Démantèlement douanier : Le Maroc jouera-t-il le jeu ?

7 juin 2009 - 15h16 - Economie - Ecrit par :

L’année 2010 revêt pour le commerce international une importance cruciale. Elle devrait marquer la libre circulation des biens et des marchandises au sein des pays ayant signé les accords de l’OMC. Qu’en sera-t-il au Maroc au niveau des véhicules usagés ?

Au Maroc, le marché des véhicules d’occasion à l’horizon 2010 devrait en principe être concerné par la levée des restrictions douanières, ce qui est susceptible d’engendrer un manque à gagner considérable. Il faut dire que les droits de douane sont extrêmement élevés et dépassent souvent, et de loin, le prix d’achat du véhicule en Europe. Le site internet de l’administration des douanes fournit suffisamment d’éléments pour éclairer la lanterne des personnes intéressées.

Les éléments contenus dans le site internet de l’administration des douanes sont édifiants et en disent long sur la réalité des prix actuels. Cependant, les chiffres en question suscitent davantage de question qu’ils ne satisfont la curiosité du visiteur virtuel.

Coût

Voici quelques exemples concernant les droits et taxes à payer. Une Peugeot 106 1.2 de treize ans d’ancienneté “vaut” 33.867 dirhams en frais de dédouanement selon les critères de cette administration. Un véhicule de cette catégorie et de cet âge coûte rarement dans un pays comme la France ou la Belgique plus de 1.000 euros, ce qui signifie que le dédouanement au Maroc vaut plus que le triple du prix d’achat. Autre exemple : Pour une Renault Megane 1.4 essence, immatriculée en 2000, c’est 62.000 dirhams qu’il faut débourser, c’est à dire toujours de l’ordre du triple par rapport au prix d’achat. Pour un véhicule d’un certain standing, disons une Mercedes CLK 240 Coupé datant de 2004, c’est 135.190 dirhams en dédouanement, ce qui correspond carrément à un véhicule neuf de standing moyen comme une Peugeot 206 ou une Renault Symbol.

Ces chiffres hallucinants donnent matière à réflexion, mais une question se pose. Qu’adviendra-t-il de cette vache à lait une fois que la levée des droits de douane entrera en vigueur ? Devant les difficultés à obtenir des informations auprès de l’administration concernée, nous avons dû nous rabattre sur des rumeurs provenant de sources plus ou moins crédibles. Il ressort ainsi que l’entrée en vigueur de la levée des frais de douane par le Maroc concernant les véhicules d’occasion risque d’accuser un retard de quelques années. Si cela devait se confirmer, ce serait du pain bénit pour l’escarcelle de l’Etat car cela supposerait quelques milliards de plus en attendant la fin de la récréation.

Retard

Comment expliquer des frais de dédouanement aussi exorbitants ? Notre source soutient qu’ils sont justifiés par le souci des autorités marocaines de se débarrasser de l’image peu élogieuse de “ferraille” des véhicules européens et d’encourager le montage local, ce qui suppose main d’œuvre marocaine et dynamique créée localement. Et pour faire plus “tendance”, on peut même avancer que le neuf débarrasse le Maroc d’une bonne dose de pollution qui peut rendre l’air irrespirable dans nos villes. Autant d’arguments qui font que non seulement les droits de douane au Maroc sont prohibitifs, mais en plus un véhicule dédouané implique souvent une puissance fiscale supérieure. Ce qui complique la vente du véhicule puisque l’acheteur marocain songe d’office à la facilité de revendre sa voiture avant de l’acheter. Or, avec une puissance fiscale de 8 CV pour une petite voiture, l’acquéreur potentiel se désintéresse de l’affaire. Tout les moyens sont donc bons pour mettre les bâtons dans les roues des véhicules importés, et qui s’ajoutent à une procédure fastidieuse en termes de paperasse. De quoi vous faire souvent passer l’envie d’acquérir un véhicule importé.

Astuces

Mais qu’adviendra-t-il de ces mesures le jour où le Maroc jouera le jeu de la libre circulation des biens et des marchandises ? La question mérite d’être posée car l’incidence sur les prix des voitures d’occasion risque d’être considérable. Et c’est tant mieux pour l’acheteur. Au Maroc, c’est connu, le prix des véhicules usagés est exorbitant, ce qui inclut les voitures montées localement et celles importées. Certains de MRE rentrés définitivement au pays ont entre-temps trouvé une astuce pour profiter au maximum de leur voiture sans passer à la caisse. Comme ils ont droit à six mois de circulation renouvelables une fois, ils transfèrent leur voiture au bout d’une année à leur épouse, par exemple, qui à son tour l’utilise une année avant de trouver une autre astuce ou de brader le véhicule, largement amorti entre-temps.

Une fois les frais de douane levés, on risque d’assister à une dégringolade vertigineuse des prix puisque les taxes imposées aux véhicules importés contribuent à la flambée du marché de l’occasion dans son ensemble. Sans parler de l’incidence d’une telle baisse sur les revenus de milliers de personnes qui se sont érigées en intermédiaires pour arrondir leurs fins de mois. Tout un marché menacé de déchéance à un moment où internet permet à l’acheteur et au vendeur de se mettre directement en contact sans passer par des individus pas toujours recommandables.

Source : Ismaïl Harakat - Maroc Hebdo international

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