Discours du Roi Mohammed VI à l’ouverture de la 1ère session parlementaire de la 5ème année législative

15 octobre 2011 - 09h53 - 2011 - Ecrit par : L.A

Voici le texte intégral du discours du Roi Mohammed VI, à l’occasion de l’ouverture de la 1ère session parlementaire de la 5ème année législative vendredi 14 octobre 2011.

"Louange à Dieu,

Paix et Salut sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons.

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Nous nous adressons à vous, aujourd’hui, dans un contexte bien particulier, qui se distingue par l’engagement de notre pays dans la mise en œuvre de la nouvelle Constitution, à travers la mise en place des institutions qu’elle prévoit, dont, et au premier chef, le parlement et le gouvernement. Ce n’est donc pas seulement l’occasion pour Nous de présider l’ouverture d’une session parlementaire ordinaire.

Il s’agit plutôt d’un moment fort, augurant la première législature sous l’égide de la nouvelle Constitution, et l’amorce d’une étape historique dans le processus d’évolution que connaît le Maroc en matière de démocratie et de développement. Aussi, appartient-il à toutes les parties prenantes dans cette mutation salutaire d’assumer pleinement leurs responsabilités. Elles se doivent de continuer à œuvrer pour assurer le succès des prochaines élections parlementaires, en s’astreignant aux normes de transparence qu’elles exigent, et en faisant preuve, à cet effet, de confiance, de clarté et de patriotisme sincère.

Le changement profond apporté par la Constitution doit se concrétiser à travers le renouvellement des institutions, avec leur crédibilité démocratique, leurs élites qualifiées et leur action politique efficiente, ainsi que leurs projets de développement concrets, susceptibles d’assurer les conditions d’une vie libre et digne à toutes les franges de Notre peuple fidèle, notamment ses catégories démunies et sa jeunesse ambitieuse. Telle est la voie judicieuse à emprunter pour réhabiliter et rendre ses lettres de noblesse à l’action politique, et afin de mettre la performance des institutions au diapason de la place constitutionnelle éminente qui leur est réservée. Il faudra, à cet effet, instituer une pratique politique nouvelle fondée sur l’efficacité, la cohérence et la stabilité institutionnelle, une pratique permettant à chaque pouvoir d’assumer la plénitude de ses responsabilités, dans le cadre de la séparation, de l’équilibre et de la collaboration entre les pouvoirs.

En assumant la mission constitutionnelle qui Nous est dévolue de veiller au bon fonctionnement des institutions et à la protection du choix démocratique de la Nation, Nous avons à cœur de voir les nouvelles institutions refléter l’esprit et la lettre de la Constitution, et incarner notre ambition collective de voir émerger des instances parlementaires et exécutives efficientes :

• Elles ont pour fondement un parlement fort, reflétant la volonté populaire librement exprimée, exerçant ses compétences législatives exclusives, et ses larges prérogatives en matière de contrôle, un parlement qui assume efficacement son rôle dans le domaine diplomatique, au service des justes causes de la Nation, notamment et au premier chef, la question de notre intégrité territoriale.
• Elles s’appuient également sur un gouvernement performant, issu d’une majorité parlementaire solidaire et homogène, exerçant, avec son chef, l’intégralité de son pouvoir exécutif, et assumant la responsabilité qui lui incombe d’établir et de mettre en œuvre son programme, et d’en traduire les priorités dans des politiques publiques efficientes et cohérentes.

Nous sommes convaincu que si le système démocratique repose sur le pouvoir de la majorité et la primauté de la loi, il s’appuie, tout autant, sur la participation positive de l’opposition parlementaire. De ce fait, la mise en œuvre du dispositif y afférent est de nature à permettre à cette opposition de constituer une autorité de contrôle responsable et une force de proposition constructive.

Néanmoins, la crédibilité politique des institutions resterait purement formelle tant qu’elles n’agiraient pas comme un puissant levier pour le développement économique, la cohésion sociale et la modernisation culturelle. Et c’est là qu’apparaît l’originalité du modèle marocain qui repose sur le tandem démocratie-développement. Il procède, en outre, d’une approche évoluée du pouvoir, fondée sur une synergie positive avec la dynamique constructive de la société marocaine, et avec les mutations qui s’opèrent aux niveaux régional et international. Tout cela procède d’une volonté nationale propre et s’accomplit de manière parfaitement souveraine, moyennant un travail participatif, collectif et assidu, et une ouverture sur le monde en évolution.

Voilà ce qui a permis au Maroc d’inscrire tant de réalisations et de réformes majeures à son actif, et d’assurer une gestion maitrisée des répercussions d’une conjoncture économique et financière mondiale difficile, dont les crises successives exigent plus de vigilance, de rigueur et de rationalisation. Mais cela ne saurait donner lieu à une quelconque autosatisfaction. Il devrait plutôt inciter à multiplier les efforts pour conforter notre modèle de démocratie et de développement, lequel ne tire pas sa force uniquement des efforts déployés pour renforcer les acquis et poursuivre les chantiers structurants. Il procède essentiellement de la volonté de s’employer résolument à éliminer les écueils qui l’entravent, et à en corriger les dysfonctionnements au fur et à mesure qu’ils surgissent, tout en engageant les réformes profondes et audacieuses, dictées par les évolutions et les mutations qui s’opèrent.

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Le contexte national, régional et international exige que l’on garde à l’esprit les grands défis qui attendent la prochaine législature, au niveau institutionnel et en matière de développement. Ces défis doivent être relevés par toutes les forces vives de la Nation, et tous les acteurs politiques, chacun pour ce qui le concerne, notamment le parlement et le gouvernement. Pour ce qui est des défis institutionnels, il s’agit essentiellement de parachever la mise en œuvre de la Constitution, en adoptant les lois organiques qui lui sont complémentaires, d’autant qu’il s’agit d’un véritable test pour apprécier l’envergure des horizons démocratiques prometteurs qu’ouvre ladite Constitution.

C’est dire que la nouvelle législature sera, par excellence, une législature fondatrice et constituante. Ces défis concernent également la mise à niveau endogène des partis politiques, sans lesquels il ne saurait y avoir de démocratie authentique. Car il s’agit, en effet, de favoriser l’émergence d’un paysage politique rationalisé et efficace.

Parallèlement, la concrétisation effective de la constitutionnalisation de la participation citoyenne passe par le renforcement de l’implication des nouveaux acteurs, notamment les citoyens, la société civile, les syndicats et les forces productives, ainsi que les médias, comme partenaire constructif dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques, des projets de développement et des propositions législatives.

La réforme et la rénovation des structures de l’Etat demeurent l’enjeu institutionnel majeur dont dépendent le progrès et la modernisation de notre pays.

A cet égard, la consécration de la régionalisation avancée constitue l’un des chantiers stratégiques du Maroc d’aujourd’hui et de demain. Cela tient non seulement à son rapport avec la mise en place de la chambre des conseillers, mais surtout aux opportunités que cette régionalisation, conjuguée avec la déconcentration administrative, offre en termes de bonne gouvernance territoriale et de proximité par rapport au citoyen.

Elle ouvre également des possibilités et des perspectives prometteuses, à même d’assurer un développement humain et socio-économique équilibré, solidaire et durable. Dans le même ordre d’idées, la consolidation d’une justice indépendante passe par la mise en place du Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire et de la Cour constitutionnelle. Elle requiert aussi la poursuite de la réforme profonde et globale de la justice. Car il s’agit de consacrer la prééminence de la Constitution, d’affirmer la suprématie de la loi et l’égalité de tous devant elle, et d’assurer la sécurité judiciaire.

De même, la démocratisation de l’Etat et de la société, et l’amélioration du climat des affaires passent par l’adoption des règles de bonne gouvernance. Elles nécessitent ainsi la mise en œuvre des principes et des mécanismes prévus par la Constitution, avec, au premier chef, la corrélation entre la responsabilité et la reddition des comptes, la moralisation de la vie publique, la lutte contre toutes les formes de prévarication et de corruption, et contre le monopole et la rente économique et politique, ceci, outre la nécessité d’œuvrer pour assurer l’égalité des chances et garantir la liberté d’entreprendre et la libre concurrence. S’agissant des défis en matière de développement, le vrai test pour juger de l’efficacité de l’action des institutions en direction des couches populaires réside dans leur capacité à opérer un véritable bond qualitatif en matière d’amélioration des indicateurs de développement humain.

La concrétisation d’un tel objectif requiert notamment des réformes et des réalisations audacieuses et tangibles, axées principalement sur l’incitation à l’investissement productif générateur d’emplois, le logement décent, la généralisation de la couverture médicale et la préservation de l’environnement. Elle passe également par un enseignement utile, moyennant une réforme profonde du système d’éducation et de formation, et une franche adhésion à l’économie du savoir et de l’innovation, clé de voûte du progrès pour le Maroc. La consolidation de la justice sociale et territoriale, que Nous appelons de nos vœux, passe inévitablement par le renforcement des politiques sociales de lutte contre la pauvreté, l’exclusion et la marginalisation, et par l’élargissement de la base de la classe moyenne et la promotion de l’égalité entre l’homme et la femme. Elle requiert également d’accorder une attention particulière au monde rural et aux régions montagneuses reculées et enclavées, et d’élaborer une charte sociale avancée.

Face à des besoins sociaux aussi pressants et en constante croissance, et compte tenu des contraintes liées à la disponibilité des ressources financières, il est impératif d’intensifier les efforts pour hisser l’économie nationale à un palier supérieur de modernisation, d’ouverture, de compétitivité et de croissance forte et durable. Voilà un pari majeur en matière de développement qu’il est indispensable de gagner si l’on veut que le Maroc accède au rang des nations avancées.
C’est dire l’importance d’une gouvernance cohérente en matière de développement pour assurer la mise en œuvre optimale des plans sectoriels et la poursuite des chantiers structurants. Pour ce faire, il faut non seulement préserver les grands équilibres macro-économiques et financiers, devenus une règle constitutionnelle, mais aussi conforter les équilibres sociaux, qui constituent l’essence même du progrès, de la stabilité et de la cohésion de la société.

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

En évoquant certains défis majeurs en matière de politique et de développement, Notre propos n’est pas d’apporter des réponses toutes faites en vue de les relever. En revanche, la recherche de solutions efficientes en la matière est tributaire, en cette période électorale, de la volonté des partis nationaux sérieux d’assumer leur responsabilité politique en présentant des projets sociétaux clairs et différenciés. Ceux-ci doivent se décliner sous forme de programmes rigoureux, efficients et réalistes, lesquels doivent être en phase avec les attentes réelles des générations présentes et à venir, afin que le citoyen ait la latitude de choisir librement les élites qualifiées, aptes à répondre aux attentes exprimées.

La responsabilité de relever ces défis, en cette nouvelle ère constitutionnelle, incombera principalement au gouvernement et au parlement issus des prochaines législatives, au regard des compétences pleines et entières qui sont désormais les leurs, en matière législative et exécutive. Il appartiendra donc au gouvernement émanant de la majorité de la prochaine chambre des représentants d’élaborer et de mettre en œuvre un programme ambitieux, déclinant avec rigueur ses priorités, ses objectifs, ses moyens de financement et ses mécanismes d’exécution, d’évaluation et de redressement.

Pour sa part, l’opposition parlementaire est appelée à jouer de manière constructive le rôle qui est le sien en matière de contrôle et d’interpellation.

Relever ces défis et gagner bien d’autres paris majeurs pour le Maroc d’aujourd’hui et de demain, voilà une entreprise qui requiert la conjugaison des efforts de toutes les institutions et les forces vives de la Nation.

En effet, le Royaume aura constamment besoin des énergies de l’ensemble de ses fils, qu’ils soient à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, et de leur apport constructif à l’effort de consolidation du Maroc de l’unité, de la démocratie, de la dignité, du progrès et de la solidarité.

Que chacun mette donc la main à l’ouvrage et qu’une saine émulation s’engage.

« Seigneur, accorde-nous Ta miséricorde, et assure-nous la droiture dans notre conduite ». Véridique est la parole de Dieu.

Wassalamou alaikoum warahmatoullahi wabarakatouh."

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