Hollywood-sur-Sable : le Maroc fait son cinéma...

23 juin 2004 - 21h01 - Culture - Ecrit par :

Repus du spectacle et fatigués de l’animation de Marrakech, nous remontons enfin dans notre Land Rover. Direction : l’ancienne ville de garnison de Ouarzazate et le village de Aït ben Haddou. "Hollywood-sur-sable" nous tend déjà les bras !

A peine a-t-on franchi les remparts de la ville que l’agitation des souks et l’animation de la place Jemaa-el-Fna nous semblent déjà bien loin. Très vite, la nature reprend ses droits. Très vite aussi, la RP 31 se faufile à travers des paysages de toute beauté. Traverse des villages paisibles. Croise des marchés encore authentiques. A l’horizon, le col du Tichka, qui culmine à 2 260 m d’altitude, semble flirter avec les nuages blancs qui moutonnent dans le ciel bleu.

La plus belle route du Maroc

Itinéraire obligatoire pour aller de Marrakech à Ouarzazate, cette route passe à juste titre pour être l’une des plus agréables du Maroc. Voire même la plus belle route de montagne du pays. Si l’on ne prête guère d’attention aux paysages et aux villages, environ 4 h suffisent pour avaler les 198 km tout en lacets et en virages qui séparent les deux villes. Certaines agences de voyages prévoient même l’aller-retour en une seule journée, avec arrêt-repas à Ouarzazate. Ce qui fait quand même beaucoup de bitume et de zig-zags pour une simple tajine... Il est dommage d’aller aussi vite. De passer à côté de rencontres souvent sympathiques et de points de vue à couper le souffle. Venant de l’impériale Marrakech, les paysages commencent à devenir sompteux dès que l’on passe le col du Tizi n’Aït, à 1 470 m d’altitude. De son sommet, on s’offre une magnifique vue sur le djebel Tistouit et l’on aperçoit, en contrebas, une poignée de kasbah et de ksour qui s’inscrivent avec beaucoup de charme dans cet environnement naturel exceptionnel.
Si l’on n’est vraiment pas pressé et que l’on désire savourer pleinement le voyage, il ne faut surtout pas hésiter à prendre les petites routes annexes et les chemins de traverse. Pour, par exemple, filer sur Teloued qui est l’ancien fief du pacha de Marrakech. Ou pour partir à la découverte de la kasbah d’Anemiter qui se situe encore à l’écart de la plupart des plus grands circuits touristiques classiques. Et pour admirer au passage la jolie kasbah de pisé d’El Mdint dont les tours sont artistiquement décorées de motifs en relief. Et puis... Et puis il y a le ksar d’Aït ben Haddou !
Au détour d’un virage, à hauteur de l’oued Mellah, le mirage ! Accroché à une butte, un entassement de tours crénelées se dresse sur l’horizon. Des tours de kasbah se reflètent dans la rivière. Quelques femmes vêtues de tissus colorés lavent le linge dans l’oued. Tous les ingrédients d’une image classique sont réunis et l’on comprend un peu mieux pourquoi le village de Aït ben Haddou - extraordinaire château de terre et de roseau - passe pour être le plus photogénique du Sud marocain. C’est encore plus magique que ce que l’on peut imaginer à la lecture des contes des Mille et Une Nuits.

Sur les traces de Mohamed et de Michaël Douglas

Mohamed a une dizaine d’années. Il vit ici, dans le vieux village de pisé. Et va à l’école de l’autre côté de l’oued, dans le village moderne. Du moins lorsque les fortes crues ne l’obligent pas à faire l’école buissonnière. De toute manière, l’école, c’est pas trop son truc. Lui, ce qu’il préfère, c’est aller garder les chèvres dans la montagne. Comme le faisait son grand-père avant lui. Comme le fait encore son père aujourd’hui. Ou servir de guide aux touristes qui visitent cet authentique ksar-mémoire. En annonçant d’emblée le but de la manoeuvre : "La photo et le cinéma, c’est de l’argent", commente-t-il sans fausse pudeur. Nous prenant par la main, il s’affiche d’emblée comme notre guide personnel. Repoussant sans grand ménagement les autres gosses de la famille qui aimeraient pourtant bien partager le pactole...
C’est avec fierté qu’il nous rappelle que le ksar d’Aït ben Haddou est devenu, grâce au cinéma, l’un des plus célèbres du monde. Non, mieux que ça ! Le plus célèbre du monde ! Le souvenir du réalisateur David Lean plane encore sur le site et les vieux murs de pisé se souviennent toujours du tournage de "Lawrence d’Arabie". Et résonne toujours du bruit des 20.000 figurants montés sur leurs dromadaires... Tout comme ils revivent encore les scènes les plus mémorables de "Sodome et Gomorrhe".
Plus près de nous, c’est ici que Michaël Douglas chercha son fameux "Diamant du Nil". C’était en 1984 et, bien qu’il n’ait pas vécu lui-même le tournage, le jeune Mohamed rigole encore à certaines anecdotes croustillantes. "Cette grande porte que tu vois là-bas, on l’avait construite spécialement pour le film. Ce sont les assistants du réalisateur qui supervisaient tout notre travail et ils se prenaient vraiment au sérieux ! Mais quand Michaël Douglas, installé aux commandes d’un avion de chasse, a voulu s’enfuir aux commandes de cet avion en passant sous la porte, ils se sont vite aperçus qu’ils avaient vu trop petit. Toute la construction s’est effondrée comme un château de cartes ! Tu t’imagines ! Ca a été la panique sur le tournage. Heureusement, nous n’avons pas mis longtemps a reconstruire une nouvelle porte, aux bonnes dimensions. Cela fait aussi partie de la magie du cinéma".
Une reconstruction qui n’a pas vraiment gêné les habitants du village. C’était du travail supplémentaire. Donc de l’argent supplémentaire. Souvent volubile, Mohamed se montre pourtant assez discret sur la question. Il est pourtant de notoriété publique que, grâce au 7e Art et aux activité dérivées, les habitants de Aït ben Haddou figurent parmi les plus riches de la région : "Souvent, continue Mohamed, les réalisateurs nous enrôlent comme figurants. Ou bien nous leur louons des terres. Ou nous travaillons à la construction de certains décors, comme pour "Le Diamant du Nil". C’est vrai que c’est intéressant pour le village. Plus, en tout cas, que le petit élevage et les lopins de terre que nous cultivons". Quant à avoir des chiffres plus précis, pas question ! Mohamed se perd brusquement dans un délicieux flou artistique manifestement bien rôdé... Et si l’on tient vraiment à en savoir plus, il n’y a qu’à mettre le cap sur Ouarzazate : l’ancienne ville de garnison se positionne aujourd’hui comme la "Cinecitta à la marocaine".

Philippe Chavanne - Abslolut Travel - Extraits

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Sujets associés : Cinéma - Tournage

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