Les amis du Maroc en Espagne fichés par un journal fasciste

18 août 2005 - 16h23 - Espagne - Ecrit par :

Le Maroc n’aurait pas droit à l’amitié des Espagnols. C’est, en tous les cas, le message que véhiculent les extrémistes de la droite espagnole, dont l’un des supports médiatiques, "MinutoDigital", un torchon électronique qui a publié une liste noire des "Espagnols, amis du Maroc".

Ce soi-disant journal "d’information sans complexes" n’est pas à sa première sortie aux relents fascistes, il ne cesse de distiller, lui et ses coreligionnaires "Libertad Digital" et "El Semanal Digital" (NDLR, un mal qui gangrène le monde digital), toutes sortes de messages haineux, souvent racistes, à l’endroit du Maroc, de son peuple et de ses institutions.

"Elles sont nombreuses, les personnalités espagnoles qui peuvent être considérées comme amies et admiratrices du Maroc : politiciens, entrepreneurs, universitaires, journalistes", dénonce le journal qui nous apprend pour la première fois qu’il y a en Espagne des journalistes amis du Maroc !! On aurait aimé que les "illuminés digitaux" nous fournissent les noms de quelques plumes journalistiques "amies" du Maroc. Mais la liste noire, digne des périodes les plus fascistes de l’histoire de l’Europe, ne nous a pas gratifiés de ces noms "amis".

Les personnalités excommuniées par cette communauté digitale "sont nombreuses dans les régions proches du Maroc, l’Andalousie et les Canaries mais certaines sont aussi au pouvoir central", avertit le journal comme s’il craignait qu’un jour ces régions ne déclarent allégeance au "Sultan de los moros".

La majorité des personnalités fichées sont des politiques de gauche, dont la tête d’affiche est bien évidemment l’ancien Premier ministre socialiste Felipe Gonzalez, taxé par les ultras de la droite espagnole d’"ami de los moros". L’unique tort de toutes ces personnalités, c’est d’avoir la conviction que ces deux grandes nations sont appelées à s’entendre et à surmonter leurs différends.

Jetons un coup d’oeil sur l’acte d’accusation de certains suspects, voire coupables aux yeux des adeptes de la néo-inquisition.

Felipe Gonzalez : "L’ex-président (du gouvernement) socialiste a participé à la délégation marocaine qui a tenté d’obtenir de la FIFA l’organisation du Mondial de football de 2010. Il a aussi présenté au sultan Mohammed VI, son patron, le multimilliardaire mexicain Carlos Slim". Quelle malchance, quel malheur que le ridicule ne tue pas !

Juan Goytisolo : "L’écrivain espagnol vit à Marrakech. Anti-franquiste et critique envers le traitement réservé aux immigrants marocains en Espagne et en Europe, il ne dit rien sur le caractère tyrannique du régime marocain, ni sur l’invasion du Sahara. Il n’a pas non plus condamné la persécution des dissidents, ni la répression des Rifains". Des inquisiteurs qui s’érigent en humanistes et en défenseurs des droits de l’Homme. Là, ça dépasse le ridicule.

Jordi Pujol : "La Generalitad catalana (gouvernement autonome catalan, NDLR) a ouvert sous son mandat une délégation à Casablanca, le principal centre économique du Royaume. Il y a quelques années, il a nommé à la tête de cet organisme l’ex-dirigeant Esquerra Republicana de Catalu-a (ERC, Gauche républicaine) Angel Colom". Un homme intelligent qui a compris il y a plus de 25 ans que le facteur économique peut venir à bout de tous les autres différends entre l’Espagne et le Maroc.

José Miguel Zaldo Santamaria : "Le président du Comité d’affaires hispano-marocain du patronat CEOE (Confédération espagnole des organisations d’entreprises) et membre du Comité Averroès soutient que le Maroc est en train de se moderniser et que l’Espagne se doit de l’appuyer. En 2002, il a critiqué la +vision véhiculée par certains médias sur le Maroc+ et qui ne correspond pas, selon lui, à la réalité".

Ce dynamique homme d’affaires basque est à leurs yeux coupable de tentative de jeter les bases d’un partenariat stratégique entre les deux pays, plus fort et plus solide que les aléas de la politique. Il est coupable d’avoir une vision objective et impartiale, plus juste avec le Maroc. Il devrait alors être excommunié pour ce crime impardonnable.

José Solis, avocat et ancien ministre sous Franco, Jeronimo Saavedra, ancien ministre socialiste, Maximo Cajal, diplomate de gauche et d’autres hommes d’Etat sont accusés, aux côtés des "musulmans espagnols", d’être des "amis du Maroc". Un jour, les néo-inquisiteurs demanderont peut-être à ce que ce "crime" tombe sous le coup du code pénal espagnol.

Tarik Mazigh - Libération

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Espagne - Racisme - Presse

Aller plus loin

Un journal espagnol condamné pour avoir diffamé une société marocaine

Le journal espagnol El Mundo a été condamné par le tribunal de Barcelone à payer 1 euro symbolique pour avoir accusé dans une publication une société marocaine de servir de «...

Ces articles devraient vous intéresser :

Violences policières : la France sermonnée par l’ONU

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, l’organe affilié aux Nations unies, exprimé sa « profonde préoccupation » concernant les pratiques des forces de police en France vis-à-vis des minorités. Cette inquiétude fait suite au décès...

Médecins maghrébins en France : l’exil comme solution ?

Après une percée au premier tour des législatives françaises, la perspective de voir le Rassemblement national (RN) présidé par Jordan Bardella, qui place l’immigration au cœur de la campagne électorale, remporter la majorité absolue le 7 juillet,...

Agression sauvage d’une femme voilée dans un magasin LiDL à Marignane

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) réagit à « l’agression raciste et antimusulmane dont a été victime une femme de 42 ans en situation de handicap, portant un voile et récemment affaiblie par un traitement de chimiothérapie. » L’organisation...

France : le port du voile, un frein majeur à l’emploi

Une étude de l’Observatoire national des discriminations et de l’égalité dans le Supérieur (Ondes), parue cette semaine, met en évidence un obstacle majeur à l’emploi en France : le port du voile.

Christophe Galtier : garde à vue pour discrimination raciale

L’ex-entraîneur de l’OGC Nice, Christophe Galtier, ainsi que son fils, John Valovic-Galtier, ont été placés en garde à vue ce vendredi dans le cadre d’une enquête portant sur des allégations de discrimination au sein du club.

Université Paris-Dauphine : propos racistes envers une étudiante voilée

Une étudiante voilée a été victime de propos racistes de la part d’une intervenante du jury lors d’une soutenance de fin d’année à l’Université Paris-Dauphine.

Islam en France : le coup de gueule de Malik Bentalha

L’humoriste Malik Bentalha a exprimé son inquiétude grandissante quant à la situation des musulmans en France.

Agression de MRE en Europe : le parlement marocain interpellé

Un parlementaire du parti de l’Istiqlal vient d’appeler Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération africaine, à agir pour combattre les attaques racistes répétées ciblant les Marocains résidant à l’étranger (MRE).

Tollé après la caricature du roi Mohammed VI par Charlie Hebdo

Le Conseil National de la Presse (CNP) a fermement condamné ce qu’il qualifie d’«  acte criminel odieux » du journal français Charlie Hebdo, l’accusant de s’attaquer directement au Roi Mohammed VI.

Une journaliste franco-marocaine conteste l’interdiction du hijab sur la carte de presse en France

La journaliste franco-marocaine Manal Fkihi a annoncé son intention de contester la règle interdisant aux femmes voilées de porter le hijab sur la photo de la carte de presse française. Cette décision fait suite au refus de la Commission de délivrance...