Quelque 1,3 million de touristes ont visité le Maroc en avril 2024, ce qui représente une hausse record de 17 % par rapport à la même période de 2023.
La Thaïlande est en passe de devenir la première destination touristique pour les Marocains se rendant en Asie.
out d’abord l’avion. Plus de 14 heures de vol entre Casa et Bangkok avec une escale à Doha, au Qatar. C’est vrai que c’est beaucoup, mais lorsqu’on a vu la Thaïlande, on se dit que cela vaut les 14 heures. Surtout qu’à bord de la Qatar Airways, que ce soit en business class ou en éco, le personnel est aux petits soins .
L’escale à Doha dure à peu près deux heures. Suffisamment de temps pour faire le tour de l’aérogare, y acheter des produits détaxés et fumer quelques cigarettes pour rattraper sept heures d’abstinence et faire le plein de nicotine pour les sept heures de vol qui restent. Chose étrange, le fumoir de Doha. Dans d’autres pays, on trouve des cafétérias pour fumeurs ou alors des espaces aménagés à l’écart. A Doha, comme à Bangkok d’ailleurs, c’est une espèce de cage. De l’extérieur, on voit une espèce de brouillard et des silhouettes qui tirent comme des forcenés sur la clope. On dirait un aquarium devant lequel les passagers, curieux, s’arrêtent pour deux ou trois secondes d’admiration ; certains, poussant l’insulte jusqu’à sortir leur Kodak jetable et prendre une photo-souvenir. Une petite humiliation que nous, fumeurs inconditionnels, allions subir à l’aller comme au retour.
La cité des anges
Bangkok. Les Thaïlandais ne l’appellent plus ainsi depuis des décennies et lui ont trouvé le nom de Krungtep qui veut dire « Cité des Anges ». Nous arrivons à la tombée de la nuit. L’aéroport est immense. 25 millions de passagers y transitent chaque année dont 12 millions de touristes. Le site est climatisé et dès qu’on franchit la porte, une chaleur étouffante et moite vous prend à la gorge. Au bout de deux jours, on finit par s’y habituer, mais c’est assez déconcertant la première fois. Dehors, la circulation est infernale. Malgré les routes à trois voies et les 80 kilomètres d’autoroutes aériennes construites dans les années 80, Bangkok souffre des embouteillages. La ville compte près de 12 millions d’habitants et il est quasi impossible d’y circuler aux heures de pointe. Les Thaïlandais conduisent comme les Casablancais... à trois détails près : En Thaïlande, on conduit comme en Angleterre, c’est-à-dire que pour rouler à droite, il faut se mettre à gauche. Deuxième différence, les Thaïlandais ne klaxonnent jamais et troisième dissemblance, les conducteurs Thaïlandais ne s’insultent pas.
Destination Pattaya et autre précision avant de poursuivre : La Thaïlande est une destination de rêve pour le tourisme sexuel, certes, mais il n’y a pas que cela. Des plages de rêve avec du sable fin et blanc, des îles magnifiques, de la verdure partout, une cuisine succulente, une infrastructure hôtelière digne de ce nom et le sourire qui ne quitte jamais les Thaïlandais. Il est vrai que le sexe est très prisé dans ce pays (sur les 12 millions de touristes annuels que compte la Thaïlande, 93 % s’y rendent en célibataires), mais le mot « prostituée » n’existe pas en Thaïlandais. On dit plutôt « femme d’un jour » et dans la rue, on ne voit pas d’un mauvais œil l’étranger gras de 60 ans tenant la main d’une fille qui n’en a que 18. Vendre ses charmes aux touristes est plus une question de survie alimentaire qu’une débauche sociale. La plupart des filles « faciles » viennent du nord-est. où les villageois sont contraints d’envoyer leurs enfants dans les villes .
Nous arrivons vers minuit. La nuit, Pattaya peut se résumer ainsi : 200.000 habitants, 200.000 touristes et 20.000 femmes d’un jour. Plusieurs rues piétonnes, des bars partout, des salons de massage, des gargotes dans lesquelles on peut manger à tout moment de la journée ou de la nuit et, très important pour animer le tout, une marée humaine qui n’en finit jamais. Parce que Pattaya ne dort jamais. La plupart des habitants ont deux métiers. On peut être serveur la journée dans un restaurant et sillonner la ville le soir à bord de sa Kawasaki en traînant derrière une petite charrette qui déborde de beignets de crevettes, de canard laqué ou d’insectes grillés. Pas mauvais, les insectes ! ça n’a pas le goût d’une bonne brochette d’agneau, certes, mais c’est mangeable. Les sauterelles et les criquets passent sans problème et les vers à soie grillés sont granuleux et ont un petit goût pas désagréable. Seuls les cafards n’ont pas été testés en raison de leur présentation peu réjouissante.
Les Thaïlandais mangent les insectes car il fut un temps, il n’y avait que cela pour ne pas mourir de faim. Aujourd’hui, cela fait partie des coutumes et c’est un excellent en-cas entre deux repas. Car les Thaïlandais mangent tout le temps. Pour des raisons inconnues, ils ne grossissent jamais bien qu’on rencontre depuis peu quelques petits obèses âgés entre 12 et 18 ans. La présence depuis quelques années de plusieurs points MacDo expliquerait l’épiphénomène.
Pendant la journée, Pattaya devient une ville « touristiquement correcte ». Les plages sont magnifiques et on peut, pour des sommes dérisoires, faire du parachutisme nautique ou du jet ski. Les marchés sont immenses et on peut très bien y acheter des fruits exotiques, des articles artisanaux, des tee-shirts, de la soie ou des animaux de compagnie. Nous ne passons malheureusement que deux journées à Pattaya. Le bus doit nous ramener à Bangkok, mais entre les deux, une escale en pleine jungle nous attend.
En plein dans la jungle
Le pont de la rivière Kwaï. Situé près de la ville de Kanchanaburi à deux heures de route de Bangkok, le pont fut construit pendant la seconde guerre mondiale par les Japonais qui voulaient avoir un accès ferroviaire en Birmanie afin d’y approvisionner leurs troupes. Le pont fut constamment bombardé par les alliés et c’est incontestablement le pont le plus cher du monde puisque sa construction a coûté près de 100.000 vies dont 20.000 alliés. David Lynch en a d’ailleurs fait un chef d’œuvre cinématographique en 1957, bien que le film ait été tourné en Angleterre et au Sri lanka. Nous traversons le pont mythique et embarquons à bord d’un grand radeau pour descendre le cours de la rivière. De la jungle à perte de vue, de la musique rock américaine poussée à fond, on se croirait dans un film de guerre. Nous passons la nuit dans un hôtel à l’intérieur de la jungle, des moments intenses comme on voudrait en vivre un peu plus souvent.
Retour à Bangkok. La ville est immense et on peut y circuler soit en taxi, soit en métro (aérien ou souterrain), soit en Touk Touk, ces tricycles à moteur qui peuvent contenir trois passagers et qui roulent comme des fous.
Les feux rouges mettent beaucoup de temps avant de passer au vert et au-dessus, on a installé des compteurs à rebours qui informent les conducteurs sur le temps qu’il leur reste avant de circuler ou de s’arrêter. Encore une fois, le sang-froid des Thaïlandais nous laisse perplexes et il est impossible d’énerver un chauffeur de taxi, un vendeur ou un réceptionniste d’hôtel. Nous avons essayé, mais cela n’a jamais marché. Dès que vous commencez à hausser le ton, le Thaïlandais joint les deux mains devant sa poitrine, élargit un peu plus le sourire qui ne le quitte jamais, baisse la tête jusqu’à ce que le menton touche le bas du col de son Lacoste contrefait et vous lance un « Kapukrap » désarmant.
Le mot veut dire « merci » et après cela, vous vous retrouvez dans une situation où vous n’avez plus l’air très fier de vous et où vous faites un peu n’importe quoi pour paraître plus gentil que lui. La plupart du temps, que vous discutiez le prix avec un chauffeur de taxi, un vendeur de bijoux ou de caméras dernier modèle, vous avez droit à un dépliant sur lequel on peut voir les photos d’une vingtaine de filles légèrement vêtues. Dessus, il y a aussi marqué l’adresse d’un club de massage, apparemment des dizaines éparpillés dans les quartiers chauds de Bangkok. Sinon, de nuit comme de jour, pas de policier en vue. D’après notre guide et les dizaines de chauffeurs de Touk Touk dont nous avons fait la connaissance, ils sont partout mais ils sont en civil et se font très discrets.
Aéroport international de Bangkok. C’est fini, nous allons embarquer pour Casablanca. Le séjour a duré une semaine bien trop courte. On pense déjà à la prochaine fois et entre nous, nous essayons de fixer des dates pour un éventuel retour. Beaucoup de plages, beaucoup de sites et beaucoup de rues piétonnes que nous n’avons pas pu visiter faute de temps. L’avion décolle dans quelques minutes et nous avons déjà une grande angoisse : l’aquarium de Doha.
Yassine Zizi - Le Journal Hebdomadaire