Parti du Maroc, il flotte plus de 40 heures avant d’être repêché en Espagne

23 septembre 2025 - 10h00 - Espagne - Ecrit par : S.A

De la côte Fnideq, au Maroc, Rafie Nadi, un jeune égyptien de 23 ans, s’est embarqué dans un voyage périlleux pour rejoindre l’Europe à la nage, en compagnie d’un ami. Pendant plus de 40 heures, il a flotté en Méditerranée, porté seulement par une bouée et des palmes et a frôlé la mort.

L’aventure commence en 2020. Rafie Nadi quitte sa ville natale de Minya, sur la rive ouest du Nil (Égypte), abandonne son rêve d’étudier la médecine pour trouver un emploi en Europe, lequel lui permettrait de subvenir aux besoins de ses parents et de ses huit jeunes frères et sœurs. Il arrive au Maroc. Un jour, il décide de quitter la côte Fnideq (Maroc) pour rejoindre l’Europe à la nage et revoir sa mère. Il embarque un ami de 17 ans dans ce voyage périlleux à la mi-juillet 2025. Ensemble, ils devaient nager jusqu’à l’enclave espagnole de Ceuta. Après quatre tentatives infructueuses pour franchir la clôture frontalière de Ceuta, Nadi et son ami avaient conçu un plan alternatif, réunissant des fonds pour acheter des combinaisons, des bouées gonflables et des palmes. Selon eux, c’était la meilleure option, étant donné que chacun d’eux n’avait pas 3 000 ou 4 000 € à remettre aux passeurs pour la traversée vers l’Europe.

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Après des semaines d’entraînement, des heures d’affilée dans la mer, Nadi et son ami échappent à la vigilance des soldats présents sur la plage, se jettent à l’eau et commencent à nager. Mais les choses ne se passent pas comme prévu. Alors que les prévisions annonçaient une mer calme, les vagues étaient hautes, les repoussant et les entraînant plus profondément en Méditerranée. La mer sépare les deux amis. Nadi exprimait, dans un premier temps, de la peur avant de commencer à scruter l’horizon, ne voyant que des kilomètres d’eau et aucune terre en vue. Il s’est laissé porter par les courants, économisant son énergie pour pouvoir agiter frénétiquement les bras devant tout navire qu’il croiserait. Perdu et épuisé après deux nuits et une autre journée entière en mer, il a aperçu un bateau se dirigeant vers lui.

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Après plus de 40 heures en Méditerranée, porté seulement par une bouée et des palmes, une famille sauve in extremis la vie de Nadi. « J’ai commencé à agiter les bras. […] J’ai commencé à nager vers eux, ils m’ont jeté une corde et je l’ai attrapée. Ils m’ont hissé, m’ont donné de la nourriture, de l’eau et des vêtements », raconte-t-il au Guardian. Ceux à bord du yacht l’avaient trouvé à environ 25 km au sud de la ville espagnole de Benalmádena, sur la Costa del Sol. Il aurait dérivé sur plus de 100 km depuis son point de départ. À ce moment-là, Nadi n’était plus sûr de pouvoir tenir encore longtemps. « Si cela n’avait pas été pour ce bateau, je ne sais pas si j’aurais pu continuer à nager, a-t-il dit, la voix chargée d’émotion. Je suis tellement reconnaissant envers la famille qui m’a sauvé. »

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La famille a été rejointe en mer par un navire des services de sauvetage maritime. Elle a remis Nadi à la police et à la Croix-Rouge. Peu après, les membres de la Croix-Rouge lui ont annoncé que son ami avait également été retrouvé, sain et sauf, au large de la côte près de Málaga. Nadi et son ami ont finalement rejoint l’Espagne. Il évoque les sentiments qui l’animait en mer. « J’étais terrifié à l’idée de mourir en mer. J’espérais que Dieu me sauverait ou que je trouverais un bateau assez proche pour qu’il me porte secours, raconte Nadi. Je pensais à ma mère, que je n’avais pas vue depuis cinq ans, et au fait que je voulais la revoir avant de mourir. J’ai prié Dieu de ne pas me laisser mourir afin que ma mère ne souffre pas. Ma famille savait que j’avais essayé de franchir le mur, mais je ne leur avais pas parlé de mon projet de nager. »

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Après deux semaines passées dans un camp géré par la Croix-Rouge, le jeune égyptien a été relâché en raison de l’absence d’accord de rapatriement entre l’Espagne et l’Égypte. En vertu du droit international, il a le droit de demander l’asile, une procédure qui peut durer des années en Espagne. Il commence une nouvelle vie dans la péninsule ibérique, mais il est difficile de se faire une place au soleil. « Je pensais que je commencerais à travailler dès mon arrivée en Espagne, mais la réalité est différente. J’ai découvert que cette situation en Europe ne valait pas toutes ces souffrances. Si tu as des papiers, oui, mais sans papiers, c’est très difficile, se morfond Nadi. Je ne sais pas quand j’aurai des papiers – mais je veux chercher un travail, n’importe lequel. »

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