« Il y a eu des dizaines de personnes qui ont reçu une séquence vidéo de prise à mon insu dans ma maison grâce à un appareil d’enregistrement audiovidéo très sophistiqué dont les caméras étaient insérées dans les appareils de climatisation dans chacune des deux pièces de l’appartement. Ça s’est passé après que j’ai eu de très nombreuses menaces m’intimant de me retirer du débat public sur l’autoritarisme et la corruption, et en particulier quelques sorties sur l’État policier suite à des violations graves de droits humains dans mon pays », a-t-il déclaré sur RFI.
L’invité de Pierre Firtion confie avoir entre-temps décidé d’adopter un profil bas sans se retirer de manière intégrale de l’espace public. « Je n’intervenais que très rarement et de manière très soft. Mais la répression a pris de plus en plus un tournant outrancier au Maroc », a-t-il affirmé, expliquant les raisons qui l’ont poussé à véritablement briser l’omerta. « Il est arrivé un moment où un ami pour lequel j’ai énormément d’appréciation et de respect, Maâti Monjib, historien de réputation internationale a été poursuivi sur une nouvelle affaire de blanchiment d’argent. J’avais de nouveau pris position en disant que cette poursuite était outrancière. À compter de là, on est revenus encore une fois à la diffamation des médias proches des services », raconte Fouad Abdelmoumni. Dès lors, il s’est refusé à accepter « d’être l’otage d’un système de répression vile, surtout un système qui anéantit, annihile l’intelligence des Marocains et des Marocaines ».
Le militant de Transparency Maroc dénonce des comportements mafieux. « Aujourd’hui, ce que nous avons ce sont des comportements mafieux, des comportements hors la loi, l’introduction dans l’intimité des gens, un comportement qui ne donne pas absolument lieu à une reddition de comptes dans une impunité totale », affirme-t-il. S’il admet qu’il ne peut apporter aucune preuve factuelle évidente que n’importe quel juge accepterait, il se dit persuadé que n’importe quelle justice indépendante, propre, honnête et efficace devrait rendre compte de la responsabilité première de l’État marocain dans cette situation. À l’en croire, 15 personnes « dérangeantes pour l’autoritarisme monarchique » sont victimes de cette campagne de diffamation.
« Aujourd’hui, il n’existe plus d’espace pour une presse indépendante, pour des partis politiques autonomes, pour un débat public sain, serein pouvant aller au fond des choses. Nous sommes de plus en plus dans une situation de dictature autoritaire et violente. […] Nous dénonçons un resserrement drastique des comportements répressifs illégitimes de l’État marocain. Ça s’est très fortement accéléré depuis 2014. Nous ne sommes toujours pas sortis de l’auberge », déplore Fouad Abdelmoumni.