Au cœur de la machine à athlètes marocains

29 mai 2008 - 11h49 - Sport - Ecrit par : L.A

L’athlétisme marocain a désormais les moyens de ses ambitions, témoigne Auchar. Le DTN en veut pour preuve la logistique mise en place : un centre d’entraînement à Rabat, un autre camp à Ifrane, deux pistes professionnelles, un staff médical (3 médecins du sport, 8 kinésithérapeutes, un médecin spécialisé dans la lutte antidopage, un préparateur psychologique, un médecin diététicien…), des équipements de compétition ultra-modernes, des accompagnateurs, des entraîneurs…

A tout cet arsenal logistique, s’ajoute une grille de rémunération conçue sur la base de nombreux critères. Les athlètes sont totalement pris en charge par la fédération. En plus, ils perçoivent une bourse d’aide à la préparation. D’ailleurs, « le Maroc est le seul pays au monde à avoir mis en place un système de bourse mensuelle », précise Nezha Bidouane pour qui la rémunération devra être conditionnée par l’obligation de résultat.

Le système de rémunération se base sur les critères les plus objectifs possibles, souligne-t-on à la fédération. Ce n’est pas le nom de l’athlète ni son parcours qui déterminent le montant de la bourse, mais un barème en fonction du niveau et des performances du moment. Il fallait donc rompre avec l’ancien système de rémunération, glisse Auchar. « Auparavant, la rétribution se faisait généralement à la tête du… client », lâche le DTN. Mais combien perçoit mensuellement un athlète au juste ? « En tout cas, c’est une bonne bourse de l’ordre du salaire d’un cadre, voire un haut fonctionnaire », se contente de répondre la direction technique sans plus.

Au fait, les bourses varient entre 500 DH pour les plus jeunes jusqu’à… 10.000 DH pour le top niveau. Du temps de Aziz Daouda, la bourse oscillait entre 800 et 8.000 DH. D’ailleurs, « au top de notre niveau, El Guerrouj et moi-même, nous percevions 8.000 DH par mois », confie Bidouane. Très peu, diraient certains compte tenu du palmarès de ces stars de l’athlétisme moderne et des revenus de leurs concurrents européens. Actuellement, Hassna Benhassi, la tête d’affiche et non moins valeur sûre des 800 et 1.500 mètres, ne perçoit que… 9.500 DH par mois ! Une bourse qui plus est interrompue de fin août jusqu’au mois de novembre, basse saison oblige, nous confie Benhassi comme si elle se justifiait ! Mais ce n’est pas tant le montant de la bourse ou sa régularité qui inquiète le plus les athlètes. A les entendre, ce qui les préoccupe le plus, c’est surtout comment gérer l’après-compétition loin des feux de la rampe. « Les athlètes en fin de carrière n’ont aucune visibilité. Ils savent d’office qu’ils ne peuvent avoir le même sort que leurs aînés », précise un ancien lièvre de Hicham El Guerrouj.

Ceci étant, ce n’est pas parce que les moyens humains, techniques et la logistique sont disponibles qu’il faut s’attendre à des résultats probants dans l’immédiat, nuance-t-on auprès de la fédération. Cela revient-il à dire que nous ne sommes pas prêts pour Pékin ?

Sur cette question précise, le staff technique réplique : « Ce n’est pas que nous ne sommes pas prêts. Tous les athlètes qui ont le minima sont potentiellement à même de décrocher une médaille olympique ». Mais en même temps, « il ne faut pas s’attendre à des miracles ! ».

L’expression est lâchée : il ne faut pas perdre de vue que les JO, c’est assez spécial comme compétition ! rappelle le DTN et ce, dans la mesure où, renchérit-il, c’est une sélection des meilleurs sportifs mondiaux qui briguent tous une médaille. C’est la crème ! En plus, « une médaille aux JO n’a pas de prix, c’est le summum, le meilleur des palmarès », commente Mustapha Auchar. Le système des qualifications y est aussi très sélect. Une fois qualifié, l’athlète se doit de passer avec succès 3 étapes de compétition et être à chaque fois parmi le top 5.

A tous ces filtres, s’ajouteront le climat de Pékin, le décalage horaire (8 heures entre Beijing et Casablanca)… Cela revient à dire qu’il y a plusieurs paramètres qui rentrent en jeu, notamment l’acclimatation, l’adaptation à l’horloge biologique, sans parler du moral de l’athlète, son degré de motivation, et de sa condition physique au moment de la compétition. « Mais ces paramètres sont aussi valables pour tous les athlètes », précise Hassna Benhassi. En attendant Beijing, les entraînements vont bon train aussi bien à Rabat qu’à Ifrane. Le DTN effectue des visites inopinées à Ifrane pour superviser le rythme, l’évolution des stages, le moral des athlètes, l’évolution du timing, chrono…

Dans l’étape actuelle, les coureurs s’entraînent en moyenne deux fois par jour. « C’est l’une des périodes les plus dures, marquée par une grosse charge d’entraînements et une forte pression que la majorité des athlètes redoutent. Et c’est normal à la veille d’une grande compétition », rassure la direction technique : « L’athlète doute lorsqu’il est en manque de compétition, devient vulnérable et très susceptible. Et c’est le cas à Ifrane ». Chose que dit comprendre très bien le staff technique à la veille des JO. Pour compenser, l’on fait visualiser aux athlètes des courses, des astuces techniques et discuter des failles et autres ajustements d’ordre tactique.

Le coût d’un athlète

Si l’on prend en compte les frais d’hébergement, de restauration, l’accompagnement médical et technique, le coût du staff, les stages… un athlète coûte en moyenne entre 10.000 et 15.000 DH, voire un peu plus par mois à la fédération. Ce qui fait dire au DTN que les moyens mis à la disposition des athlètes marocains sont « raisonnables voire très corrects ». Côté moyens, « nous sommes globalement assez bien classés par rapport aux pays étrangers », résume le patron du staff technique. Après la carrière, la fédération n’assure pas le service après-vente. En clair, l’après-carrière n’est pas de son ressort.

La performance, innée ou acquise ?

S’il y a un sport auquel l’on associe le nom du Maroc dans les meetings internationaux, c’est incontestablement l’athlétisme.
Depuis plus de 24 ans (Los Angeles 1984), nos athlètes sont pratiquement indétrônables sur les disciplines du fond et demi-fond, à tel point que des coureurs étrangers de renom cherchent à les éviter sur piste. Mais comment peut-on expliquer cet atout pour l’athlétisme ?

Serait-ce une prédisposition génétique, le climat ou encore une propension du Marocain aux épreuves d’endurance. Sachant bien que le Maroc dispose d’une cartographie de fiefs de coureurs, réservoir inépuisable de graines de stars : Khémisset, Tiflet, l’Oriental (Oujda, Berkane), Taza-Taounate-Fès, Safi, Khouribga, Béni-Mellal… ce sont là autant de villes qui alimentent en permanence l’Institut national d’athlétisme de Rabat.

Des coureurs tels que Kada et Houcine Benzruiguinate, lièvre d’El Guerrouj, expliquent cet ancrage régional de l’athlétisme par la présence d’anciennes casernes militaires du temps du Protectorat. Les militaires étaient très forts dans le cross-country et ont transmis cet amour pour le jogging de génération en génération.

Source : L’Economiste - A. R.

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