Le ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports vient d’annoncer son plan de généralisation de l’enseignement de la langue amazighe dans tous les établissements du primaire d’ici à l’année 2029-2030.
Ils sont plus de 2 700 à étudier dans les grandes écoles françaises. C’est la première communauté étrangère dans le cercle fermé des hauts cadres en formation.
Ils prennent d’assaut les bureaux des étudiants et les junior entreprises.
Issus de différents milieux sociaux, ils veulent acquérir une expérience professionnelle avant de rentrer au Maroc.
Ils sont jeunes, intelligents et très ambitieux. Ils, ce sont plusieurs centaines de Marocains à avoir mis le cap sur la France pour effectuer ou poursuivre leurs études supérieures dans des grandes écoles prestigieuses : Polytechnique, Ponts et chaussées, Ecole supérieure des travaux publics (ESTP), Ecole supérieure des sciences économiques et commerciales (ESSEC), Ecole supérieure de commerce de Paris (ESCP-EAP), Hautes études commerciales (HEC) pour ne citer que celles-là. A Paris comme dans plusieurs autres villes françaises, Lyon, Toulouse et Bordeaux notamment, les Marocains « font fureur », selon l’expression de l’un d’eux. Nos aspirants ingénieurs et managers constituent de loin la première communauté étrangère parmi les étudiants des grandes écoles françaises.
Ils sont très actifs dans l’associatif
La Conférence des grandes écoles (organisme gouvernemental français), dans une étude rendue publique en juin 2005, fait état, pour l’année académique 2003-2004, de quelque 2 712 étudiants marocains dans les grandes écoles, sur un effectif total de plus de 25 000 étudiants étrangers, soit plus de 10 % du total. Les Marocains arrivent loin devant les Chinois, deuxième communauté de par le nombre, 1619 étudiants selon l’étude précitée. En troisième position arrivent les Allemands avec 1 600 étudiants. A l’ESCP-EAP, les Marocains sont près de 120 sur 1900 étudiants. A l’ESTP, ils sont une centaine sur un effectif de 1 800 étudiants. Autre exemple, l’une des écoles d’ingénieurs les plus prestigieuses, Polytechnique, réserve annuellement 10 à 15 places par promotion (environ 300 étudiants) pour les Marocains. Idem pour Centrale Paris, qui recrute chaque année une dizaine de Marocains.
Signe particulier de cette jeune diaspora marocaine en France : une activité extra-scolaire débordante. Beaucoup ont choisi le cadre associatif. L’incontournable AMGE-Caravane (Association des Marocains des grandes écoles) en fait partie. Cette structure, mise en place au début des années 1990, s’est fixé pour objectif l’accueil et l’accompagnement des nouveaux venus dans l’Hexagone. Suivi, conseil, orientation, ou tout simplement activités de détente sont au programme de cette structure qui compte près de 2 200 membres actifs. « Arriver en France est, pour la plupart des étudiants, une entreprise nouvelle qui comporte beaucoup de risques. C’est pour cela que nous tenons à accompagner tout nouvel étudiant dans les différentes démarches, administratives et académiques », explique Imad Bouziane, président jusqu’en septembre 2006 de l’AMGE-Caravane. Et de préciser qu’un soin particulier est accordé aux admissibles, ces jeunes « taupins » qui ont franchi les deux années de classes préparatoires et réussi aux écrits du concours français et qui débarquent en France pour les épreuves orales (voir encadré).
Un Marocain à la tête de la junior-entreprise de l’ESCP-EAP
Les jeunes étudiants qui évoluent dans ce microcosme sont également fiers d’une autre association, Maroc entrepreneurs, dont l’objectif, cette fois-ci, est de mettre en place des ponts entre les étudiants et lauréats et les entreprises au Maroc. Les activités des étudiants sont d’ailleurs très prisées par les grands patrons de banques, multinationales et autres institutions économiques installées au Maroc et à la recherche de hauts potentiels. Ces jeunes étudiants sont aussi très intéressés par l’entreprenariat privé, à travers l’organisation régulière de séminaires, débats et conférences.
Très dynamiques dans l’associatif, les étudiants marocains sont également actifs à l’intérieur même de leurs écoles. Ils n’hésitent pas à s’impliquer dans les activités internes proposées en parallèle de leur cursus universitaire.
C’est l’exemple de Mehdi Lebbar qui se trouve actuellement, pour une année, à la tête de la junior entreprise de l’ESCP-EAP, la célébrissime école de commerce parisienne. Sa liste de managers en herbe a remporté haut la main les élections de cette mini entreprise qui fait plusieurs centaines de milliers d’euros de chiffre d’affaires par an (350 000 euros - 3,8 MDH - en 2005). Son équipe et lui ont dû travailler plus de six mois pour convaincre le reste des étudiants de l’école qu’ils sont les meilleurs. « Entièrement dirigée par des étudiants, c’est un cabinet de conseil qui propose ses services aux entreprises françaises en prenant part aux appels d’offres qu’elles lancent. Il est géré comme une entreprise à part entière », explique Meryem Lahlou, étudiante en première année à l’ESCP-EAP et présidente du pôle qualité de la junior-entreprise. Une troisième marocaine fait également partie de cette aventure entreprenariale, se chargeant du pôle communication. L’entité, certifiée ISO 2000 depuis 2002, compte parmi ses clients de prestigieuses enseignes telles le groupe LVMH, Le Figaro...
Le campus de cette prestigieuse école de commerce parisienne, dont l’accès est réservé à une poignée d’étudiants ayant réussi avec brio les deux années de prépas, compte une autre organisation estudiantine, le Bureau des étudiants (BDE). Son accès très sélectif n’a pas découragé des Marocains d’y siéger. Là aussi, deux listes d’une vingtaine d’étudiants se disputent le sacre pendant près de six mois, période de campagne électorale ponctuée d’événements divers. Budget alloué à chaque liste électorale : 500 000 euros (5,5 MDH) environ, financés par des sponsors, entreprises françaises et internationales, qui n’hésitent pas à « mettre le paquet, non pour nos beaux yeux, mais pour des raisons de politique de recrutement et de gestion des ressources humaines », aux dires d’un étudiant.
ESSEC-Maroc, l’association qui fait découvrir le Maroc
A l’ESSEC, c’est un autre schéma qui a été retenu par les étudiants marocains. La création pure et simple d’une association baptisée « ESSEC-Maroc ». C’était en 1995. Actuellement, elle compte une soixantaine de membres et « se trouve être la plus active des 20 associations d’étrangers à l’école », explique Aïda Faivre Balafrej, étudiante en première année de cette école, classée première au concours des écoles de commerce l’année dernière. Entre vente de couscous, préparé par les étudiants SVP, organisation de soirées orientales ou encore de journées marocaines, les membres d’ESSEC Maroc ne chôment pas. Mais leur activité-phare, celle par laquelle ils sont connus dans le tout-Paris estudiantin, demeure l’organisation d’un voyage découverte du Maroc. « Chaque année, nous proposons à une quarantaine d’étudiants de l’ESSEC de partir au Maroc. Contre 600 euros, ils visitent notre beau pays, des grandes villes impériales aux petits douars du Haut-Atlas. Nous essayons de leur montrer le Maroc tel qu’il est, dans sa diversité et dans sa richesse, culturelle et sociale » , précise la jeune présidente dont la devise est : « aller au delà des clichés ». Mais elle tient à préciser que son association n’est nullement un club strictement réservé aux Marocains. « Nos relations avec les autres associations, dont ESSEC-Liban, sont excellentes. D’ailleurs, la vice-trésorière de l’association est française ».
Actifs certes sur le plan social et culturel, les étudiants marocains dans les grandes écoles françaises n’oublient pas pour autant leur objectif initial : réussir. « Je sais pourquoi je me trouve ici. Je sais également ce que je veux faire de ma vie à l’avenir. Et je suis conscient que mes études sont, comme pour la plupart de mes collègues, une priorité » , souligne Hani Guennioui, étudiant en première année à l’ESTP, son air affable cachant une détermination d’acier. Et c’est le cas de tous ceux qui ont la chance d’intégrer des établissements académiques aussi prestigieux. « Nombreux sont ceux d’entre nous qui viennent de milieux défavorisés. Certains ne sont même pas boursiers et pourtant font un énorme effort pour continuer leurs études ici. Pour eux, réussir est plus qu’un objectif à atteindre, c’est un devoir à remplir », souligne un jeune étudiant de Polytechnique. Imad Bouziane renchérit en mettant en exergue le caractère hétéroclite de la communauté des étudiants marocains. « Je connais des compatriotes qui ont un train de vie nécessitant plusieurs milliers d’euros par mois, et d’autres qui n’ont que les 4 500 DH de leur bourse pour se loger, se nourrir et subvenir à différents autres besoins ».
Beaucoup pensent créer leur entreprise une fois de retour au Maroc
Ceux que La Vie éco a interrogés à Paris sont unanimes. Après leurs études, et quelques années d’expérience professionnelle par la suite, ils veulent retourner au Maroc. « Je ne me vois pas passer le restant de ma vie en France », martèle Mohamed Amine Khalil. A leurs yeux, la vie en France n’est pas attractive, à plus d’un égard. « La situation économique n’est pas intéressante », souligne le président actuel de l’AMGE-Caravane. Meryem Lahlou abonde dans ce sens. « Ma famille, mes amis, mon milieu social et culturel me manquent beaucoup. C’est pour cela que j’envisage de rentrer au Maroc pour y faire ma carrière ». Alors que pour le jeune président de Maroc entrepreneurs, c’est le dynamisme que connaît actuellement le Maroc, tant sur le plan économique que politique, qui est derrière son désir de rentrer au bercail après ses études. « Créer ma propre affaire. Voilà mon objectif ». Un objectif que visent beaucoup d’autres parmi les 2 000 Marocains qui côtoient l’élite académique française, et constituent l’élite marocaine à venir.
Fadoua Ghannam - La Vie Economique
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