Grève du transport routier : L’ordre public menacé ?

1er juillet 2003 - 20h53 - Maroc - Ecrit par :

Agressions, vandalisme, intimidations "sauvages"... les non-grévistes interpellent les pouvoirs publics. Pour les fruits et légumes, les pertes sont estimées entre 3 et 5 millions de DH quotidiennement. Des contacts auraient été établis entre ministère du Transport et grévistes au point chaud du mouvement, le Sud.

Rien ne va plus... La grève déclenchée par les transporteurs de camions des 8 tonnes, il y a plus de 10 jours, tourne au vinaigre. Les producteurs et industriels bloqués n’hésitent pas à parler de catastrophe et d’anarchie.
"Certains de mes conducteurs ont subi des agressions physiques et des camions sont saccagés au vu et au su de tous, surtout au niveau d’Agadir et Imine Tanoute", a déclaré un membre de la Fédération des transporteurs et propriétaire d’un parc de plus de 100 camions dont 5 sont, actuellement, hors d’état de fonctionnement. Jets de pierres, mini-barrages la nuit, coups et blessures... un scénario digne des films d’action des séries B.
Parallèlement aux intimidations et aux agressions, ce sont des millions de dirhams qui sont partis en fumée. Et ce sont surtout les produits périssables, les fruits et légumes qui sont les plus touchés.
"Le Souss Massa, première source d’alimentation en fruits et légumes de tout le Maroc, a connu un effondrement des cours au point de ne plus trouver preneur", s’insurgent les membres de l’APEFEL (association marocaine des producteurs exportateurs de fruits et légumes). Ils estiment leurs pertes entre 3 et 5 millions de DH par jour, soit l’équivalent de 800 à 1.000 tonnes de production journalière bloquée sur les sites de production.
Comme le décrivent des membres de l’Association, "même les chariots, pick-up et camions des producteurs agricoles sont pourchassés par les grévistes. Au lieu du Far-West, c’est le Far-South".
Selon les représentants de l’Apefel, "nous ne récusons en aucune manière le droit de grève prévue par la Constitution. Cependant, nous nous soulevons contre les agressions et les intimidations sauvages exercées contre les non-grévistes".
Face à cela, les producteurs dénoncent ces actes qu’ils qualifient d’irresponsables et de criminels et "interpellent les pouvoirs publics" pour mettre fin à cette situation "qui n’est ni dans l’intérêt de ces "pirates" ni de celui des consommateurs". Des industriels se disent très surpris de la non-intervention des autorités. "Les agressions contre les hommes et les biens sur le domaine public doivent être sanctionnées. Sinon, nous nous retrouvons devant une situation de non-droit. Nous ne pouvons pas continuer comme cela", avance un opérateur ayant requis l’anonymat. Des rumeurs circulent sur "une certaine connivence" entre les grévistes et des membres de l’autorité publique. Selon les mêmes rumeurs, des parlementaires/producteurs dans la région du Souss Massa participeraient au mouvement.
Parmi les meneurs de la grève, des transporteurs informels du marché de gros de Casablanca disent ne pas vouloir lâcher prise. "Nous continuerons notre mouvement tant qu’aucune solution n’est encore trouvée, surtout au sujet de la patente et du Registre du commerce. De même que le tonnage". Pour ce dernier point, les grévistes veulent passer du 8 au 18 tonnes.
Selon une source digne de foi, "ce conflit prend des tournures de récupération électorale. C’est de la surenchère politique à la veille des élections".
En attendant, les perturbations dans les approvisionnements se font sentir fortement à Marrakech, Agadir, Laâyoune, Tanger, Tétouan, Oujda et Nador. Avec pour conséquence, une flambée des prix. Des cas isolés d’intimidation de camionneurs non grévistes ont été enregistrés à Tanger.
Quant à l’axe Casa-Rabat-Kénitra, pour l’heure, les marchés de gros de fruits et légumes sont encore bien approvisionnés.
Tant bien que mal, les non-grévistes tentent de casser le mouvement en multipliant les livraisons au niveau des différents points de vente. Des producteurs utilisent, au lieu des 8 tonnes, des camions-remorques pour contourner la grève, au risque de voir leur marchandise "pourrir".
Pour la Fédération nationale du transport routier, il est temps que les forces de l’ordre interviennent. L’avenir du secteur dépend de l’issue de ce bras de fer". D’ailleurs, à l’heure où nous mettions sous presse, des contacts ont été établis entre le ministère du Transport et les grévistes dans différents lieux (Taroudant, Oulad Taïma, Inezgane et Agadir) pour tenter de trouver une solution.

Jihad Rizk pour L’economiste, Maroc

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