Ces Japonais qui investissent le Maroc

24 novembre 2006 - 13h29 - Economie - Ecrit par : L.A

Mitsu & Co, Sumitomo Corporation, Yazaki, YKK… Les success stories de l’industrie japonaise au Maroc font parler d’elles. Depuis l’an 2000, une douzaine d’entreprises ont investi, directement ou indirectement, dans l’industrie, le trading, le textile, la pêche, les NTI, les BTP, l’énergie… Les exemples sont légion.

En si peu d’années, ces unités ont pu créer plus de 10.000 emplois directs et presque autant dans leur écosystème respectif. Aujourd’hui, elles envisagent de passer à la vitesse supérieure, produire à plein régime avec des plans d’investissement et projettent des extensions de sites, des créations d’emploi… Un gros appétit mais dans la discrétion totale. Une discrétion qui n’est pas seulement d’ordre culturel. Elle est aussi dictée par le contexte international et le terrorisme. Beaucoup d’expatriés japonais redoutent les kidnappings dont ont été victimes certains de leurs concitoyens.

Contrairement aux investissements classiques au Maroc, surtout européens, les industriels japonais ont leur propre culture d’entreprise, leurs codes sociaux, process de production… C’est ce que L’Economiste a pu relever dans les différentes entreprises visitées.

Une chose est sûre, partout dans le monde les Japonais mettent beaucoup de temps avant de se décider et investir dans un pays. Mais si la prise de décision est laborieuse, l’exécution est claire : « Une fois décidés, nous sommes sûrs, fidèles à notre engagement et nous réalisons nos objectifs jusqu’au bout », confie à L’Economiste Okamatsu Sozaburo, ancien ministre japonais de l’Industrie et du Commerce et vice-président de l’Association d’amitié maroco-japonaise.

Le Japon a adopté un principe sacro-saint ces dernières années qui consiste à mieux coller à la mondialisation : « la gestion et les investissements japonais s’adaptent en permanence et le mieux possible à la globalisation ». Contrairement aux idées préconçues, selon lesquelles la clé du succès japonais repose sur une robotisation poussée à l’extrême, des fameuses usines high-tech et sans hommes, le modèle japonais est participatif, adaptatif et réactif avec la ressource humaine au cœur du process, tient à expliquer Okamatsu.

En même temps, l’héritage est là. Le business modèle japonais est basé essentiellement sur la rigueur, la discipline et le respect de la hiérarchie Des valeurs qui font malheureusement défaut au Maroc. Consensuels par nature, les Japonais développent un type de management fondé sur la collaboration et l’entente. C’est une règle, le Japonais ne veut pas se confronter, c’est contreproductif. C’est plutôt la recherche de l’harmonie qui prime. Une attitude qui colle au système de valeurs dans l’Extrême-Orient et à la philosophie des Japonais.

Politique industrielle

Ce nouveau courant d’affaires gagnerait à se renforcer davantage au Maroc.

Le marché marocain occupe une place de choix dans la démarche d’investissement en Afrique du Nord. Certes, le volume des échanges est appelé à croître davantage. Mais ce qui est sûr en revanche, c’est que le regain d’intérêt pour le Maroc est illustré par les nombreuses visites d’hommes d’affaires, de patrons et d’institutionnels japonais. La dernière en date a été réalisée, début novembre, par une délégation de 23 patrons représentants de grands groupes industriels (NTI, énergie, banques, industrie).

Parmi les entreprises représentées, Shimazu, détentrice du prix Nobel scientifique il y a trois ans. C’est dire que les enjeux de cette dernière prospection sont de taille : « Nous envisageons de transférer au Maroc une partie de nos entreprises implantées dans l’UE ». Les chantiers des zones franches, Tanger-Med, le plan Azur ou encore l’outsourcing sont autant d’initiatives qui séduisent les patrons nippons lesquels voient à travers le Maroc un portail de l’Europe.

Mais en attendant, ces investisseurs se posent beaucoup de questions : est-ce qu’ils parviendront à se frayer une place dans la relation ancestrale qui lie le Maroc à l’Europe. Autre interrogation et non des moindres : est-ce que les investissements et autres projets structurants en infrastructures, menés par les pouvoirs publics, seront menés à termes et dans les délais impartis ? Ou encore comment le Maroc compte développer sa propre politique industrielle en pensant aux besoins de son marché domestique ? Le constat aujourd’hui est que le gros de la production est destiné à l’export. D’ailleurs, en termes de coopération, l’expérience japonaise en politique industrielle pour son marché domestique peut être riche en enseignements au Maroc.

La coopération occupe une place de choix dans les relations entre le Maroc et le Japon. Forte de 30 ans, la coopération nippone a fait bénéficier le Royaume d’une expertise dans divers secteurs : BTP, formation, recherche, technologie, infrastructures routières, maintenance, social…). Le montant global de l’aide japonaise accordée au Maroc s’élève à quelque 185.300 milliards de yens, répartis en dons, prêts et aides à des projets locaux. Ce qui fait du pays du Soleil levant le deuxième bailleur de fonds au Maroc après la France.

L’Economiste - Amin Rboub

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