Le Maroc entre solidarité pro-irakienne et alliance américaine

5 avril 2003 - 11h23 - Monde - Ecrit par :

La poursuite de la guerre en Irak a rendu de plus en plus délicate la position du Maroc dont les autorités, tout en préservant une alliance privilégiée avec les Etats-Unis, veulent donner des gages à l’opinion publique, exaspérée par les souffrances infligées au "peuple frère" irakien.

La "rue" marocaine, qui s’est exprimée au cours d’imposantes manifestations dans les grandes villes du royaume, condamne sans réserve "l’agression américano-britannique" qu’elle estime dirigée contre le "peuple irakien" qu’elle relie au conflit israélo-palestinien.

De nombreux slogans y ont été régulièrement scandés contre l’attitude jugée timorée ou "complice" de l’ensemble des "régimes arabes" - la critique incluant implicitement le Maroc lui-même.

Depuis le déclenchement de la guerre, les journaux marocains ont eux aussi dénoncé jour après jour, photos saisissantes à l’appui, les destructions et les "massacres de civils" perpétrés par les troupes coalisées.

Dans ce climat, le roi Mohammed VI et les autorités du pays ont manifesté leur rejet de la guerre tout en s’efforçant de ne pas remettre en cause une alliance traditionnelle avec Washington, malgré la pression de l’opinion.

Diverses initiatives officielles de soutien aux Irakiens ont été prises, notamment l’ouverture d’un compte à la Banque du Maroc pour recueillir les dons en faveur de l’Irak et l’envoi vers Bagdad d’une aide humanitaire d’urgence composée de médicaments et de produits alimentaires.

Mais dans le même temps tout a été fait pour éviter les "débordements" de la rue. Le roi a lui-même appelé les Marocains à "faire preuve de pondération, de sagesse et de discipline". "L’ordre public" sera assuré "quelles que soient les conditions", a-t-il prévenu, donnant des instructions pour que soit "garantie la sécurité des personnes et des biens".

Et les relations avec les Etats-Unis n’ont pas été altérées. Des négociations en vue d’un accord de libre échange entre les deux pays, engagées en janvier à Washington, ont pu reprendre fin février, en pleine crise - mais à Genève au lieu de Rabat où elles avaient été initialement programmées.

Le principal "collectif" d’organisations marocaines de soutien à l’Irak a paru se radicaliser face à cet équilibrisme officiel. Il a appelé jeudi le gouvernement à expulser du Maroc les ambassadeurs des Etats-Unis et de la Grande Bretagne, enjoignant le royaume à prendre une "position claire" vis-à-vis des pays "agresseurs" de l’Irak.

Le Maroc avait exprimé, au début de la guerre, sa "grande déception" devant "le choix du recours à la force" pour résoudre la crise irakienne. Le roi Mohammed VI s’était par la suite associé à la "grande inquiétude" des Marocains.

Face à cette guerre menée contre un "pays musulman frère", la monarchie a dû aussi prendre en compte la récente poussée de l’islamisme politique, marquée par l’arrivée en force au parlement, en septembre dernier, du Parti justice et développement (PJD) où il constitue désormais la principale force d’opposition.

AFP

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : États-Unis - Irak - Accord de libre échange - Guerre

Ces articles devraient vous intéresser :