Le Quai d’Orsay à Tanger

21 juin 2007 - 01h12 - France - Ecrit par : L.A

Le langage diplomatique est le plus simple qui soit, en même temps que le plus complexe. Il comporte l’exprimé et le non-dit qui suggère parfois une contradiction avec le premier. Un communiqué peut affirmer une chose et se prémunir en cas de réactions négatives. Ce qui ne veut pas dire que les diplomates parlent pour ne rien dire. Un communiqué est fait pour donner satisfaction à tous ses signataires permettant même à des participants d’affirmer s’être durement battus pour obtenir satisfaction sur un point ou un autre.

A l’examen, on se rend compte qu’aucun engagement précis n’a été pris. L’exemple emblématique, la notion 242 votée à l’ONU en 1967 et qu’on ne cherche pas à appliquer, pour la simple raison que le Conseil de sécurité ne s’est pas mis d’accord s’il faut tenir compte de la version en anglais ou de sa traduction française. Plus proche de nous, il y a eu le communiqué du G8 à l’issue de ses réunions en Allemagne. Le passage concernant l’émission des gaz à effet de serre est exemplaire. Il a été décidé de réduire l’émission de CO2 d’ici 2050, année où les participants seront dans un monde sans carbone. Une chose est certaine, c’est que dans quarante ans, aucune autorité scientifique ou économique, ne sera en mesure de définir l’allure qu’aura la nouvelle industrie et partant, l’économie mondiale qu’elle génèrera. Ce ne sont pas les prophéties de Jacques Attali qui serviront de base aux grands de ce monde, pour sortir de leurs tâtonnements. Au plan diplomatique, il semble que quelque chose de nouveau a vu le jour, quant à la communication. Quand un pays prend position sur un sujet d’intérêt mondial, comme la Palestine, on peut légitimement s’attendre à ce que l’information soit communiquée à l’opinion internationale. Il semble que non, désormais. Dès le début des évènements dramatiques, qui ont vu s’opposer Palestiniens et Libanais à Nahr Al Bared au nord du Liban, le ministre français des Affaires étrangères s’était rendu à Beyrouth pour exprimer le soutien français au gouvernement du Liban.

Etait-ce calculé ou non, dans le même temps, les autorités de Tel-Aviv ont arrêté une trentaine de personnalités palestiniennes, députés et ministres confondus. Avec une célébrité inaccoutumée, le quai d’Orsay publiait un communiqué dénonçant ces arrestations et demandant aux autorités de Tel-Aviv de libérer les personnalités palestiniennes. C’était la première fois depuis De Gaulle, qu’un gouvernement français prenait une position aussi nette et ferme dans le conflit palestinien.

Cependant, la nouveauté se trouvait aussi ailleurs. On avait pris connaissance du communiqué sur les ondes d’une radio périphérique à capitaux maroco-français. C’était un matin, le ministre français était encore à Beyrouth. On avait cherché confirmation sur les ondes françaises. Aucun écho. On avait conclu à une possible hallucination. Qui sait, avec cet été précoce. Mais le lendemain matin, le même communiqué était diffusé sur les ondes de la même radio méditerranéenne, préfigurant peut-être ce que sera la future union. Dans la même journée, on a enregistré la même discrétion ailleurs. Il a fallu se rendre à l’évidence. Chaque matin la même hallucination à heure fixe, cela devient de l’Alphonse Allais. Le rôle du journaliste étant d’investiguer et celui du chroniqueur de commenter des faits, on s’est tout de même assuré auprès de relations que les faits étaient avérés.
Il semble donc, que la position française, était destinée uniquement à l’opinion maghrébine, malgré les progrès immenses de la technologie qui font qu’on ne peut même pas garder un soupir pour un public déterminé.

Bien qu’inefficace, le procédé est original. Diffuser une information concernant la prise de position d’un Etat, tout en limitant l’aire d’impact, cela amène à supputer. Est-ce que la prise de position officielle du Quai d’Orsay a été désavouée par la présidence ou par le ministre lui-même.

La frontière entre l’information et la communication, la propagande et l’intoxication est ténue. Ce qui conduit parfois à l’autocensure qui est pire que la censure. Pratiquer l’autocensure c’est s’interdire de penser ou seulement de réfléchir. Dans ce cas, on peut s’interroger sur le rôle de l’individu dans la société.

Gazette du Maroc - Mohamed Afifi

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