TikTok, la nouvelle mosquée des mariages au Maroc ?

16 juin 2025 - 12h00 - Maroc - Ecrit par : S.A

Considéré comme une figure religieuse, un savant qui guide, enseigne, et parfois célèbre des mariages dans le respect des règles de l’Islam, le « fkih » se réinvente, se lance dans la mode du mariage virtuel et joue les entremetteurs sur TikTok.

Les « fkih » n’entendent pas vivre en marge de la société. Ils s’investissent eux aussi dans la mode du mariage virtuel. Des lives TikTok d’un homme se présentant comme un « fkih » en sont la parfaite illustration. Cet homme joue les entremetteurs entre des inconnus cherchant à se marier. Comment procède-t-il ? « Une femme manifeste son souhait de se marier, un homme également, et tous deux sont invités à participer à un live où ils se parlent pour la première fois. Le fkih supervise la discussion, veille à ce qu’elle reste respectueuse et “sérieuse”, et parfois, conclut en proposant une “fatiha” », fait savoir Le Matin, ajoutant que certains couples échangent leurs numéros après le live. D’autres annoncent quelques jours plus tard qu’ils se sont fiancés.

À lire : Maroc : mariage sur TikTok

La mise en relation des prétendants au mariage est désormais passée de la sphère privée à la sphère publique. Les conditions du mariage au Maroc ont évolué avec le temps « en passant d’un acte familial collectif à une démarche individuelle », reflétant des mutations sociales profondes », souligne Chakib Guessous, socio-anthropologue, chercheur en sciences sociales et écrivain marocain. « Aujourd’hui, de nombreuses personnes se marient plus tard qu’autrefois, contrairement aux générations précédentes où le mariage intervenait dès 18 ou 19 ans, parfois même plus tôt », explique-t-il, rappelant les derniers chiffres du HCP sur le célibat définitif qui a augmenté au Maroc à 9,4 % en 2024 contre 5,9 % en 2014.

Selon le sociologue, cette évolution s’explique par l’absence d’accompagnement familial pour trouver un partenaire, ainsi que par un contexte social où les mariages traditionnels avec la bénédiction des familles deviennent plus rares. Certains jeunes cherchent alors à satisfaire leurs besoins affectifs et sexuels dans un cadre religieux, ajoute-t-il. Ainsi, ils se lancent dans la recherche des offres de mariage qui leur assurent une légitimité religieuse, avec la bénédiction d’un imam ou d’un « fkih », en respectant les limites de la légalité islamique. Ce phénomène illustre une tendance vers des mariages individuels motivés autant par des impératifs religieux que par des besoins personnels non comblés, fait remarquer l’auteur de l’ouvrage « Mariage et concubinage dans les pays arabes ».

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Ce passage de la mise en relation des prétendants au mariage de la sphère privée à la sphère publique est diversement apprécié. Pour certains, c’est une manière moderne et transparente de répondre à une réalité sociale. Souvent livrés à eux-mêmes dans leur quête de partenaire, les jeunes ont du mal à trouver des cadres sûrs pour se rencontrer et s’éloigner des applications de rencontres. Le rôle du « fkih » est donc perçu comme une solution « halal », « sans isolement ni tabou, mais en live. » D’autres dénoncent en revanche une « marchandisation du mariage ». Pour le sociologue, « il s’agit bien de marchandisation, si certains acteurs, comme ce fkih, reçoivent de l’argent pour organiser ces rencontres, comme les revenus de Tiktok, les vues, les cadeaux,… ».

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