Souhaitée par les pouvoirs publics et par les notables musulmans pour mettre l’islam, deuxième religion de France, au niveau des autres cultes, cette instance tarde à voir le jour malgré deux ans de concertation engagée par le ministère de l’Intérieur, pour impliquer les quelque quatre à cinq millions de musulmans "de base". Ce chiffre communément avancé en se fondant sur les estimations des sociologues ne reflète pas la diversité des opinions et des attitudes dans ce qu’il est convenu d’appeler "la communauté musulmane", peu informée de ce qui se joue en son nom dans les interminables réunions au ministère.
Le mois de jeûne, auquel le Coran astreint chaque musulman en souvenir de la mission confiée par Dieu à son prophète Mahommet, doit commencer cette semaine, mercredi ou jeudi. Son début coïncide avec l’apparition de la nouvelle lune, laquelle, selon la tradition, doit être visible à l’oeil nu.
Une réunion de la COMOR (commission organisation constituée pour préparer les élections d’un conseil représentatif du culte musulman, CFCM) est prévue mardi et ses membres (représentants des fédérations et de grandes mosquées, personnalités qualifiées) sont convenus d’examiner à cette occasion "la possibilité de déclarer d’un commun accord la date de début du ramadan".
Mais sans attendre, quelques mosquées ont décidé de se réunir dès lundi soir dans une mosquée parisienne "pour fixer le premier jour du mois sacré". Outre la mosquée parisienne Omar, affiliée au mouvement piétiste fondamentaliste Foi et Pratique, l’appel émane de mosquées dissidentes de la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF, contrôlée par des Marocains) et d’une association récemment créée, la "coordination des musulmans" animée par un "laïque", Abderhamane Dahmane.
Même si elle est minoritaire, la constitution de cette alliance hétéroclite révèle les difficultés que l’équipe du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy rencontre pour faire aboutir la consultation sur l’islam engagée par ses prédecesseurs.
Après avoir, sur les instances de la grande mosquée de Paris, retardé l’élection du CFCM par les représentants des mosquées, le ministre de l’Intérieur, en fonction depuis six mois, a souhaité amender le projet mis au point par la COMOR sous la responsabilité de son prédécesseur socialiste Daniel Vaillant.
Dans le but affiché d’empêcher la victoire du fondamentalisme, il a proposé notamment que les représentants musulmans soient pour partie seulement élus et pour partie cooptés. Ce faisant, il n’a rassuré qu’à moitié le recteur de la mosquée de Paris, qui répugne toujours à partager la représentativité de l’islam, et a mécontenté ceux qui espéraient rafler la mise aux élections.
Parmi eux, l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), qui avait non sans mal convaincu sa base de jouer le jeu démocratique, et la FNMF, en perte de vitesse, mais qui était parvenue à monter partout des listes régionales en faisant alliance avec des mosquées indépendantes.
Répondant à l’insistance du ministre qui souhaite boucler l’affaire avant la fin de l’année, la COMOR a certes décidé de se réunir régulièrement, même pendant le ramadan. Mais de ces réunions émane, pour les observateurs, une lancinante impression de sur-place.
Source : AFP