Attentats Casablanca : L’Emir aux yeux bleus, renonce à la guerre sainte

30 mars 2007 - 11h07 - Maroc - Ecrit par : L.A

Il a taillé sa barbe et ne porte plus les vêtements traditionnels islamistes. Pierre Robert, 35 ans, alias Yacoub, surnommé l’Emir aux yeux bleus, a perdu la foi. Ce Français converti à l’islam, qui purge une peine de réclusion criminelle à perpétuité au Maroc, avait été interpellé en juin 2003 dans le cadre des enquêtes menées après les attentats de Casablanca.

La justice marocaine l’avait condamné en septembre 2003 pour avoir dirigé une cellule terroriste, qui avait pour projet d’attaquer des sites sensibles au Maroc : bureaux des services secrets, barrages de la gendarmerie, centre commercial, convois de fonds…

« Il veut témoigner de son erreur »

Après quatre ans de prison, le jihadiste repenti a fait une vertigineuse introspection personnelle. Il est désormais convaincu d’avoir choisi la mauvaise voie. Depuis sa cellule, Pierre Robert a sollicité un rendez-vous avec un prêtre afin de renouer avec ses racines culturelles et religieuses. Dans la foulée, il a demandé officiellement son rapatriement en France. Un retour qui devrait s’accompagner d’une démarche exceptionnelle : « Il veut témoigner de son erreur, révèle son avocat français, Me Vincent Courcelle-Labrousse. Il veut éviter à d’autres jeunes de répéter le même faux pas. »

Lors de son procès, Pierre Robert avait nié toute implication dans un réseau terroriste, affirmant que ses aveux avaient été obtenus sous la torture.

Une initiative rarissime

La demande de transfert dans une prison française du détenu est d’ores et déjà sur le bureau du ministre de la Justice marocain. Rien ne s’oppose — sur le principe — à ce qu’un ressortissant français effectue sa détention en France pour une peine infligée à l’étranger. Ces dossiers sont traités au cas par cas et négociés d’Etat à Etat. En l’occurrence, une convention de transfèrement a été signée entre la France et le Maroc : « Cela donne un cadre général et pourrait faciliter l’opération », souligne une source judiciaire. La peine de « prison à vie » de Pierre Robert pourrait être alors convertie en une peine négociée entre la France et le Maroc. Dans le cadre de cette demande de transfert, l’islamiste repenti a renoncé à son pourvoi devant la Cour suprême marocaine, ce qui rend sa condamnation définitive et ouvre la voie à un retour en France. Son conseil envisage également de faire une demande de « grâce royale » afin d’obtenir une révision de sa peine.

Pierre Robert a désormais choisi de se fondre dans l’anonymat. Il vit seul dans sa cellule de la prison de Salé. Il envisage de passer son bac et reçoit la visite une fois par mois de sa femme. Ses deux enfants sont scolarisés à l’école française de Tanger. Il travaillait dans une usine de tissage de la région de Saint-Etienne lorsqu’il a rencontré deux Turcs, qui l’ont convaincu de se convertir à l’islam. En 1994, il a effectué un voyage en Turquie, où il s’est initié à la doctrine salafiste, la version la plus radicale de l’islam. Il s’est ensuite formé au jihad dans les camps militaires de l’Afghanistan. En 1999, il est retourné au Maroc, où il aurait rejoint les rangs de la Salafia Jihadiya. Depuis, il a pris ses distances avec les « fous de Dieu ». Une initiative rarissime. En prison, les islamistes ont tendance à davantage se radicaliser.

Le Parisien - Christophe Dubois

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