Depuis le lancement du titanesque projet de la zone franche Tanger Med, les investisseurs, nationaux et étrangers,
se bousculent au portillon de la ville du Détroit.
À quoi ressemble aujourd’hui Tanger, cette ville adulée par les artistes, les poètes, les cinéastes et les écrivains, qui s’y rendent régulièrement en quête d’inspiration ? Longtemps plongée dans l’oubli et l’hibernation depuis l’indépendance du Maroc en 1956, elle redevient actuellement une autre ville au visage moderne et mondialiste, qui recherche une ouverture accélérée sur le monde économique tout en conservant son cachet culturel et artistique propre. Située à quelques encablures de l’Europe, avec un emplacement géographique qui donne sur les deux façades maritimes, atlantique et méditerranéenne, Tanger est à la fois la porte de l’Europe et de l’Afrique, permettant aux investisseurs des deux continents de se croiser et, parfois, de se rencontrer. Rien qu’avec cette situation stratégique que lui envient bien des capitales européennes, elle entrevoit un avenir de rêve. D’ores et déjà, cet avenir commence à se construire, à se réaliser, au gré d’une volonté royale et d’un dynamisme conséquent des autorités locales, qui se mobilisent pour changer le visage économique de Tanger.
Mais, le projet qui attire maintenant toutes les attentions et qui devrait révolutionner le destin de la ville, c’est le Tanger Med, dont les fondations ont été posées en 2002 par SM le Roi Mohammed VI. Chantier titanesque, puisque son coût tourne autour de 16 milliards de dirhams, ce projet sera inauguré au plus tard en 2007. Dès lors, le trafic promet d’exploser. Avec à terme 3,5 millions de conteneurs, 1 million de voitures et 500.000 camions attendus chaque année.
Il permettra à Tanger d’être le centre du monde, le carrefour de toutes les transactions commerciales transitant par la mer et le noyau des grands arrivages venus des pays africains et européens. La ville vibrera alors au rythme d’un commerce mondial florissant dont les conséquences ne tarderont pas à se répercuter sur le niveau et la qualité de vie des Tangérois. Tanger ne se rêve pas en Ushuaia, mais en Dubaï. Objectif : ériger l’un des plus grands ports de la Méditerranée à seulement 15 kilomètres des côtes espagnoles. Côté emplois, le nouveau port fournit actuellement 140.000 postes, qui vont doubler avec son démarrage.
Depuis le lancement des travaux de ce port pharaonique, Tanger attire de nombreux investisseurs, venus des quatre coins du monde. Ils sont promoteurs immobiliers, opérateurs touristiques, industriels, représentants de grandes multinationales, et j’en passe. Certains ont déjà lancé leurs projets, pressés par la récolte du gain, d’autres étudient toujours leurs maquettes pour les adapter à la nouvelle architecture économique de la ville.
Le groupe espagnol Fadesa fait partie des investisseurs étrangers les plus actifs. Il prépare actuellement la réalisation d’un grand complexe hôtelier et résidentiel qui sera situé au centre de la ville. Baptisé Tanger City Center, il sera construit sur une superficie de 3,4 hectares, pour une valeur d’investissement avoisinant le milliard de dirhams.
En même temps, les Emiratis s’activent à se faire une place dans la nouvelle Tanger. Munis de grands moyens, ils sont les plus ambitieux pour profiter d’un décollage dont ils ne souhaitent pas être privés. Figurant parmi les plus grands groupes dans le monde, avec des fonds gérés de l’ordre de 40 milliards de dollars, le groupe Emâar, qui a récemment annoncé le lancement dans quatre villes du pays de nombreux projets touristiques et immobiliers, s’apprête à construire un immense complexe hôtelier à Tanger. Baptisé Tinja, d’un coût 4 milliards de dirhams et étendu sur une superficie de 230 hectares, ce projet comprend des chalets, un SPA, des villas jardins, des maisons de ville, un centre équestre, une marina, et un centre commercial.
D’autres investisseurs arabes, notamment du Golfe, sont aussi en lice. Il s’agit du Qatari Diar Real Estate Morocco, un groupe de promotion touristique et immobilière, qui se prépare à lancer le projet Houara pour un financement de 2 milliards de dirhams. C’est le projet le plus consistant. Il compte en effet un palais des congrès, un hôtel sur la plage, un lac artificiel, un théâtre plein air, un golf-hôtel, des résidences touristiques, un centre équestre, un centre nautique, une mosquée et, enfin, un centre commercial. Côté marocain, c’est la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) qui mène la danse à Tanger. À travers sa filiale touristique, Maroc Hôtels et Villages (MHV), elle compte concrétiser plusieurs projets : trois hôtels 5 étoiles, plusieurs centres culturels, des immeubles résidentiels, des espaces verts et de grands équipements de service et d’animation. Vient au second rang le groupe Chaâbi, l’un des plus grands investisseurs dans notre pays. Ainsi, sur un programme de 5 milliards de dirhams, prévu sur plusieurs villes du Royaume, le groupe compte construire dans la ville de Détroit deux tours jumelles qui feront office de centre commercial le plus important de la région du Nord. Il compte également y créer une usine de production de sucre, dans la foulée de ses projets industriels.
« D’ici à 2009 ou 2010, estime un opérateur économique, tous ces projets seront opérationnels et offriront à Tanger une autre dimension qui va renforcer sa notoriété internationale ».
Pour accompagner cette dynamique économique, qui se soldera au fil des ans par un sursaut qualitatif du social, les autorités de la ville établissent des plans, multiplient les initiatives, prennent des mesures, pour balayer l’image sulfureuse d’une région gangrenée par les contrebandiers, les trafiquants de drogue et les candidats à l’exil vers l’Europe. Le nouveau wali de la ville, Mohamed Hassad, celui-là même qui a métamorphosé Marrakech, est l’homme désigné par le pouvoir pour accomplir cette mission. Chacun sait qu’il en a les moyens, les capacités et même les pleins pouvoirs. Non seulement, il doit aider ces investisseurs à réaliser leurs projets, mais il doit aussi assainir la ville pour en faire un endroit où il fera bon vivre et séjourner. Actuellement, il a ouvert plusieurs chantiers dont le plus important est celui qui consiste à rénover la corniche de Tanger. Dans quelques mois, cet espace, autrefois délaissé et mal entretenu, sera la bouffée d’oxygène d’une Tanger qui prend désormais de l’air et qui s’ouvre de plus en plus sur son monde. Au plaisir de tous les artistes qui la fréquentent.
Aïssa Amourag - Maroc hebdo International
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