Les Marocains "s’exilent" de plus en plus à l’étranger

16 février 2007 - 01h00 - Maroc - Ecrit par : L.A

Migrants réguliers ou « harragas », nos compatriotes sont de plus en plus nombreux à tenter l’aventure d’un exil volontaire. Cette tendance est observée avec les nouvelles générations migratoires profitant du regroupement familial autorisé en terre d’immigration. Et elle est corroborée par la faiblesse de la migration de retour au pays d’émigration.

Les conclusions d’une étude du HCP réalisée par les chercheurs du CERED (Centre ’études et de recherches démographiques) sur la réinsertion des migrants de retour sont formelles, du moins au vu du comportement sélectionné représentant deux des plus grandes régions économiques du Royaume, le Grand-Casablanca et le Souss-Massa-Draa.

En effet, le chercheur Mohamed Mghari a abouti au constat de « la faiblesse du mouvement de retour. Un certain nombre de Marocains sont pourtant revenus. Or, si les études sociodémographiques sur la migration internationale ont beaucoup progressé ces dernières années, le phénomène du retour a peu retenu l’attention des chercheurs jusqu’à présent. Les raisons de cette lacune dans le champ de la recherche sont probablement dues, en grande partie, au manque de données quantitatives et qualitatives ».

Bien que les données disponibles ne peuvent éclairer suffisamment sur la question, les chercheurs se montrent persuadés que « le mythe du retour a naturellement pris fin avec l’arrêt de la migration pour raison de travail et la mise en œuvre de la procédure de regroupement familial entamée vers le début des années 1970 ». Cette nouvelle situation a suscité un intérêt plus marqué chez nos ressortissants à vouloir s’installer durablement à l’étranger, notamment, les MRE résidant en France, Belgique, Pays-Bas et Allemagne. « Progressivement, les migrants marocains développent une tendance à l’installation définitive dans les pays de résidence », persistent et signent les artisans de l’enquête diligentée par le Département piloté par Ahmed Lahlimi Alami. Le Haut Commissaire au Plan a le mérite de créditer l’opinion publique d’ouvrages et de publications sur des thématiques de grande actualité en garantissant l’objectivité requise des investigations et la transparence des
conclusions et résultats d’enquêtes.

La fin du mythe du retour

Autrement dit, Lahlimi rend une fière chandelle à l’évolution du tissu socioculturel de la société marocaine qui est bien renseignée sur les failles et les carences des systèmes considérés et initiée aux perspectives et prospectives espérées à confronter avec les attentes des Marocains ?

Pour revenir à la migration de retour, les MRE désirent de plus en plus s’installer ailleurs en y faisant venir leurs familles et en demandant la nationalité du pays d’accueil. Cette volonté d’immigration durable et définitive semble être confirmée par l’effectif croissant de nos ressortissants à acquérir la nationalité du pays de résidence. Une tendance qui est confortée par le constat d’échec de certaines expériences de retour de leurs collègues ou parents dans leur région d’origine et expriment leur découragement au vu des « facteurs socioéconomiques répulsifs » qui sévissent au Maroc.

D’autres paramètres découragent les flux de réinsertion migratoires plus directement liés aux déboires subis par nos MRE dans les obstacles rencontrés lors de la tentative de réinsertion socioéconomique au Royaume. En effet, près de 72% d’entre eux n’ont pas réalisé d’investissements dans un projet à caractère productif et que l’essentiel des dépenses consenties se confinent à la seule acquisition immobilière ou foncière. À cela s’ajoutent la moyenne d’âge avancée de la majorité des migrants de retour issus des premières vagues des années 60, l’analphabétisme et l’absence de formation spécifique ou de préparation du projet avant de regagner leur pays. Comme en témoigne le chercheur Bachir Hamdouch, « le nombre limité de projets des migrants de retour au pays s’explique par des raisons liées à leur âge avancé, leur mauvais état de santé, les moyens dont ils disposent, les difficultés qu’ils rencontrent et le peu de facilités qui leur sont accordées ». D’autant plus que plus des deux tiers d’entre eux ne préparent pas leur retour au pays d’origine.

Les trois quarts des migrants de retour n’ont pas bénéficié de facilités administratives et bancaires et ont dû avoir recours aux prêts informels pour monter leur petite affaire. En outre, 95% d’entre eux ont assuré n’avoir fait l’objet d’aucune assistance ou accompagnement dans la réalisation de leur projet. Ni de la part de l’administration, ni des collectivités locales, ni de la société civile, ni des banques. Ce sentiment d’abandon ou de négligence est pris en ligne de compte par les nouvelles générations de migrants désirant changer de pays et de nationalité pour s’installer définitivement sous d’autres cieux.

La Gazette du Maroc - B.M.

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