RSF condamne l’incarcération de Anas Tadili

4 octobre 2004 - 11h59 - Maroc - Ecrit par :

Reporters sans frontières dénonce le verdict de la Cour d’appel de Rabat qui a condamné, le 29 septembre 2004, le journaliste Anas Tadili à un an de prison ferme et 10 000 dirhams d’amende (environ 900 euros) pour « diffamation » à l’encontre d’un ministre.

Déjà condamné et incarcéré dans le cadre d’une affaire de droit commun, le directeur de l’hebdomadaire Akhbar al-Ousbouaâ purge aujourd’hui ses peines à la maison centrale de Kénitra (au nord de Rabat). D’après sa famille et son avocat, il est détenu dans le quartier des condamnés à mort.

« Notre dénonçons fermement le recours à des peines d’emprisonnement dans des affaires de diffamation et demandons aux autorités marocaines une réforme du code pénal afin de supprimer les peines de prison pour des délits de presse », a déclaré Reporters sans frontières. « Nous rappelons que les Nations unies ont demandé "à tous les gouvernements de veiller à ce que les délits de presse ne soient plus passibles de peines d’emprisonnement, sauf pour des délits tels que les commentaires racistes ou discriminatoires ou les appels à la violence".

D’autres sanctions existent, plus respectueuses de la liberté de la presse, comme le versement d’une amende au montant raisonnable et/ou de réparations à tout individu estimant avoir été diffamé. Dans le cas d’Anas Tadili, une peine aussi lourde et l’incarcération dans une prison de haute sécurité nous paraissent totalement disproportionnées par rapport à l’offense commise. »
Anas Tadili est poursuivi pour avoir affirmé, le 9 avril, où il affirmait qu’un ministre marocain en exercice - dont le nom n’était pas cité mais qui était clairement identifiable dans le contexte de l’article - avait été surpris par la police alors qu’il entretenait des rapports homosexuels dans une station balnéaire au nord du Maroc.
« Même si au regard de la culture musulmane, traiter quelqu’un d’homosexuel est très grave, rien ne saurait justifier un an de prison ferme pour une telle injure.

Je crois que ce qui a compté devant la cour c’est que M. Oualalou est ministre en fonction et a été professeur au Collège royal », a déclaré par téléphone Maître Ziane, l’avocat d’Anas Tadili, à Reporters sans frontières.
Quelques jours après la publication de cet article intitulé « Homosexualité et classe politique au Maroc », Anas Tadili, avait été incarcéré, le 15 avril, officiellement pour une affaire de droit commun vieille de dix ans. Compte tenu de l’impossibilité du journaliste de s’acquitter immédiatement d’une amende de 3 millions de dirhams (environ 270 000 euros), une mesure de contrainte par corps avait été prononcée.
Visé à mots couverts, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Privatisation, Fathallah Oualalou, a demandé au Premier ministre, Driss Jettou, de porter plainte en son nom pour dénonciation calomnieuse. Le Premier ministre est habilité à engager des poursuites lorsqu’il s’agit d’atteinte à l’honneur d’un membre du gouvernement.
Le 1er juin, Anas Tadili avait été condamné à six mois de prison. Une dizaine d’autres plaintes ont été déposées contre le journaliste et sont en cours d’instruction.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Presse - Liberté d’expression - Reporters sans frontières (RSF) - Censure - Prison

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : Ahmed Assid dénonce la répression des voix d’opposition par l’astuce des mœurs

Dans un podcast, l’universitaire et activiste amazigh Ahmed Assid s’est prononcé sur plusieurs sujets dont la répression des voix contestataires au Maroc, la liberté d’expression ou encore la laïcité.

Le Magazine Marianne censuré au Maroc

L’hebdomadaire français Marianne (numéro 1407) a été interdit de distribution au Maroc, en raison d’un dessin caricatural jugé offensant pour le prophète Mohammad.

Le film « Zanka Contact » contraint de supprimer une chanson d’une pro-Polisario

Suite à l’interdiction de diffusion « au niveau national et international » du film Zanka Contact, les producteurs se sont pliés aux exigences de l’organe régulateur, annonçant la suppression de la musique à polémique.

Tollé après la caricature du roi Mohammed VI par Charlie Hebdo

Le Conseil National de la Presse (CNP) a fermement condamné ce qu’il qualifie d’«  acte criminel odieux » du journal français Charlie Hebdo, l’accusant de s’attaquer directement au Roi Mohammed VI.