Marocains au Canada : fortunes diverses au grand Nord

1er juin 2009 - 17h59 - Monde - Ecrit par : L.A

Depuis un peu plus d’une trentaine d’années, le Canada, et particulièrement le Québec, est un véritable Eldorado pour cadres, universitaires ou professionnels marocains ayant une solide expérience. Pour ces Marocains d’outre-Atlantique, les fortunes sont diverses.

A en croire les registres du consulat du Maroc à Montréal, on compte près de 50.000 ressortissants marocains dans l’Empire du blé et du bois, notamment au Québec qui s’accapare près de 90% du total. Cet engouement spectaculaire pour cette région, considérée parmi les bastions de la francophonie, s’explique par la langue et la présence massive de la communauté marocaine, ce qui stimule l’effet d’entraînement. Dans les faits, quelle évaluation pourrions-nous faire de l’intégration de ces Marocains établis de l’autre côté de l’Atlantique ?

Globalement, la déception est au rendez-vous, puisque le nouvel environnement n’a aucun rapport avec les documents potassés lors de la procédure d’immigration. Les statistiques promettant un emploi conforme à la nature des diplômes et compétences sont d’emblée démenties par la réalité sur le terrain. Dans le cas de certaines professions libérales régies par des ordres professionnels comme la médecine, l’architecture, le droit, le journalisme, la pharmacie…il existe une fort étonnante disparité entre la politique officielle d’immigration initiée par le gouvernement fédéral et les normes de ces collèges professionnels.

Ainsi, lorsque les responsables des services d’immigration et des représentations diplomatiques canadiennes sélectionnent les candidats sur la base de leurs compétences, ils omettent de préciser que ces critères obéissent exclusivement aux besoins du pays, et non pas aux normes des ordres professionnels.


Déception

Une nuance d’une importance cruciale puisque ce sont ces derniers qui accordent l’autorisation d’exercer et non pas le gouvernement qui se désengage de toute responsabilité en cas de recours ou de protestation. La reconnaissance du diplôme par l’instance régissant la profession passe par une période de mise à niveau rarement inférieure à deux ans. Histoire de s’aligner sur les normes locales. Autre problème : Même en cas de reconnaissance des qualifications acquises dans le pays d’origine, les Maghrébins figurent généralement en queue du peloton des minorités les plus demandées sur le marché de l’emploi. Trop souvent, le choix est vite fait entre un CV présenté par un “Réjean Tremblay”, né à Mont-Laurier et un autre soumis par “Mohammed X”, né à Khémisset. Les Marocains du Québec en savent quelque chose.

Ces complications bureaucratiques infligées par les ordres professionnels poussent un nombre appréciable de médecins, d’enseignants, d’architectes ou d’ingénieurs à tenter ailleurs leur chance au Canada, notamment en Ontario ou dans la riche province de l’Alberta, où les procédures sont plus souples et où le profilage racial demeure assez marginal.

Profilage

Le sentiment de frustration ressenti par nombre de nos ressortissants ne signifie pas pour autant que l’échec est généralisé. Globalement, les plus chanceux sont ceux qui ont décidé de s’établir au Québec depuis plus d’une vingtaine d’années, époque de souplesse administrative et d’intégration facile. C’est ce qui explique l’ascension fulgurante de certains comme Fatima Houda Pépin, originaire de Meknès, première vice-présidente de l’Assemblée nationale du Québec et décorée de la Légion d’Honneur ; de Saïd Chergui, ancien président de la Fédération des Marocains du Canada, fondateur de Zinda Foods, à Candiac dans la banlieue montréalaise, premier distributeur de couscous et produits dérivés au Canada et l’un des premiers en Amérique du Nord. D’ailleurs, Tria est sa dénomination marocain.

On peut également citer Andaloussi Jawad, ancien champion d’Afrique 1976 de football avec la fameuse sélection des Faras, Acila, Hazzaz et les autres. Arrivé muni d’un simple visa touristique, il est aujourd’hui un entraîneur et un formateur connu partout au Canada alors qu’il n’a jamais songé à s’établir pour de bon dans ce pays. Bien d’autres cas dans cette catégorie méritent d’être mentionnés, mais, arrivés plus récemment comme Abderrahim Khouibaba, fondateur de Maghreb-Observateur, Abdelghani Dadès, ancien rédacteur en chef de La Vie Economique, aujourd’hui éditeur du groupe Atlas-Média ou encore Aziz Saadallah et Khadija Assad, animateurs, organisateurs et producteurs de spectacles au Québec et qui sont rentrés définitivement au Maroc au terme d’un séjour de quatre ans. Les cas de réussite sont suffisamment nombreux pour briser la norme, mais il importe de commencer sur des bases solides, et surtout, d’avoir un carnet d’adresses des plus étoffés. Ce qui permet d’ouvrir bien des portes dans un environnement peu enclin à accorder une chance à la communauté maghrébine.

Figures

Concernant la communauté juive marocaine du Canada, la première vague d’immigration digne de ce nom remonte aux années quarante, soit bien avant la communauté musulmane. Solidaires, intégrés et très attachés au Maroc, les Juifs marocains du Québec comptent désormais des représentants de la quatrième génération et leur succès transparaît dans des domaines sensibles comme les centres d’appel, le textile ou la joaillerie. Elle compte également des figures célèbres comme le Safiot Salomon Amzallag, dit Sami el-Maghribi, décédé en 2008 et considéré parmi les monuments de la musique andalouse ; Joseph Gabbay, mathématicien de renom et ancien président de la communauté sépharade du Québec, Yaacov Raphaël Hacohen, souiri, personnage du XVIIIème siècle, rabbin de la communauté hispano-portugaise de Montréal et probablement l’un des tous premiers Marocains à s’être établi au Canada ; l’homme d’affaires Elias Malka, le rabbin Moïse Ohanna…Une particularité : Les Juifs marocains du Canada constituent un groupe soudé et qui s’intègre plus facilement grâce à la solidarité entre coreligionnaires.

Source : Maroc Hebdo - Ismaïl Harakat

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