La Gendarmerie Royale marocaine a intensifié ses efforts de lutte contre la criminalité au cours des neuf premiers mois de 2024, affichant des résultats significatifs. Grâce à la modernisation de ses équipements, notamment avec l’acquisition de...
Depuis plusieurs semaines, l’activité de l’agence de presse MAP est largement marquée par des dépêches annonçant des arrestations de narcotrafiquants, et des interpellations de hauts fonctionnaires appartenant aux divers services de Sécurité de l’Etat.
Sur instructions royales, une vaste offensive contre les barons de la drogue et leurs appuis installés au sein de la Sûreté Nationale, la Gendarmerie Royale, les Forces Auxiliaires ou les Douanes, a été déclenchée et les résultats, très « parlants » pour l’opinion publique sont là. De Chrif bin Louidane au tonton d’Erramach, le sieur Kouyeh, de Larroussi à Chouli, ce sont quelques-uns des plus gros bonnets de la drogue qui sont aujourd’hui sous les verrous, interrogés sans relâche par les autorités judiciaires et qui, comme le disent si bien les expressions argotiques consacrées à ceux qui avouent, « crachent le morceau, se mettent à table, bavent »…
Ils bavent tant et si bien devant les juges d’instruction ou en face des enquêteurs de la Gendarmerie Royale, qu’à ce jour, et sans préjuger des prochains, ce sont près d’une quarantaine de sécuritaires, parmi les plus gradés de leurs administrations respectives, qui sont tombés, accusés de corruption, de complicité, et d’autres charges produites par les relations coupables que ces responsables entretenaient avec des individus peu recommandables, mais richissimes.
Car là sont le fond et l’origine à la fois du problème. Partant du constat que personne n’est totalement incorruptible car le prix fait, seul, la différence, les trafiquants de haschich marocains se sont « payés » des gradés influents opérant dans les régions où s’organisent le trafic illicite de drogue, la contrebande, le commerce d’êtres humains, etc.
Si aujourd’hui un préfet (Izzou) est incarcéré, un autre (Jamali), en clinique pour dépression nerveuse, mais sous surveillance policière, et des dizaines d’officiers et de sous-officiers en garde-à-vue ou en préventive, c’est parce que Bin Louidane, Larroussi, Kouyeh et consorts ont consacré des millions de dirhams à acheter leurs consciences. L’onde de choc déclenchée par cette offensive contre les ripoux de l’appareil sécuritaire a été tellement forte que le général Hamidou Laanigri, patron de la DGSN, expert mondialement reconnu dans la lutte anti-terroriste, a dû « changer de crémerie » pour prendre l’Inspection générale des Forces Auxiliaires !
Un tel tsunami a pu se produire parce qu’au plus haut niveau de la hiérarchie de l’Etat, la conviction est faite que le trafic de stupéfiants et tout ce qui l’accompagne étaient susceptibles de mettre, à plus ou moins brève échéance, en péril la pérennité de l’Etat, les institutions représentatives et le processus de développement et de réformes enclenché depuis plusieurs années.
L’émergence de cartels riches, la multiplication des liens avec les mafias internationales, la pénétration des circuits économiques légaux, la volonté de briguer des fonctions électives, tout cela était en train de se développer au Maroc, et tout particulièrement dans le Nord du pays. La mainmise des cartels du Hasch sur plusieurs régions du pays a été enrayée. Mais, les démons de l’argent facile, l’importance des cultures et de la production sont des dangers permanents et terribles. L’Etat devra faire plus et pendant longtemps pour éradiquer la chienlit de la drogue, ceux qui la propagent et l’entretiennent.
Le Maroc, premier producteur et exportateur de Haschich au monde !
Selon un article paru en novembre 2005 dans la revue « Jane’s Intelligence » sous la plume d’un géographe spécialiste du trafic des stupéfiants, Pierre-Arnaud Chouvy, du CNRS français, le Maroc produirait près de la moitié de la consommation mondiale de haschich ! Son étude, basée sur des rapports des instances spécialisées de l’ONU, énonce que le Rif est la zone de culture de haschich la plus étendue au monde, faisant de notre pays le premier producteur et exportateur mondial de cette substance.
Le professeur Chouvy avance que le Rif est la zone de culture de 42 % de la production mondiale de ce dérivé du cannabis. D’ailleurs, dans un rapport daté de 2003, l’Office des Nations Unies sur la Drogue et le Crime considérait que la culture du cannabis concernait plus de 134 000 hectares au Maroc, une superficie supérieure aux zones consacrées à l’opium en Afghanistan, estimées par l’UNODC à 131 00 hectares…
En 2005, le même office onusien précisait que plus de 7 400 tonnes de « Moroccan shit » avaient été récoltées en 2003-2004…
Pour Pierre-Arnaud Chouvy, les superficies cultivées ont cependant diminué en 2004, passant de 134 000 hectares à 120 000, mais débordent des zones traditionnelles de Senhaja pour s’étaler dans les Ghomaras, les Jebalas et l’est de la province d’Al-Hoceima. La culture du « kif » impliquerait plus de 96 000 familles, soit 800 000 personnes environ, qui vivent essentiellement des revenus tirés de la vente de leur production, achetée à bas prix par les narcotrafiquants qui tirent des profits très substantiels de la commercialisation sur les marchés européens où la demande est en croissance exponentielle ! Ces données et informations expliquent largement pourquoi des individus comme Chrif Bin Louidane obtiennent la complicité de hauts fonctionnaires. Au Maroc, « l’herbe pousse », certes, mais désormais les ripoux tombent !
Fahd Yata - La Nouvelle Tribune
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