Réunion interconfessionnelle de Bruxelles sur "la paix de Dieu dans le monde"

1er mars 2007 - 20h02 - 2001 - Ecrit par : L.A

« Louange a Dieu, seigneur des cieux.

Paix sur tous ses Prophètes.

Altesses, Excellences, Eminences,
Mesdames et Messieurs,

A l’ouverture des travaux de cette importante rencontre, j’ai le plaisir de vous apporter le salut de la paix et d’adresser l’expression de mon hommage et de ma reconnaissance, au patriarcat œcuménique qui a pris l’heureuse initiative d’organiser cette conférence interreligieuse, en mobilisant toutes les bonnes volontés, parmi les représentants des trois religions, pour faire face aux dangers qui pèsent sur le monde d’aujourd’hui.

Je me félicite également du fait que cette réunion se tient sous l’égide de l’union européenne, ainsi que des efforts que celle-ci ne cesse de déployer pour préserver la paix, favoriser l’entente et le dialogue, et propager l’esprit de la coopération et de la solidarité. Je leur dis toute ma joie d’avoir été invite a adresser un message d’ouverture des travaux de ce séminaire, compte tenu de l’intérêt tout particulier que j’accorde a toute action visant a favoriser le rapprochement des religions et des civilisations, et la fraternité entre les gens.

Votre rencontre revêt un intérêt tout particulier, dans la mesure où elle se tient dans un contexte international qui est celui de tous les doutes, de toutes les interrogations et souvent, celui de tous les dangers. Votre conférence vient a son heure et elle est plus que jamais opportune, nécessaire et bienvenue, car elle veut associer le nom de Dieu a la paix - qui constitue un des attributs divins- et elle veut restituer aux religions du livre et donc a l’Islam, leur vraie lumière, celle du dialogue, du respect, et de l’éthique. Je suis donc heureux d’y faire entendre la voix du Maroc et celle de son Roi, Amir al Mouminine (commandeur des croyants) qui n’a jamais doute des vraies valeurs prônées par l’Islam et fondées sur la justice, le respect de la vie, la solidarité des hommes et l’écoute de l’autre.

Cette profession de foi, parlant du Maroc, n’est ni un propos académique ni une dissertation théorique. Elle est l’expression de notre vie au quotidien. Elle est aussi la caractéristique irréfragable de la société Marocaine qui, tout au long de notre histoire et au fil des siècles, a su nourrir, renforcer et préserver une lecture et une pratique de la religion qui a certes épouse son temps et les contraintes du moment, mais sans jamais rien céder des valeurs humanistes qui n’ont pas cesse d’inspirer et de guider les Marocains.

De par sa position géographique, le Maroc est devenu un lieu de convergence et de brassage culturels et civilisationnels, ouvert en particulier sur les cultures des Peuples méditerranéens, retenant de leurs civilisations ce qui lui convient, sans sentir le moindre gène à s’accommoder de ce pluralisme, tant il est convaincu qu’il est à la base de la richesse de sa civilisation. C’est, du reste, ce qui a permis a notre pays de jouer un rôle important dans son environnement régional et au niveau international et de répondre, chaque fois qu’il y est appelé et dans toute la mesure de ses moyens, au devoir de contribuer a toute initiative internationale destinée a instaurer la paix, a mettre un terme aux tensions, et a soutenir toute négociation et tout dialogue visant a faire prévaloir la paix a la place des conflits.

L’histoire contemporaine retient avec fierté que mon vénéré père, sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu ait son âme, privilégiait la voie du dialogue, que toutes ses prises de position traduisaient une grande perspicacité, qu’il était fortement attache aux valeurs spirituelles et humaines devant régir les conflits internationaux, qu’il faisait du dialogue, de la modération, de la recherche de la paix et de la protection des droits, le fondement même de sa conception du pouvoir et qu’il s’attachait, a partir de son statut spirituel et temporel, de Roi, Amir al Mouminine, a consolider la culture de la concorde, de l’entente et de la coexistence entre les nations et les Peuples. Ainsi, l’histoire nous enseigne qu’il est devenu un modèle a suivre et une véritable référence, lorsqu’il s’agissait de rapprocher les religions, les civilisations et les cultures consulté, il donnait ses avis éclairés sur tous les problèmes et les dilemmes poses, et ce, de l’aveu de tous, y compris les tenants de la pensée unique qui devaient ensuite reconnaitre a sa Majesté, la sagacité, la pertinence et la sagesse qui étaient les siennes.

Mesdames et Messieurs,

Nous entendons de plus en plus évoquer un choc de civilisation qui marquerait le XXIème siècle, de même que le XIXème siècle a vu s’affronter les nationalités et le XXème siècle les idéologies. Ce discours qui se nourrit de toutes les peurs est un piège ou veulent nous attirer ceux qui refusent de faire face au vrai dilemme de notre temps. Entrer dans la logique de la fracture spirituelle et philosophique, c’est tomber dans l’embuche que nous tendent les vrais ennemis de la foi, qu’elle soit musulmane, juive ou chrétienne.

Ceux qui veulent nous opposer, culture contre culture, religion contre religion, sont les Prophètes de l’obscurantisme et de la régression. Ce sont ceux qui voudraient nous faire oublier que les religions du livre, dans la foi en Dieu l’unique et le message d’Abraham, ont toutes apporte a l’homme, le message de la délivrance et du progrès, contre la barbarie, la violence et l’extrémisme.

Tout Peuple ayant une civilisation et se réclamant d’une religion peut et doit être fier de toutes les choses radieuses qu’il a apportées à l’humanité. Mais, il se doit aussi de mesurer ses parts d’ombre, en s’interrogeant collectivement : que dire des crimes dont bien des civilisations ont été coupables et dont bien peu ont fait l’économie ? Beaucoup, à un moment ou à un autre de leur histoire ont laisse parler le mépris et la haine.

Le courage de la mémoire est le premier devoir de toute civilisation qui se respecte. La fidélité a nos valeurs, même quand elles sont menacées par la démagogie, le populisme et l’ignorance, est notre force et elle forge notre identité et notre fierté. La résistance devant ceux qui veulent faire commerce du nom de Dieu, c’est notre devoir et notre responsabilité.

Ceux qui sont le plus interpelles par le dialogue aujourd’hui, sont ceux qui ont en partage la foi en Dieu unique, et les livres révélés, qui affirment que les humains sont tous responsables devant leur créateur le jour du jugement, qu’ils sont égaux entre eux et que Dieu les a différencies entre eux, en en faisant « des Peuples et des tribus », de différentes couleurs et de différentes langues, pour « qu’ils se connaissent entre eux » et non pour qu’ils se renient mutuellement. De même, ces livres sacres dénoncent l’injustice et l’agression sous toutes les formes. Ils appellent, en revanche, à la fraternité et à la solidarité pour répandre la vertu et combattre le vice. En effet, ces valeurs communes a nos religions nous permettent toutes, pour peu que nous puissions les appliquer a notre conduite politique, sociale et culturelle, d’édifier un monde nouveau, jouissant de la sécurité et de la stabilité, de l’entente et de la concorde. Je pense que votre rencontre révèle a quel point vous mesurez l’impérieuse nécessité de mettre en œuvre ces valeurs.

Mesdames et Messieurs,

Si les participants a cette conférence ont exprime de façon sincère et fidele l’appel de l’Islam a la paix, au dialogue et a la parfaite coexistence entre les hommes, je tiens à confirmer les propos qui ont été clairement énoncés, a savoir que l’Islam incarne l’ensemble de ces valeurs aussi bien dans son essence que par la méthodologie prônée par son discours. En effet, le saint coran a préconisé de façon claire le dialogue sur la base d’une approche rationnelle, notamment dans le verset suivant : « dis : (y gens du livre, venez a une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions que Dieu, sans rien lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors de Dieu) ».

Il est, par conséquent, devenu nécessaire pour tout non-musulman qui s’intéresse, aujourd’hui, au dialogue interreligieux de s’informer des valeurs Islamiques -en se référant aux sources sures et immuables- et de l’histoire de la civilisation Islamique qui a ancre ces valeurs dans les sociétés musulmanes, et notamment dans celles ou musulmans et non-musulmans vivaient en bonne intelligence, aussi bien en orient qu’en occident. Seule cette méthodologie objective est de nature a permettre d’appréhender l’image authentique de l’Islam, et d’éviter de se laisser berner par les allégations colportées par certains medias tendancieux qui vont jusqu’a taxer l’Islam de terrorisme, d’agressivité et de fanatisme, invoquant, a ce propos, les agissements d’extrémistes malveillants qui se sont écartés de la juste voie de l’Islam authentique. D’ailleurs, aucune religion n’est exempte de leurs semblables.

Le dialogue interreligieux doit être base sur la bonne connaissance, la sagesse, la perspicacité et l’humilité, tout sentiment de supériorité, de haine et d’extrémisme étant les ennemis du dialogue fructueux et constructif. Le dialogue des religions doit être fonde sur une connaissance judicieuse, sur la clairvoyance, la lucidité et humilité, car l’arrogance et l’intolérance sont les pires ennemis du dialogue constructif.

Le dialogue entre les religions est l’autre face du dialogue entre les civilisations et les cultures. La responsabilité en incombe a tous ceux qui, comme vous, ont la conviction que les civilisations humaines ne se sont jamais affrontées et que de tout temps elles ont été complémentaires et se sont enrichies mutuellement et en synergie les unes avec les autres. A telle enseigne qu’il n’a jamais existe de civilisation vivant en vase-clos et se passant des apports d’autres civilisations. Si toutes les civilisations puisent leur origine dans la foi religieuse, ou ce qui en tient lieu, le dialogue interreligieux qui constitue la meilleure voie d’accès au dialogue des civilisations et des cultures, requiert ouverture d’esprit, imagination, mais aussi l’esprit de responsabilité, force d’âme, et fermeté, afin de résister a tout ce qui peut mettre en cause la liberté et les droits des individus qui forment la communauté des hommes.

A cet égard, c’est avec beaucoup d’amertume que, en ma qualité de Président du comité al-Qods al Charif, issu de l’organisation de la conférence Islamique, je pense a l’épreuve qui afflige la ville de la paix, lieu de convergence des trois religions, me faisant l’écho des sentiments de consternation et de frustration qu’éprouvent tous les croyants du fait des pratiques agressives perpétrées par le gouvernement israélien a l’encontre du Peuple palestinien frère, et qui sont en contradiction avec les valeurs religieuses et les conventions internationales. J’appelle votre auguste assemblée à se tenir aux cotes de cette ville meurtrie. C’est notre ville à nous tous qui tenons à ce qu’elle demeure la ville de la fraternité et de la coexistence exemplaire entre les religions.

Je suis persuadé que votre conférence prend la mesure de l’ampleur des responsabilités qui nous incombent collectivement pour faire en sorte que chaque rencontre et chaque séminaire sur le dialogue entre les religions et les civilisations constitue une nouvelle étape franchie, confortant l’étape précédente et ajoutant un ou plusieurs jalons a l’édifice de l’entente et de la coexistence entre les hommes.

C’est cette conviction que j’ai exprimée a l’occasion de la réunion du forum méditerranéen qui s’est tenu a Agadir en vue d’adopter une position commune a l’égard des causes et des retombées des agressions odieuses du 11 septembre. J’avais, en effet, souligne la nécessité d’instaurer un dialogue permanent, structure et stratégique entre les états, sur la base du respect des droits de l’homme, notamment le droit a la liberté, a la dignité et a la vie dans la quiétude, sans discrimination entre les races, les religions, les cultures et les pays. J’avais également mis l’accent sur la nécessité d’œuvrer à l’apaisement de tous les foyers de tension et de combattre le fanatisme qui sape la stabilité et la paix mondiales.

À ce propos, j’aimerais, en guise de conclusion de ce message, proposer la réunion, l’année prochaine, au Maroc, d’une conférence élargie sur le dialogue interreligieux et interculturel. Le royaume du Maroc, terre de dialogue et de rencontres, sera heureux d’accueillir cette réunion afin de poursuivre l’action entreprise, d’approfondir et de consolider l’entente, la paix et le dialogue, et de couronner cette rencontre par l’élaboration d’une charte d’éthique entre les religions monothéistes, qui soit de nature a consacrer, dans la pratique, les valeurs que nos religions ont en commun, une charte a la mesure des aspirations qui animent nos Peuples, toutes croyances confondues, pour édifier un avenir sur, empreint de paix et de quiétude pour l’humanité tout entière.

Vous trouverez toujours en le Maroc et son Roi, Amir al-Mouminine, dont vous connaissez l’attachement aux idéaux religieux et humains de liberté, de paix, de fraternité, de solidarité et de dignité, le meilleur appui et le plus solide soutien, pour la concrétisation des objectifs que vous assignez a vos rencontres dont je bénis les nobles desseins. J’implore le très-haut de vous guidé sur la voie judicieuse du bien, pour que votre œuvre au service de l’humanité, recueille son divin agrément, et pour que celle-ci réalise son unité spirituelle et accède au bonheur eternel.

Que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur vous ».

19/12/2001

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