Viole-moi, futur époux

14 mai 2012 - 12h02 - Maroc - Ecrit par :

Il y a quelques mois, Amina El Filali, une jeune fille âgée de 16 ans native de Larache s’était donnée la mort après avoir été forcée d’épouser son violeur. Aujourd’hui, c’est Safae, tangéroise de 14 ans qui a été mariée contre son gré à son violeur par un juge. Cerise sur le gâteau : ce mariage est parfaitement légal selon l’article 475 du code pénal marocain qui garantit l’immunité au violeur tant que le mariage n’est pas annulé !

Les us marocains offrent un piédestal à la notion d’honneur et de virginité, notions dont les corrélations diffèrent d’un milieu à un autre. Cependant, cela ne peut justifier en aucun cas le recours à des mariages forcés pour cacher « la honte ». Les sanctions pénales ont pour dessein de rectifier les dérapages qui émanent des individus vis-à-vis du contrat social qui nous lie. Mais donner au violeur le subterfuge du mariage avec sa victime devient alors une aberration à l’encontre de la victime, de sa famille et de la société.

Le tort revient unanimement au violeur qui doit être châtié pour la débauche de sa virilité. Comment peut-on le marier à une fille qui a été violée à un âge où son corps continue de croître ? Le mariage précoce est fortement condamnable, que dira-t-on du mariage précoce et forcé à son violeur ? L’article 475 condamne, oui, mais il condamne la victime et non le bourreau.

La société marocaine est amenée à évoluer et à dépasser ses coutumes rétrogrades qui offrent un refuge aux pervers. Sous le couvert du silence et de l’honneur, plusieurs viols et cas de pédophilie sont perpétrés, le coupable tire profit de cette situation pour récidiver encore et encore. Le nombre des victimes augmente, les séquelles physiques guérissent tandis que les psychiques persévèrent et deviennent une obsession chez les victimes.

Nous devons dépasser les justifications futiles et changer cet article. L’heure n’est guère aux justifications religieuses ou conservatrices. Pensons à ces victimes, au tort qu’on leur fait subir en aggravant le viol par le mariage forcé. De cette façon, la société devient complice du violeur, gratifie son acte et encourage d’autres à suivre son modèle. Merci la loi !

La ministre Hakkaoui avait appelé à lancer un dialogue national sur cette affaire, si abolir cette aberration du code pénal devra attendre une décennie, alors restons les bras croisés à dénigrer et à condamner ces actes. On connait Safae, on connaissait Amina, mais on ne connait pas les centaines d’autres marocaines qui subissent le même sort et gardent leur mutisme. La doxa marocaine constitue une épée de Damoclès pour la victime et sa famille, ne donnons pas cette épée au violeur, mais enlevons-là avec notre mobilisation. Ne permettez pas aux violeurs de devenir les futurs époux de leurs victimes. Sauvez Safae !

Mahdi Zahraoui

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Droits et Justice - Mariage forcé - Femme marocaine - Enfant - Pédophilie - Mariage - Amina Filali - Virginité

Aller plus loin

Marrakech : il leur promettait leur mariage avant de les arnaquer

Les éléments de la Police judiciaire ont procédé à l’arrestation d’un individu à Douar Ras Al Aïn dans la commune de Zemrane, située à une quarantaine de kilomètres de...

Ces articles devraient vous intéresser :

Love is Blind, Habibi : un candidat irakien insulte les Marocaines

L’émission de téléréalité « Love is Blind, Habibi », sur Netflix, fait face à une vague de critiques suite aux propos tenus par un candidat irakien, Khatab, à l’encontre des Marocaines. Lors d’une interview radio, celui-ci a tenu des propos moqueurs...

Annulation des accords UE-Maroc : le Polisario jubile

Le Front Polisario a salué la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) annulant les accords de pêche entre l’UE et le Maroc, la considérant comme un « triomphe de la résistance ».

Au Maroc, les hommes font du baby-sitting, et ça ne plaît pas à tout le monde

Outre les femmes, les hommes proposent eux aussi des services de baby-sitting via des applications. De quoi inquiéter bon nombre d’internautes marocains qui s’interrogent sur la protection de l’enfance et la légitimité de ces services.

Maroc : 30 députés éclaboussés par des affaires de corruption

Au total, 30 députés marocains sont poursuivis par la justice en leur qualité de président de commune pour leur implication présumée dans des affaires de corruption, de dilapidation de deniers publics, de chantage, et de falsification de documents...

Maroc : mères célibataires, condamnées avant même d’accoucher

Au Maroc, les mères célibataires continuent d’être victimes de préjugés et de discriminations. Pour preuve, la loi marocaine n’autorise pas ces femmes à demander des tests ADN pour établir la paternité de leur enfant.

Un enfant né d’un viol ouvre une brèche dans le droit marocain

Saisie par une jeune maman qui cherche à obtenir une indemnisation pour son fils issu d’un viol, la cour de cassation marocaine a rendu une décision qui va faire date.

Maroc : WhatsApp banni pour la Gendarmerie royale

Suite à la décision de justice annulant un procès-verbal dressé via WhatsApp, la Gendarmerie royale a invité les commandements régionaux, casernes, centres et patrouilles au respect strict des textes en vigueur et à éviter d’envoyer tout document via...

La chanson « Enty » de Sâad Lamjarred devant la justice

Le compositeur Mohamed Rifai a assigné DJ Van en justice à cause de la chanson « Enty » interprétée par Saad Lamjarred en 2014.

Au Maroc, le parti au pouvoir dit niet au mariage homosexuel

Le parti Rassemblement national des Indépendants (RNI) présidé par Aziz Akhannouch, chef du gouvernement marocain, affiche son opposition au mariage homosexuel.

ADN au Maroc : vers un fichage incontrôlé ?

L’utilisation à des fin illégales des empreintes et des échantillons d’ADN des Marocains, prélevés dans le cadre des enquêtes criminelles, préoccupe des parlementaires qui ont interpelé le gouvernement à ce sujet.