« Comment sortir du monde ? » C’est le titre du tout premier roman du Franco-marocain Marouane Bakhti, paru aux Nouvelles Éditions du réveil en mars 2023. Il y raconte la vie, telle qu’elle vient, dans une famille biculturelle. Un récit éblouissant.
Née à Benslimane en 1957, Najat Azmy a quitté le Maroc à l’âge de 10 ans, avec sa famille, pour rejoindre la France, au terme d’un long voyage en train puis en bateau. De ses premiers pas à l’école primaire « Notre-Dame de Lourdes » à Casablanca jusqu’à l’octroi d’une investiture par le Parti socialiste (PS) dans le cadre des élections législatives en 2007, près d’un demi-siècle s’est écoulé durant lequel la « beurette » s’est investie au service de la chose publique.
Très attachée au Maroc où sa maman coule des jours heureux, Najat Azmy s’apprête à écrire une nouvelle page de son histoire...
L’Economiste : Quel souvenir gardez-vous de votre départ du Maroc et votre arrivée en France ?
• Najat Azmy : Mon enfance dans l’Hexagone, c’est tout d’abord un premier choc ! Quitter Casablanca en hiver et se retrouver à Lille en pleine période hivernale n’est pas du gâteau. Voilà pour le volet climatique. Puis, j’ai fait les frais d’être... différente, une situation nouvelle pour moi. Lors de mes premières années au Maroc, à l’école primaire, mon quotidien était fort agréable. Je partageai avec mes camarades espagnols, juifs, marocains, des jeux, des fous rires, les deuxièmes petits déjeuners chez les copains avant d’aller en classe...
A cet âge-là, on ne comprend pas vraiment ce qui vous arrive, pourquoi vous êtes là et pourquoi votre mère est triste. Alors je cachais ma tristesse.
Doit-on déduire que les premières années ont été difficiles ?
• Après quelques années passées à Lille, mes parents ont décidé de vivre à Lomme, une petite commune. Très vite, j’ai été intégrée dans la vie sociale et sportive grâce à un conseiller municipal de la ville avec qui mon père avait sympathisé. Ainsi, nous l’avons vécu comme un nouveau départ. Cette situation m’a permis de me découvrir une passion, la gymnastique. Le fait que l’association sportive soit gérée par la municipalité a accéléré mon intégration. Plus tard, j’ai intégré l’équipe d’animation du centre de loisirs de la ville. Toutes ces étapes m’ont permis de me forger une âme de militante et de battante.
Pour militer contre quoi ? Et vous battre contre qui ?
• Où que vous résidiez dans le monde, la vie n’est pas toujours « rose ». Tous les citoyens de ce monde ont comme objectif de vie de caresser le bonheur. Pour ma part, la notion de bonheur passe par l’engagement au service de l’intérêt général. Si malheureusement on ne peut éradiquer la misère qui nous entoure, on se doit de participer à l’amélioration de notre environnement direct. Pendant mon adolescence, j’ai côtoyé des citoyens ordinaires, des enseignants, des militants... Ce sont eux qui m’ont donné l’envie de vivre la politique et non de vivre de la politique.
Etre candidate féminine en politique et avec la spécificité d’être issue de l’immigration n’est pas chose facile.
• Il est vrai que les candidates féminines ont plus de mal à émerger que leurs homologues masculins. Au Parti socialiste, un travail foncier avait été entrepris, il y a plusieurs législatures sous l’égide, entre autres, de Daniel Vaillant qui était entouré de nombreuses femmes. Quant à la particularité d’être issue de l’immigration, il s’agit de poursuivre l’engagement de nos mères, de nos sœurs, des femmes d’ici et d’ailleurs, qui ne peuvent s’exprimer.
Qu’avez-vous ressenti lors de votre désignation par la direction centrale du parti ?
• Cette désignation répond aux directives de la synthèse du Congrès du Mans où le parti avait pris des engagements sur la parité et la diversité. Je m’apprête donc à affronter le député sortant de droite, chantre du colonialisme. Le PS veut faire du combat dans cette circonscription un enjeu particulier, c’est pour cette raison que j’ai été choisie. C’est un challenge de taille qui répond à mon engagement politique.
Rachid Hallaouy - L’Economiste
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