Maroc : Quand les hommes se font lifter

28 avril 2007 - 01h18 - Maroc - Ecrit par : L.A

Greffe de cheveux, liposculpture, lifting, rhinoplastie… Au Maroc également, la chirurgie esthétique n’est plus le dada exclusif des femmes. Les hommes s’y mettent, doucement mais sûrement.

Au pays des patriarches, les hommes aussi sont de plus en plus soucieux de leur apparence. Après avoir copié leur crème anti-rides et leur autobronzant, les fiers mâles du bled sont moins réticents à passer sous le même bistouri que leurs compagnes. C’est que les critères de beauté des hommes marocains ont radicalement changé. Les chaînes satellitaires sont pour beaucoup dans ce revirement.

C’en est fini du règne ubuesque de la bedaine envahissante et du crâne luisant. Un portefeuille bien garni ne suffit plus, à lui seul, à faire la virilité et le succès d’un homme. Désormais, pour se faire une petite place au soleil, dans le cœur de ces dames comme dans l’impitoyable monde du travail, il vaut mieux paraître jeune, en bonne santé et avec du peps à revendre.

« On assiste à un boom de la chirurgie esthétique dans notre pays depuis 5 ou 6 ans, surtout à Casablanca, qui devient en quelque sorte la capitale marocaine de la chirurgie plastique au même titre que Paris, en France, ou Rio de Janeiro, au Brésil. Et la demande va grandissante chez le sexe masculin. En ce qui me concerne, les hommes représentent de 10 à 15% de ma patientèle », rapporte Dr. Mohamed Guessous, chirurgien plasticien à Casablanca.

Autre évolution majeure, la chirurgie esthétique n’est plus l’apanage de l’élite fortunée du pays. Démocratisation des prix aidant et effet de mode oblige, la petite bourgeoisie et les classes moyennes s’y mettent aussi. Les jeunes loups aux crocs aiguisés et autres cadres ambitieux encore plus. Car, dans l’esprit de beaucoup, qui dit corps élancé, dit santé équilibrée, vie équilibrée et, partant, meilleure productivité au travail et image plus flatteuse, plus vendeuse pour l’employeur et l’entreprise en général.

Au-delà de la soixantaine, la demande émane davantage de personnages publics, parlementaires, magistrats, politiciens, chefs d’entreprise et autres hommes de pouvoir qui cherchent à montrer qu’ils maintiennent le cap en renvoyant un autre reflet que celui d’un vieux croulant et dépassé.

« Les tabous s’effritent. Les hommes viennent consulter sans embarras ni a priori. Ils sont généralement entraînés par leurs femmes, premières consommatrices de chirurgie esthétique, ou viennent de leur propre initiative. La demande se focalise autour de deux pôles : l’esthétique du visage et la silhouette. A Casablanca, les requêtes des patients sont calquées sur celles des citadins des grandes villes occidentales », remarque Dr. Guessous.

Parmi les interventions les plus demandées, la greffe de cheveux vient en tête. C’est le cas de le dire. Fort heureusement pour ces messieurs, les techniques se perfectionnent, amenant plus de confort et de rapidité lors de l’intervention, mais aussi plus d’efficacité. « Nous avons introduit des concepts inédits dans cette discipline. On réalise des méga-séances à raison de 2.000 greffons en moyenne par séance, soit 3 ou 4 fois plus de greffons que dans les méthodes classiques », soutient Dr.Guessous.

Pour parvenir à cette cadence d’implantation (les cheveux sont prélevés de l’arrière de la tête), les chirurgiens se font assister par des infirmières spécialisées formées par leurs soins et disposent de tout un matériel de pointe. L’opération se fait sous anesthésie loco-régionale. L’intervention en elle-même revient à 30.000 dirhams environ la méga-séance, sachant qu’une seule séance, selon l’état d’avancement de la calvitie, peut suffire à combler le crâne. Après les disgracieuses boules à zéro, les Marocains cherchent à se débarrasser de leurs bourrelets superflus.

C’est ce qu’on appelle la liposculpture de la silhouette. Cette intervention aspire la graisse qui se dépose avec l’âge (à partir de 35 ans) sur les poignées d’amour, le ventre et/ou le thorax des hommes, selon les prédispositions génétiques de chacun. Une graisse parfois tenace, résistante aux régimes alimentaires et au sport et qui augmente le risque de maladies cardiovaculaires. Des précautions supplémentaires sont prises pour les patients diabétiques et cardiaques lors de l’anesthésie. L’intervention, qui dure une heure environ, est tarifée aux alentours de 15.000 dirhams.

Le patient reprend sa vie sociale dans les trois à sept jours suivant l’opération.

En troisième position des demandes des patients, vient le mini-lifting du visage et des paupières. Cette intervention se fait à partir de la fin de la quarantaine chez les femmes et de la soixantaine chez les hommes, car leur peau est plus épaisse. Les femmes sont beaucoup plus demandeuses sur ce créneau, mais les hommes y viennent progressivement à leur tour.

La chirurgie du visage, surnommée « intervention-reine » ou « chirurgie du bonheur » par les pros du métier, du fait de ses résultats plus spectaculaires et de la gratification que le chirurgien en tire, démarre à partir de 35.000 dirhams en moyenne. « Dans un souci de prévention, nous proposons aux patients plus jeunes (dans la cinquantaine) des méthodes non-chirurgicales, comme le comblement des rides au botox ou le laser », ajoute Dr. Guessous. Ceci dit, quand la chirurgie est incontournable, comme nous le confirme Dr. Guessous, les Marocains et les patients en général sont plus demandeurs de « soft-litfing », d’interventions qui paraissent les plus naturelles possibles, sans effet artificiel, refait ou figé, comme cela s’est vu chez certaines stars hollywoodiennes. D’où la nécessité de trouver un médecin à son écoute.

« La demande de chirurgie esthétique se fait généralement sur la base d’un malaise physique, qui entraîne à son tour un mal-être psychologique et social. Mais il arrive que cela soit juste un caprice ou une envie d’imiter un voisin ou un proche. C’est pour cette raison que plusieurs consultations sont parfois nécessaires afin de s’assurer de la nature et de l’origine de la demande du patient. Avant le passage à l’acte, on s’assure également que la demande, en plus d’être réelle, est réaliste et réalisable », explique Dr.Guessous. Pas de place pour l’utopie, en somme. Autrement dit, tout l’or du monde ne parviendrait pas à vous transformer en Marlon Brando, en Brad Pitt et autre bellâtre du 7ème art si Dame Nature vous a gratifié d’un physique de Quasimodo.

En conclusion, le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Ne risque-t-on pas désillusions et complications sous le scalpel ? A en croire, en tout cas, les spécialistes interrogés, la chirurgie esthétique pratiquée dans certaines cliniques privées marocaines de renom n’a plus rien à envier à ses consoeurs américaines ou européennes, que ce soit en moyens techniques, humains, en infrastructures ou en services annexes.

Encouragés par ces progrès et par les tarifs deux fois moins élevés qu’en Europe, de plus en plus de patients étrangers viennent se faire opérer au Maroc, le soleil et la bonne humeur en prime.

« 50% de ma patientèle actuelle sont étrangers », confirme Dr. Guessous. Le Maroc de 2010 tiendra-t-il compte de ces touristes d’un genre nouveau ?

Maroc Hebdo - Mouna Izddine

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