Et l’influence des islamistes est terriblement néfaste ». Une petite centaine de prisonniers belgo-marocains est actuellement incarcérée au Maroc, essentiellement dans les prisons du district de Tanger au Nord du pays. Ces prisonniers de droit commun sont, à 99 pc, tombés pour trafic de drogue.
« Il est temps que l’on s’inquiète, reprend l’expert. En général, ces prisonniers sont jeunes, fragilisés et vulnérables. » Le pas est vite franchi au contact des prêcheurs radicaux actifs dans les prisons marocaines. « Ils peuvent devenir des bombes à retardement. Convertis à l’islam le plus dur, puis relâchés dans la nature. Ils ont un passeport belge ou sont en droit d’en avoir un. 24 heures après leur sortie, ils sont en Belgique. Avec un endoctrinement à la clé. »
Quelque 700 islamistes sont, aujourd’hui, derrière les barreaux au Maroc. Dans la foulée des attentats de Casablanca le 16 mai 2003, des attentats qui firent 44 morts, les rafles et arrestations en cascade dans les milieux islamistes se sont multipliées. Au nom de la lutte contre le terrorisme, des jugements expéditifs, dénoncés par les organisations de défense des droits humains, ont été prononcés.
« Il n’y a pas de prisons spéciales pour les islamistes au Maroc, explique un responsable de l’administration pénitentiaire marocaine. Nous essayons de limiter les contacts avec les prisonniers de droit commun. » Appliquer « un traitement spécifique » et « plus dur » aux islamistes et aux théoriciens salafistes, les faire « tourner » de prison en prison pour éviter qu’ils ne se constituent un auditoire fidèle, brouiller les ondes GSM pour éviter qu’ils ne communiquent avec l’extérieur ou entre eux : au vrai, aucun de ces moyens n’a encore permis d’endiguer le prosélytisme des salafistes dans les prisons marocaines. Mais qui attirent l’oeil et l’oreille des organisations de défense des droits humains. Ainsi l’Association marocaine des droits de l’homme milite-t-elle pour la révision de certains procès « inéquitables ». A intervalles irréguliers, dans les prisons de Rabat, de Salé (l’une des plus « dures » du pays où un Belgo-marocain est détenu dans le cadre des attentats de mai 2003), les détenus islamistes partent en grève de la faim. « C’est récurrent, soupire-t-on dans l’administration pénitentiaire. Ils nous demandent simplement que l’on les libère... »
Tâter le terrain
En prison, la technique des islamistes et des prédicateurs radicaux est bien rôdée et consiste, le plus souvent, à prendre en charge les besoins matériels des détenus de droit commun. A un stade ultérieur, quelques préceptes de l’Islam « dur » sont inculqués afin de « tâter » le terrain. Avant d’aller plus avant dans l’écolage...
Bien qu’un accord pour le transfert des prisonniers du Maroc vers la Belgique (et inversement) ait été signé, ceux-ci sont inexistants. D’un côté, le Maroc considère ces binationaux comme des ressortissants marocains et rechigne à les transférer. De l’autre, la Belgique n’insiste pas pour importer des détenus, alors que ses propres prisons sont surpeuplées.
Martin Buxant - La Libre Belgique