Maghrébines, l’incessante quête d’émancipation

24 avril 2007 - 00h34 - Maroc - Ecrit par : L.A

Femmes Meilleur accès des filles à l’éducation, arrivée massive sur le marché du travail, recul de l’âge du mariage, régression de la polygamie, baisse du taux de fécondité, plus grande diffusion des moyens de contraception... Des avancées importantes qui ont changé la vie des Maghrébines. Du Maroc à la Tunisie, en passant par l’Algérie, cette amélioration s’est souvent accompagnée d’une évolution de leur statut juridique. Mais il reste beaucoup à faire, notamment pour faire évoluer les mentalités..

Dans le royaume chérifien, la Marocaine est, du moins dans les textes, de plus en plus l’égale de l’homme depuis l’entrée en vigueur d’un nouveau Code de la famille en février 2004. La nouvelle moudawana n’interdit certes pas la polygamie, mais exige du mari souhaitant prendre une seconde épouse (ou plus) de fournir “un argument objectif exceptionnel” et d’obtenir l’autorisation préalable d’un juge. Idem pour la répudiation qui n’est pas abolie, mais qui est restreinte au profit du divorce judiciaire. Plus récemment, -depuis janvier dernier, la Marocaine peut s’enorgueillir d’un nouveau droit : celui de transmettre sa nationalité à ses enfants quand son époux n’est pas marocain.

En Algérie, la “réformette” mise en œuvre en 2005 n’est certes pas satisfaisante. Les militantes qualifient ces novations de “brèches à l’intérieur du carcan du modèle patriarcal”. Mentionnons tout de même ces innovations : suppression du devoir d’o-béissance de l’épouse, transmission par la mère de sa nationalité à son enfant et de l’épouse à son conjoint, invalidation du mariage forcé par l’obligation du consentement des deux parties. Si l’émancipation des femmes algériennes se heurte à l’opposition des islamistes, celles-ci doivent aussi vaincre les réticences “du pouvoir dont les vues sur la question convergent”, estime la militante Feriel Lalami. Néanmoins, gardons l’espoir que le dynamisme et la mobilisation des Algériennes puissent induire un réel changement. Et l’exemple du Maroc, qui a d’abord connu plusieurs tentatives d’amendements avortées – suivies d’une pseudo réforme concoctée en 1993 par une commission royale exclusivement masculine –, est là pour rappeler que le chemin vers l’émancipation est souvent semé d’embûches. Sauf à avoir à la tête de l’Etat un dirigeant de la trempe de Bourguiba et à être dans les années cinquante...

Epoque bénie qui visiblement était bien plus propice aux réformes audacieuses que la nôtre, à en croire les dispositions du Code du statut personnel édicté en Tunisie en 1956 et qui, aujourd’hui encore, et malgré le récent lifting qu’a subi la moudawana marocaine, reste le plus enviable de tout le monde arabe. Mieux encore, les Tunisiennes bénéficient depuis de nombreuses années de droits, celui d’avorter par exemple, dont certaines de leurs homologues européennes ne jouissent toujours pas. Bien que révolutionnaire pour son temps, le Code de la famille tunisien n’en est pas parfait pour autant. Au-jourd’hui, la principale revendication des associations tunisiennes porte sur une “égalité sans restriction”, notamment en matière d’héritage.

Même si l’arsenal juridique est de plus en plus favorable aux femmes, les militantes restent vigilantes : l’existence des lois ne garantit pas toujours leur application car les mentalités, les traditions, les procédures administratives bien ancrées ne s’amendent pas du jour au lendemain. Les réformes, récentes ou pas, restent donc à consolider.

Les entretiens réalisés auprès de trois femmes maghrébines, la sociologue marocaine Soumaya Naâmane Guessous, la politologue algérienne Feriel Lalami et la journaliste et porte-parole du Conseil national pour les libertés en Tunisie Sihem Bensedrine, révèlent que si les Maghrébines ont des revendications spécifiques, elles se heurtent aussi à des problématiques communes à la gent féminine du monde entier : la violence conjugale, le harcèlement sexuel et un épais plafond de verre quand il s’agit d’accéder à des postes de décision.

Maroc

Soumaya Naâmane Guessous : sociologue et professeure d’université
“Le quota est incontournable dans une société où nous n’accordons pas encore assez d’importance à la présence des femmes.”

Quelles sont les revendications actuelles des femmes ?

Je voudrais d’abord parler des préoccupations avant de passer aux revendications. Elles concernent l’application effective des récentes réformes du statut personnel. Nous sommes confrontées à de grands problèmes de procédure et de non-reconnaissance, parfois même au niveau des jugements de l’esprit de la réforme de la moudawana. Le nouveau code existe, mais il n’est pas encore appliqué totalement parce que sa mise en œuvre se heurte à des rigidités. Or, il ne suffit pas de légiférer pour changer les mentalités.

De plus, certaines procédures ne sont pas encore mises à jour ou unifiées au niveau de l’ensemble du royaume. Le divorce, le partage des biens, la reconnaissance de la paternité posent encore problème. La société civile reste aussi mobilisée pour lutter contre la violence à l’égard de la femme, la discrimination dans le milieu du travail, mais aussi le travail des petites filles. Ceci étant, à la veille des élections, émergent des revendications visant à encourager et promouvoir une meilleure représentation des femmes dans les postes de pouvoir. Nous sommes à moins de 1 % tant pour les assemblées communales que législatives. Actuellement, tous les efforts sont mobilisés sur ce chantier. Il s’agit de sensibiliser la population, mais de voir aussi ce que l’Etat peut faire pour favoriser la présence féminine.

Seriez-vous pour l’instauration de quotas ?

Le quota n’est pas démocratique, mais il est incontournable dans une société où nous n’accordons pas assez d’importance à la présence des femmes dans la vie publique.

Les perspectives vous semblent-elles plutôt favorables pour les femmes ?

Je suis optimiste malgré le contexte islamiste. Notre population est en train de s’instruire, de se former. Les femmes elles-mêmes sont très exigeantes : même lorsqu’elles méconnaissent les lois et leurs droits, elles s’opposent à l’oppression qu’elles subissent. Elles ne considèrent plus cela comme faisant partie de traditions sacrées. Plus elles sont jeunes, plus elles sont révoltées, plus elles ont envie d’obtenir leurs droits, y compris celles qui ont des idées islamistes. Même les filles voilées qui sont dans le fondamentalisme cherchent l’équité, l’égalité au niveau des droits ainsi que le partage des rôles dans les foyers. Une islamiste remet en question le machisme et l’attitude d’un mari qui va chercher à l’esclavagiser. Pour autant, je ne parlerais pas d’émergence d’un féminisme islamiste, mais plutôt d’une prise de conscience collective du rôle de la femme qui sait à présent qu’elle occupe une place prépondérante dans la société. Elle n’est plus cette femme qui va endurer en silence. Aujourd’hui, la Marocaine défend ses droits au quotidien sans forcément être liée à une structure associative ou à un parti politique.

Parallèlement, la société civile se consolide et s’unifie dans ces revendications. Et le fait de travailler dans le cadre de réseaux donne plus de poids. En outre, la population féminine prend conscience de ses droits et veut les exercer. Sans oublier que parmi les jeunes hommes aussi il y a une évolution, certes moins spectaculaire que celle des femmes. Personnellement, elle ne me satisfait pas telle qu’elle est à l’heure actuelle, mais, en tant que chercheure, je la trouve prometteuse pour l’avenir.

Algérie

Feriel Lalami : militante féministe, politologue et journaliste
“Nous voulons un statut autonome pour les femmes immigrées”

Quelles sont les revendications actuelles des Algériennes ?

Les revendications sont de plusieurs ordres. Sur le plan juridique, nous demandons l’abrogation du Code de la famille dont la timide révision en février 2005 a laissé entier le problème. Nous voulons la suppression du tuteur matrimonial (wali), mais aussi l’interdiction de la polygamie, un divorce plus équitable, la légalisation de l’adoption et enfin l’égalité devant l’héritage. Nos revendications sont également économiques, d’autant que de plus en plus de femmes assument seules ou avec leur conjoint l’entretien de leur famille. Malgré un niveau d’éducation de plus en plus élevé, elles subissent le chômage plus que les hommes. Leur accès à l’emploi stable est difficile et elles se tournent vers l’emploi informel qui leur offre peu de garanties.

D’autre part, nous nous battons contre les violences. L’affaire des femmes violées d’Hassi Messaoud en 2001 a porté au-devant de la scène les actions revendicatives des associations contre les violences faites aux femmes, notamment les agressions domestiques qui restent de l’ordre du tabou. Cela dit, de plus en plus d’enquêtes et de statistiques sont rendues publiques et montrent que la maltraitance subie par les femmes, notamment celle exercée par les proches, est fréquente. La nouveauté réside dans le constat et la dénonciation de ces violences. Reste à mettre en place un dispositif juridique de sanctions des agresseurs et de protection des victimes.

Quels sont vos moyens d’action pour concrétiser ces revendications ?

Nous travaillons en réseau (Apel, Asfad, ATF, Pluri-elles Algérie et Rajire) et notre activité essentielle est l’information. Nous organisons des débats autour de films ou d’invitées, des séminaires comme récemment sur l’histoire croisée des luttes de femmes maghrébines pour leurs droits. Par ailleurs, chaque association gère dans son domaine des dossiers liés à la situation de dépendance juridique des Algériennes. Pour vous donner un exemple récent, à Apel (Association pour l’égalité devant la loi), nous avons suivi le cas d’une femme résidant régulièrement en France et que son mari a emmenée en Algérie, où il l’a privée de son passeport et de son titre de séjour pour l’empêcher de revenir en France. Il lançait en même temps une procédure de divorce expéditif en Algérie. Il a fallu plus d’un mois et demi de démarches, d’appels et de courriers pour que le consulat de France, qui exigeait d’elle le titre de séjour de son mari, lui délivre finalement un document administratif lui permettant le retour. Voilà un autre axe de nos revendications : nous voulons un statut autonome pour les femmes immigrées et non pas dépendant de celui de leur conjoint.

En regard du contexte actuel, peut-on espérer mieux que la “réformette” de février 2005 ?

Cette réforme en “trompe l’œil” est bien sûr loin de satisfaire les aspirations des Algériennes à l’égalité et à plus de liberté. Elle est aussi en deçà de la réalité sociale en Algérie où les femmes essaient d’élargir leur champ d’intervention publique, de gagner plus d’autonomie grâce à des études plus poussées, à une augmentation du taux d’activité qui peut leur donner des moyens propres de subsistance et à une fécondité maîtrisée. Mais ce que l’on constate, c’est que les gouvernants ne suivent pas ce mouvement de fond de la société. Je ne suis pourtant pas vraiment pessimiste parce que les Algériennes font preuve d’une vraie vitalité, mais je pense que toutes les conditions sont réunies pour avancer... à l’exception des conditions politiques.

Paroles de femmes

“Les femmes ont besoin d’une situation financière stable, ce qui implique que l’Etat leur garantisse l’accès à l’éducation, à une formation professionnelle et à une infrastructure adéquate afin d’alléger le travail domestique qui bouffe une partie importante de leur journée.” Zineb, 60 ans, sociologue

Tunisie

Sihem Bensedrine : journaliste, porte-parole du Conseil national pour les libertés en Tunisie
“La revendication principale reste le droit à l’exercice d’une citoyenneté pleine et entière.”

La Tunisienne passe pour la mieux lotie de ses consœurs maghrébines vu ses droits et son statut…

C’est une évidence. Le Code du statut personnel (CSP) est le premier code édicté par la Tunisie indépendante en 1956, avant même la promulgation de la Constitution. Il établit le principe d’égalité entre l’homme et la femme en en faisant deux citoyens égaux devant la loi. Ce code a fixé l’âge minimum pour le mariage et institué le principe du consentement au mariage pour les deux époux comme principe de sa validité, interdisant ainsi toute forme de tutelle sur la jeune fille qui prévalait auparavant.

La grande nouveauté de ce texte a été l’interdiction de la polygamie et de la répudiation, et l’abolition de la contrainte matrimoniale. Ce code légalise également l’adoption, fait exceptionnel dans le monde musulman...

D’autres avancées significatives ont accompagné cette volonté égalitaire. Dès 1956, les femmes acquièrent le droit de vote. En 1973, l’avortement est dépénalisé pour toutes les Tunisiennes et le droit des femmes au travail est institué. De même, les parents se voient obligés de scolariser leurs filles. Le CSP a cependant conservé certains aspects inégalitaires dont il a été expurgé au fil du temps sans jamais les éliminer totalement. En 1993, l’obligation d’obéissance au mari est abrogée. Depuis 1998, la femme a le droit de transmettre à ses enfants son patronyme même si elle est mariée à un étranger et sous réserve du consentement du père. La tutelle parentale est instituée, ainsi que la gestion parentale des affaires de la famille.

Quelles sont aujourd’hui les principales revendications des femmes tunisiennes ?

L’ATFD (Association tunisienne des femmes démocrates), dont je suis membre, appelle à la levée des réserves formulées par la Tunisie à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Elle lutte pour l’application sans réserve de cette convention, notamment les dispositions relatives au droit de succession qui restent inégalitaires. Cette revendication est portée par la majeure partie du mouvement des droits de l’homme. Mais notre revendication principale reste le droit à l’exercice d’une citoyenneté pleine et entière pour la femme. Cette dernière est, au même titre que l’homme, privée de sa citoyenneté. La question des droits des femmes a constitué pour le régime actuel une sorte de faire-valoir démocratique. Le pouvoir a développé un féminisme d’Etat qui tend à devenir un monopole, déniant aux composantes de la société civile indépendante le droit à promouvoir la non-discrimination à l’égard des femmes, en confisquant les libertés d’expression et de réunion notamment.

Quels sont les freins et obstacles empêchant ces revendications d’aboutir ?

Essentiellement l’absence de libertés qui se conjugue avec une régression des mentalités favorisée par le manque de débats qui fait la place grande à l’influence des courants rétrogrades qui se développent dans un climat répressif.

Paroles de femmes

“Je ne voudrais rien changer à notre nature de femme et je suis en particulier très fière des maternités que j’ai portées et de la rencontre
avec ces petits êtres qui ne constituent nullement un ‘obstacle à la vocation humaine’ comme l’aurait dit Simone de Beauvoir, mais bien l’essence de notre vocation humaine. Mais si je voulais que quelque chose change, c’est bien l’implication des femmes dans… la constitution de deux groupes distincts lors de nos réunions mondaines où les hommes refont les matchs de foot et le monde, et les femmes parlent chiffons.

Ça m’exaspère. J’abandonne aux hommes les matchs de foot, mais quand il s’agit de refaire le monde, je voudrais que les femmes participent, qu’elles expriment leur point de vue, qu’elles prennent position. Pour y arriver, il ne faut pas que la femme ait passé sa journée
au supermarché et dans sa cuisine, mais à la direction de son usine et de réunions syndicales ou politiques. La question de la Femme ne doit plus être un combat de femmes, mais un combat de société pour faire évoluer notre communauté.” Saloua, 43 ans, chef d’entreprise

L’IVG, un sujet tabou au Maghreb

L’interruption volontaire de grossesse ne figure aucunement sur la liste des revendications des féministes du Maghreb. Et une fois de plus, la Tunisie fait figure d’exception. L’avortement y a été légalisé en 1963 pour les mères ayant plus de cinq enfants. Et depuis 1973 (deux ans avant les Françaises), toutes les Tunisiennes, à condition d’être majeures, peuvent avorter. L’intervention est gratuite et ne nécessite pas d’autorisation du mari... Autrement dit, les célibataires aussi peuvent mettre un terme à une grossesse non désirée.

En Algérie et au Maroc, seul l’avortement thérapeutique est permis, mais lorsque la vie de la mère est en danger et certainement pas en cas de malformation (même importante) du fœtus. Soumaya Naâmane Guessous, co-auteur avec Chakib Guessou de Grossesses de la honte (Editions Le Fennec), revendique pour sa part la “légalisation de l’avortement en cas de viol ou d’inceste”.

L’interdiction d’avorter ne signifie pas que la pratique n’est guère de mise. Faute de statistiques, on ignore combien de femmes mettent clandestinement un terme à leur grossesse dans des conditions de sécurité et d’hygiène pas toujours irréprochables. Et l’on sait encore moins combien d’entre elles meurent ou gardent à vie des séquelles suite à ses interventions. Quant au nombre de nouveaux-nés abandonnés à la naissance ou retrouvés étouffés dans des poubelles, il y a hélas fort à parier qu’ils continueront à alimenter la rubrique des faits divers tant que l’avortement ne sera pas gratuit et accessible à toutes.

Sihame, Chargée de mission auprès de Michèle Alliot-Marie, membre de la Commission de travail sur les banlieues créée par Dominique de Villepin, collaboratrice de Ségolène Royal... chargée de l’orientation et de la formation dans l’équipe de Ségolène Royal. Elle est chef d’entreprise, femme politique... Portrait d’une femme libre.

Difficile de croire que cette jeune fille bouillonnante n’a que 24 ans, tant son assurance affichée, son réseau de contacts sans limites et son aisance dans tous types de cénacles surprennent. Il est vrai que cette Franco-Marocaine se laisse difficilement impressionner. Quel que soit l’interlocuteur. Elle est aujourd’hui manager général de sa propre entreprise, Apim Consulting, une structure basée à Bruxelles, à proximité de la Commission européenne, pour faire du lobbying (elle déteste ce terme...) pour le compte de ses clients ou des gouvernements qui font appel à elle pour répondre à un besoin ponctuel ou pour tenter d’agir sur la durée, en fonction du pays qui occupe la tête de l’exécutif européen. Conséquence : elle vit entre Paris et Bruxelles, quand elle n’est pas dans un avion en partance pour le Maroc pour faire avancer un projet sur l’autre thème qui lui tient à cœur, la diversité. Après avoir décroché son bac à 16 ans, Sihame entre à Sciences Po Paris. Elle en sortira avec un master en Sciences politiques (option Relations internationales) pour entrer de plain-pied dans le travail politique de haut niveau. Elle a ainsi été tour à tour membre du staff de campagne de la députée Elisabeth Guigou, membre de la Commission de travail sur les banlieues créée par le Premier ministre Dominique de Villepin après les émeutes de novembre 2005, chargée de mission auprès de la ministre de la Défense, Michelle Alliot-Marie, et, enfin, collaboratrice de Ségolène Royal dans le cadre de la campagne menée sur le thème de l’orientation et la formation. Pas assez de boulot manifestement pour cette jolie brunette qui semble increvable. En 2003, après les attentats de Casablanca, elle décide en urgence de monter une opération pour redorer le blason du royaume (ne lui dites surtout jamais de mal de son Maroc !) : ce sera à Marrakech, excusez du peu, le fameux Forum international Choc des civilisations et dialogue des cultures. Elle fait partie aujourd’hui du Club de Rome (Bruxelles) et est membre du comité directeur de l’Alliance mondiale des Marocains du monde, tout en menant des opérations ponctuelles pour le compte du ministère marocain du Tourisme (Kounouz Biladi) ou pour celui du ministère chargé de la Communauté marocaine à l’étranger. Son nouveau défi : créer à Paris sa propre structure de réflexion. Un think-tank où figurent des personnalités de la communauté franco-marocaine de l’Hexagone dont, entre autres, Fatéma Hal et Abdellatif Benazzi, et dont vous avez déjà entendu parler dans le numéro 1 du Courrier de l’Atlas. A moins qu’elle ne dégaine encore une autre initiative. Sacrée Sihame dont le prénom (flèche en arabe !) suffit à la décrire...

L’héritage : des pratiques en avance sur le droit

Pour Soumaya Naâmane Guessous, espérer l’égalité homme-femme en matière d’héritage est “de l’ordre de l’utopique en ce moment du fait de l’influence islamiste. Il est même impossible de mettre cette question sur le tapis. Cette mesure ne fait pas partie des revendications car, à chaque fois qu’on a osé l’aborder, les réactions ont été très négatives”.

De plus, on croit à tort que cette revendication ne concerne que l’élite. “Et c’est faux, s’insurge Soumaya Naâmane Guessous. Les plus démunies pâtissent probablement davantage de cette inégalité. Prenons le cas d’un couple qui n’a que des filles. Si le mari décède, les oncles deviennent héritiers. Parfois, le père ne lègue qu’une chambre ou une humble maison que les enfants et la veuve vont être obligés de quitter pour se retrouver à la rue afin que les héritiers la vendent et obtiennent chacun leur part. Néanmoins, cette question semble aujourd’hui secondaire et ne fait pas partie des priorités.”

Ceci étant, “dans les faits, on remarque un contournement de la loi, beaucoup de parents procédant de leur vivant à des ventes ou des donations pour mettre leurs enfants de sexes différents sur un pied d’égalité. Nous sommes dans des situations où la réalité est en avance par rapport au droit”, souligne Khadija Finan, chargée de recherche à l’Ifri (Institut français de recherche internationale), qui elle non plus n’est guère optimiste quant à une évolution sur ce point précis. “Compte tenu de la structuration de l’islamisme et de l’islamisation des sociétés, il ne faut pas s’attendre à des avancées dans ce sens”, prévient-elle. Pour autant, à l’AFTD (Association tunisienne des femmes démocrates), on ne se résout pas au silence. En 1999, l’association a lancé une pétition réclamant l’égalité dans l’héritage entre les sexes. Elle n’avait alors recueilli que 1000 signatures, essentiellement féminines. Le 13 août dernier, jour du 50e anniversaire du Code du statut personnel tunisien, a commencé à circuler une brochure sous forme de plaidoyer. L’objectif : “Venir à bout de ce bastion de la domination patriarcale qu’est l’inégalité des droits en matière d’héritage.

Le Courrier de l’Atlas - Hassan Ziady & Yasmine Ouazzani

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Sujets associés : Moudawana (Code de la famille) - Mariage forcé

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