Vivre sans rein depuis 34 ans : le combat quotidien de Soumiya

6 mai 2025 - 08h00 - Belgique - Ecrit par : S.A

Soumiya, une Marocaine résidant à Bruxelles, vit sans rein depuis 34 ans. Loin de s’apitoyer sur son sort, elle a créé « Guerrière en pyjama », une association d’aide aux patientes et aux patients qui souffrent, comme elle, d’insuffisance rénale.

Tout commence avant la naissance de Soumiya. « Quand ma maman était enceinte de moi, on a dit à mes parents que je ne vivrais pas ou peut-être quelques semaines, maximum », raconte-t-elle à la RTBF. La petite Soumiya est née avec une polykystose rénale, une maladie génétique qui provoque des gros kystes aux reins. À quatre ans, son existence devient complexe. Elle a dû être rapatriée d’urgence de ses vacances familiales au Maroc en raison de la dégradation brutale de son état physique. « C’était vraiment très difficile, on avait peur, raconte sa maman. D’un coup, les médecins la mettent sous dialyse et nous annoncent qu’il faut lui enlever les deux reins. » Fatima était à mille lieues d’imaginer « qu’on pouvait vivre sans rein. » « Quand tu vois ton enfant, si petit, branché à une machine comme ça, ça fend le cœur », se souvient-elle.

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Les péripéties s’enchaînent : une première greffe de rein à quatre ans et un premier rejet, rapidement. « Je ne me souviens pas de ce moment-là, j’étais trop petite. Mais je me souviens bien des autres déceptions, plus tard. Ça, c’étaient les moments les plus difficiles de ma vie : quand tu sens que la greffe est en train d’être rejetée, que tu vas à l’hôpital et qu’on te confirme qu’il faut t’enlever le rein », raconte Soumiya. Une autre greffe à six ans, un nouveau rejet ; puis une autre à 12 ans. « Là, j’ai été tranquille toute mon adolescence, j’ai vraiment profité à fond. J’ai voyagé, j’ai fait de la danse, je profitais avec mes amies. C’étaient vraiment de belles années », se souvient-elle. Des photos d’elle avec ses amies dans le car ou en spectacle de danse immortalisent ces instants de bonheur.

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Plus tard, elle a eu du mal à trouver un emploi. « C’était inimaginable pour moi de ne pas travailler. J’aurais pu avoir une pension complète d’invalidité. Mais non, pas si jeune, ce n’était pas possible ». Soumiya prend tout de même la vie du bon côté. Elle se donne les moyens pour atteindre ses objectifs. Pendant plusieurs années, la jeune Marocaine travaille à Namur ; elle part tôt le matin pour prendre le train et dès qu’elle rentre chez elle, elle se branche à la dialyse. « À l’époque, je faisais mes dialyses pendant la nuit, ça durait douze heures. Je rentrais à 17h30-18h et je me branchais directement. Je mangeais couchée dans mon lit. » Après le rejet d’une quatrième greffe en 2017, elle change de travail. Les trajets l’épuisent. Elle trouve un horaire adapté chez Brussels Expo, plus près de chez elle. « C’est difficile de trouver un employeur quand tu es dialysée parce qu’ils doivent adapter ton horaire et tu es quand même plus souvent absente à cause des imprévus liés à la maladie, à la dialyse que tu dois faire pendant ta journée. Là-bas, ils ont été super avec moi », raconte la photographe.

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Licenciée en 2021 pour raisons économiques à cause du Covid-19, Soumiya ne laisse pas abattre par sa situation. La jeune femme crée « Guerrière en pyjama », une association d’aide aux patientes et aux patients en insuffisance rénale. « J’ai commencé par prendre des photos des patientes et patients dialysés, tout simplement. Je prenais le temps de parler avec eux et elles, de leur demander de quoi ils et elles avaient besoin. » Soumiya organise notamment des séances photos dans son studio, chez elle. Ses photos sont exposées dans les couloirs de certains services de dialyse, notamment aux Cliniques Universitaires Saint-Luc, où elle est suivie. Aujourd’hui, elle a 38 ans et se prépare pour une cinquième greffe. « Le cas de Soumiya est assez exceptionnel. Il y a peu de patientes et de patients qui sont en attende d’une cinquième greffe », confirme le Professeur Eric Goffin. Elle va bénéficier d’un don croisé. Au cas où cela ne connaîtra pas un succès, elle bénéficiera peut-être d’un don d’une personne décédée.

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