La compétition RAM/Air France se durcit en Afrique

8 décembre 2007 - 01h12 - Economie - Ecrit par : L.A

Le congrès de la Fédération des agences de voyages de l’Afrique de l’Ouest et du centre, qui s’est tenu cette semaine à Fès, a été une nouvelle illustration de la guerre sans merci que se livrent les compagnies aériennes afin de capter le trafic intercontinental au départ des villes africaines.

La conjoncture économique est porteuse, assure Mourad Kannabi, directeur des réseaux Afrique et Long Courrier de Royal Air Maroc. La hausse des cours du pétrole et la reprise de la croissance entretiennent forcément la demande des voyages. Par ailleurs, les gigantesques missions de paix de l’Onu dans certains pays est une clientèle sûre. C’est maintenant qu’il faut assurer une consolidation sur ces marchés afin d’être là au moment du décollage, explique le manager de Royal Air Maroc.

Même les majors américaines, jadis réticentes à s’engager sur le continent, se sont positionnées. Delta Air Lines exploite des liaisons sur Dakar, un des points d’entrée de Royal Air Maroc sur l’Afrique subsaharienne. Dans le radar du partenaire du groupe Air France/KLM dans Skyteam, la diaspora sénégalaise, mais aussi celle des pays voisins établie aux Etats-Unis. Avec beaucoup d’habileté, la compagnie avait déjà ouvert une desserte sur Malabo (Guinée équatoriale) pour « faciliter » les déplacements des cadres des groupes pétroliers vers ce petit pays pétrolier d’Afrique centrale, frontalier du Gabon.

Royal Air Maroc, qui accélère les ouvertures de lignes vers le continent, entend s’appuyer sur les voyagistes africains pour tailler les croupières à Air France, leader historique dans la région : Freetown depuis juin dernier, Monrovia (Libéria) le 16 décembre, Kinshasa, Lagos et, probablement, Kanu et Banjul (Gambie) en mars 2008. Et l’Afrique du Sud ? « Pour l’instant, nous n’avons pas de machine (avion) adapté à cette destination », justifie le directeur réseau Afrique et Long Courrier de RAM. Il va falloir peut-être attendre l’arrivée des Boeing 787. S’il n’apparaît pas en premier, le facteur politique est aussi une variable qui pèse dans son poids pour l’Afrique du Sud.

Le coup d’accélérateur sur le continent africain est perceptible. L’objectif est d’atteindre la barre du million des passagers dans un an en visant essentiellement le trafic de sixième liberté (la clientèle en continuation sur l’Europe et l’Amérique du Nord notamment).

Pour la compagnie, l’Afrique subsaharienne a atteint un poids économique stratégique. Elle représente 20% du chiffre d’affaires (autour d’un milliard de dirhams) et la totalité des liaisons sont rentables depuis cette année, confirme Mourad Kannabi. Les principaux indicateurs d’exploitation sur ce réseau sont au vert : chiffre d’affaires, coefficient de remplissage et, surtout, recette unitaire, cruciale pour la profitabilité.

Cette réorientation de l’activité vers le continent permet au transporteur marocain de supporter sans trop de dégâts (pour l’instant), le choc de l’érosion des marges sur ses liaisons avec les métropoles européennes. Comme ses consoeurs internationales, Royal Air Maroc est sous la pression des compagnies à bas prix, Easyjet et Ryanair notamment, qui alignent une puissance de feu phénoménale.

Tout le commando des représentants de RAM en Afrique était présent à Fès en marge du congrès des voyagistes du continent. Du Bénin à Brazzaville en passant par Douala, chacun s’est vu fixer une feuille de route ainsi que les objectifs. Dans sa conquête africaine, la compagnie marocaine adopte une politique habile envers le réseau de distribution. C’est ainsi qu’elle y a maintenu la formule de rémunération fondée sur la commission sur ventes, formule abandonnée sur ses propres terres depuis deux ans. Elle concède par ailleurs aux agents de voyage un taux de 9% sur les ventes, tandis que la concurrence a réduit la commission à 7%. Ce qui lui vaut une certaine sympathie dans la profession.

Cela s’est encore vérifié à Fès au dernier congrès des voyagistes africains. Devant un auditoire ébahi, le président de la Fédération des agences de voyages de l’Afrique centrale et de l’Ouest (Fisavet), le prince Emmanuel Ngassa Happi, a déclenché une violente attaque contre Air France qui serait sur le point d’appliquer la commission zéro aux agences de voyages dans la région. « Les compagnies aériennes se trompent, elles doivent savoir que nous avons les moyens de représailles », lance le président de la Fisavet. Présent dans la salle, le représentant d’Air France pour l’Afrique encaisse sans broncher. A la tribune, les responsables de Royal Air Maroc se frottent les mains. Ce sera au tour de l’IATA (association internationale des transporteurs aériens) d’en prendre pour son grade : « Notre fédération ne sera jamais à la merci de l’IATA, encore moins à sa solde ».

Marketing tropicalisé

Les compagnies aériennes ont été obligées de « tropicaliser » leur marketing sur le continent afin de s’adapter aux habitudes de la clientèle. Sur la franchise bagage par exemple, la plupart concède au minimum 40 kilos par passager (la norme IATA est de 20 kilos) et ferme souvent les yeux sur quelques kilos de plus. Brussels Airlines, Air France, RAM et les autres adoptent une certaine flexibilité sur les bagages. En général, les passagers voyagent avec de gros paquets, en plus de valises pleines d’effets personnels. Royal Air Maroc étudie d’ailleurs l’éventualité de programmer de gros modules sur certaines liaisons.

Autre évolution récente : la réintroduction de la classe business dans toutes les compagnies. En effet, il s’est avéré que le voyage était aussi lié à des considérations de prestige, confie un voyagiste basé à Abidjan. Sur un Abidjan-Paris par exemple, un chef d’entreprise exigera systématiquement la business class afin de ne pas être aperçu par ses clients en classe économique. En dessous, ça fait un peu désordre. Par exemple, lorsqu’un patron de PME sait qu’un ministre de tutelle est dans un vol, il insistera pour voyager en business.

L’Economiste - Abashi Shamamba

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