulard ne veut pas dire être moches. Elles estiment qu’elles ont tout à fait le droit d’être jolies. Et c’est justement pour cette raison, qu’elles se bichonnent et se maquillent !

Le Matin - Dounia Z. Mseffer

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