Depuis l’éclatement du scandale de corruption connu sous le nom de « Qatargate », les difficultés pour renvoyer les Marocains déboutés de leur demande d’asile vers leur pays d’origine se sont accrues.
Ce drame restera l’un des faits marquants de l’année : à l’aube du 5 octobre, quelque 400 clandestins d’origine subsaharienne, extrêmement déterminés et armés d’échelles confectionnées de branchages, tentent de franchir la double barrière métallique qui sépare le territoire marocain de l’enclave espagnole de Melilla, dans le nord-est du Maroc.
Cette fois-ci aucun d’entre eux ne parviendra à se rendre de l’autre côté en territoire espagnol. Face à la violence de l’assaut, les soldats marocains, débordés et paniqués, ouvrent le feu. Six clandestins y laisseront leur vie, tués par balles ou morts d’étouffement après avoir été piétinés.
La tentative d’assaut massif de ce 5 octobre sera la dernière d’une longue série entamée au début de l’été contre les enclaves espagnoles de Melilla et de Sebta, et qui, au total, feront 11 morts et des blessés par dizaines.
Dès lors, les forces de sécurité marocaines multiplient les opérations de ratissage dans le nord du royaume. Plusieurs centaines de candidats à l’émigration clandestine sont arrêtés, puis conduits à bord de bus vers la frontière algérienne et parfois dans des zones quasi désertiques du sud et du sud-est du Maroc.
Après quelques jours de flottement, les autorités marocaines décident finalement de regrouper les clandestins par nationalité et d’entamer des négociations avec plusieurs gouvernements africains afin d’organiser le retour de leurs ressortissants.
Le 10 octobre, un premier Boeing 737 de la Royal Air Maroc s’envole de la ville d’Oujda (nord-est) en direction de Dakar avec 140 ressortissants sénégalais à son bord. En quelques semaines, un peu plus de 3.500 clandestins, en majorité Sénégalais, Gambiens, Maliens et Camerounais, sont reconduits vers leur pays d’origine "à la seule charge du Maroc et pour un coût d’environ 100 millions d’euros", selon une source gouvernementale marocaine.
Au plus fort de la crise, début octobre, le ministre marocain de l’Intérieur, Mustapha Sahel, lance un appel pour la mise en oeuvre "d’un véritable plan Marshal en faveur des pays d’Afrique subsaharienne" afin de trouver une solution à la question de l’émigration clandestine, et insiste sur la nécessité pour les pays européens de "favoriser les possibilités de migrations légales".
Directement concernée par l’afflux massif de clandestins sur son sol, l’Espagne s’associe à la proposition marocaine de la tenue, début 2006, d’une conférence euro-africaine sur l’immigration, proposition largement soutenue par la France.
Si les vagues d’assauts massifs contre les enclaves espagnoles ont permis à l’opinion publique européenne de prendre la mesure de l’ampleur du phénomène, la question de l’émigration illégale vers l’Europe est loin d’être résolue, et le Maroc ne peut seul y faire face.
Depuis la fin de la crise, les services de sécurité marocains continuent de faire état presque quotidiennement de l’interpellation ou du sauvetage de dizaines de candidats à l’émigration clandestine qui tentent désespérément de rejoindre à bord d’embarcations de fortune les côtes sud de la péninsule ibérique ou celle des îles Canaries, situées en face de la côte atlantique du Maroc.
Ces candidats à l’émigration, marocains ou subsahariens, peuvent débourser jusqu’à 2.000 euros à des passeurs contrôlés par de puissants réseaux mafieux maroco-espagnols qui, dans un passé encore récent, étaient rarement inquiétés.
Michel Zerr - Ap - Nouvelobs.com
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