Plainte du domestique marocain de Khadafi, le Maroc n’intervient pas

9 août 2008 - 15h12 - Monde - Ecrit par : L.A

Ils sont au cœur de la crise qui oppose la Suisse à la Libye, et constituent l’une des principales clés de la résolution du conflit. Ils, ce sont la mère et le frère du domestique marocain qui a porté plainte contre Hannibal Kadhafi pour mauvais traitements. La première était emprisonnée depuis le début de l’affaire, alors que le second se cachait pour éviter les représailles. Mais voilà : vendredi, l’avocat des domestiques annonçait que le frère est désormais lui aussi détenu.

Pour François Membrez, il est temps de hausser le ton : « La mère et le frère de mon client sont otages de la Libye ! » dénonce-t-il en usant pour la première fois de ce terme. Dans ces conditions, dit-il, pas question que ses clients envisagent un retrait des plaintes.

Appel aux Nations unies

L’avocat n’a pas l’intention de laisser la Suisse et la Libye négocier dans son dos : au contraire, il a décidé de mettre la pression. « Il est scandaleux que la Libye, membre du Conseil de sécurité de l’ONU, agisse ainsi. Normalement, ce sont les groupes terroristes et non les Etats qui utilisent des otages. J’ai fait appel aux Nations unies et au Haut-Commissariat aux droits de l’homme, qui compte un groupe de travail sur les détentions arbitraires », prévient-il. Car selon Me Membrez, ni le Maroc - « que j’ai alerté mais qui ne m’a jamais répondu » - ni la Suisse ne sont intervenus en faveur des « otages ».

Du côté du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), on ne commente pas ce point sensible. Le porte-parole, Jean-Philippe Jeannerat, affirme qu’il ne dispose d’aucune information officielle concernant les deux ressortissants marocains.

Un délicat bras de fer

On imagine difficilement la Suisse intervenir dans un contentieux qui concerne des ressortissants d’un Etat tiers, le Maroc. Lequel n’est sans doute pas resté insensible au sort de ses deux ressortissants, même s’il n’en fait pas étalage. De plus, Tripoli ne tolérerait pas que des diplomates helvètes se mêlent directement de ce volet de l’affaire. Même s’il ne peut pas échapper au DFAE que ce problème épineux est central pour la résolution de la crise.

Ce qui est sûr, c’est qu’un délicat bras de fer s’est engagé entre la Libye et les domestiques d’Hannibal Kadhafi. Si Tripoli n’a officiellement rien exigé contre la libération des deux Marocains, il est évident que la mère et le frère du plaignant constituent un précieux atout pour la Libye : en laissant planer un inquiétant silence sur ce point, Tripoli, qui exige que la Suisse s’excuse et qu’elle mette un terme aux poursuites contre Hannibal Kadhafi, entend sans doute contraindre les domestiques à retirer leurs plaintes. Reste à savoir si ces derniers, qui ont toujours fait savoir par la voix de Me Membrez qu’un abandon des poursuites est exclu tant que la mère et le frère ne sont pas libres, céderont les premiers. Ou s’ils tiendront bon.

Plus globalement, le DFAE a tenu à faire savoir vendredi qu’à aucun moment, Berne n’avait exercé de pressions sur les autorités genevoises, contrairement à ce que laissaient croire certaines rumeurs. « A aucun moment, des pressions ont été exercées sur qui que ce soit », affirme Jean-Philippe Jeannerat. Les échanges d’informations entre les deux autorités ont été « constants et confiants » depuis le début de la crise le 15 juillet. « La coopération a été excellente », assure-t-il. (LT)

Source : Le Temps - Cynthia Gani

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Sujets associés : Diplomatie - Suisse - Procès - Libye

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