Des femmes marocaines abandonnées par l’Etat espagnol

1er février 2024 - 14h00 - Espagne - Ecrit par : P. A

Les travailleurs frontaliers marocains, principalement des femmes de ménage, qui se rendaient chaque jour de Nador à Melilla avant la fermeture des frontières, sont toujours au chômage. Ils réclament le remboursement de leurs cotisations à la sécurité sociale en Espagne.

Depuis la réouverture des frontières en mai 2022, seuls les Marocains disposant d’un visa Schengen sont autorisés à entrer à Melilla pour travailler. Pourtant, le règlement 2016/399 du Parlement et du Conseil européen, en son article 41, précise que les citoyens marocains, titulaires du permis F (travailleurs transfrontaliers) et les résidents des zones d’influence de Nador et de Tétouan, prouvant leur qualité et munis d’un document de voyage en cours de validité, « peuvent entrer à Ceuta et Melilla sans visa, à condition de ne pas passer la nuit sur le territoire espagnol ».

Ils sont 1 310 travailleurs marocains à vivre cette situation. La plupart sont des travailleurs domestiques. « Nous sommes abandonnés », se plaint à El Español, Ayada, une veuve de 51 ans, au chômage avec quatre enfants à charge au Maroc. Elle confie avoir commencé à aller travailler à Melilla depuis 2015. Elle travaillait de 8 h à 17 h dans une maison. « J’avais un permis de travail, mais j’y allais même les jours fériés. Lorsque la frontière a été fermée, la dame m’a envoyé de l’argent quatre ou cinq fois au cours de la première année du Coronavirus, mais elle ne voulait pas que j’obtienne un visa pour retourner travailler à Melilla. Elle m’a dit que c’était trop cher et qu’elle ne pouvait pas », détaille la quinquagénaire.

À lire : Bientôt une allocation chômage pour les travailleurs frontaliers de Sebta et Melilla ?

La situation de ces travailleurs frontaliers est critique. « Ils ne reçoivent toujours aucune aide, pas même l’ERTE auquel ils ont droit comme tout autre travailleur espagnol ou étranger dans l’État ; c’est une discrimination dans un pays démocratique », dénonce Abderramán El Fahsi El Mokhtar, un syndicaliste de l’UGT-FICA à Melilla. « La question des travailleurs transfrontaliers génère beaucoup de problèmes, mais ils ont le droit d’être indemnisés », renchérit pour sa part Raúl Carballedo, avocat spécialiste des droits de l’homme, qui défend 14 dossiers de ces Marocains devant les tribunaux.

« Les travailleurs frontaliers n’ont pas perçu l’ERTE, mais ils ont payé 24 % d’impôt sur le revenu et la sécurité sociale. Ce n’est pas parce qu’on est en Afrique du Nord qu’on est soumis à la loi de la jungle. Le principe d’égalité des droits s’applique à tous dans un pays démocratique », insiste Abderramán El Fahsi. « D’un point de vue juridique, tous les délais sont dépassés. Les employeurs ne veulent pas réembaucher ou indemniser les travailleurs qui ne se sont pas présentés, mais le fait est qu’ils ont été bloqués au Maroc après la fermeture de la frontière. La question doit être résolue entre le gouvernement et les entrepreneurs de Melilla », indique pour sa part Javier Valenzuela, secrétaire général de l’UGT à Melilla.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Espagne - Nador - Melilla - Sécurité sociale

Aller plus loin

L’Espagne recherche de la main d’oeuvre qualifiée au Maroc

L’Espagne envisage d’accorder plus de visas aux travailleurs étrangers, dont les Marocains, pour combler son déficit de profils qualifiés.

Maroc : le chantage sexuel numérique, nouvelle arme en cas de divorce

Les ex-conjoints utilisent souvent du contenu à caractère sexuel, notamment des images et des vidéos, pour obtenir des règlements financiers ou des droits de garde auprès des...

Melilla : des facilités pour les travailleurs frontaliers

La délégation gouvernementale de Melilla a annoncé que les travailleurs frontaliers marocains qui avaient leurs autorisations en cours de validité avant la fermeture de la...

Sebta : des permis de séjour aux travailleurs frontaliers marocains

Le Médiateur a demandé aux autorités espagnoles d’accorder des permis de séjour aux travailleurs frontaliers bloqués à Ceuta depuis la fermeture de la frontière, à défaut de...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : comment des consultants échappent à l’impôt

Au Maroc, des ingénieurs et autres consultants en informatique ont trouvé la formule pour échapper au fisc. Ils proposent de manière informelle leurs services aux grandes entreprises qui les paient via des intermédiaires.

Maroc : bonne nouvelle pour les retraités

L’impôt sur le revenu applicable aux pensions de retraite connaîtra une révision à la baisse allant jusqu’à 70 %, a annoncé Nadia Fettah, la ministre de l’Économie et ses finances.

Les Marocains pourraient partir à la retraite plus tard

Les députés de l’opposition ont adressé lundi une question orale au gouvernement, lui demandant quelles mesures il entend prendre pour réformer le régime de retraite.

Maroc : bonne nouvelle pour les fonctionnaires

Le gouvernement marocain et les syndicats auraient trouvé un accord en ce qui concerne l’augmentation générale des salaires des fonctionnaires.

Maroc : la réforme des retraites divise

La réforme des retraites donne du fil à retordre à l’Exécutif marocain. De leur côté, les syndicats s’inquiètent de sa mise œuvre dans un contexte économique marqué par l’inflation, exprimant des craintes quant à l’avenir des retraités.