37 milliards de DH pour traquer les déchets

25 décembre 2007 - 19h38 - Maroc - Ecrit par : L.A

Enfin un plan contre les sacs plastique au Maroc. Ces sacs, totalement inesthétiques et polluants, jonchant le sol et qui atterrissent au fin fond des campagnes, sont désormais traqués. L’annonce en a été faite la semaine dernière par le secrétaire d’Etat chargé de l’eau et de l’environnement, Abdelkébir Zahoud. Il s’agit d’un plan d’amélioration de la gestion des sacs en plastique, élaboré dans le cadre de la stratégie d’action pour la protection de la Méditerranée.

Et ce en partenariat avec l’Agence française de développement. Il comprend le recyclage du plastique dégradable, le renforcement du cadre juridique de la gestion des déchets, et même une taxe écologique sur l’emballage en matière plastique. Le projet, qui est encore au stade de la conception et qui associe les Collectivités locales, prévoit aussi des actions de sensibilisation et de promotion de la « culture de l’environnement » auprès des populations. Ceci dans le but de les inciter à pratiquer le tri à la source et de réduire le recours à l’emballage en plastique. Des associations de défense de l’environnement seront également sollicitées à cette fin. Mais cette opération de sensibilisation risque d’être difficile à réaliser, vu le manque de « civisme » qui règne au Maroc. Ce plan prometteur viendra s’ajouter au programme national de gestion des déchets domestiques et assimilés qui sera lancé à partir de 2008. Un domaine dans lequel le Maroc souffre de sérieuses lacunes. Surtout en matière de collecte, d’évacuation et d’élimination des déchets.

Ce programme ambitionne d’atteindre un taux de collecte de 90% au lieu de 70% actuellement, de réaliser des décharges contrôlées des déchets ménagers dans toutes les communes et centres urbains, et de réhabiliter celles qui existent déjà (près de 300) et qui échappent à tout contrôle. Il vise aussi à développer la filière « tri-recyclage-valorisation ». Pour ce faire, des centres de tri seront installés dans les nouvelles décharges.

Le coût de ce projet est estimé à près de 37 milliards de DH sur 15 ans, dont une grande partie sera assumée par les Collectivités locales. Ces dernières devront, en plus, augmenter leur participation de 5% par an. Ce qui laisse prévoir une hausse au niveau des taxes et impôts locaux. Des redevances pour la gestion des déchets ménagers sont par ailleurs envisagées. Elles pourraient être incluses dans la consommation électrique des ménages. D’autres redevances sur les produits d’emballage seront collectées auprès des fabricants et/ou distributeurs.

0,5% du PIB

D’après le Secrétariat d’Etat chargé de l’eau et de l’environnement, le coût occasionnée par la dégradation de l’environnement au Maroc est de près de 13 milliards de DH, soit 3,7% du PIB national, dont une part de 0,5% liée aux déchets ménagers. S’ajoute à cela l’état des décharges publiques. La plupart d’entre elles ne répondent pas aux critères de qualité ou sont tout simplement« sauvages ». Elles ne disposent ni de système d’étanchéité ni de collecte des eaux de pluie. Ce qui multiplie le risque de pollution, celui des nappes phréatiques en particulier. Sans parler des odeurs nauséabondes qu’elles dégagent, des espaces qu’elles occupent et des risques d’épidémies. Le taux d’urbanisation (plus de 55% actuellement), qui ne cesse de croître, aggrave les choses.

D’un autre côté, les déchets toxiques ou dangereux ne sont pas correctement pris en charge. Et quand ils sont incinérés, c’est dans de simples fours, et non dans des incinérateurs. Ce qui donne lieu au rejet de gaz particulièrement polluants.

Des sacs « bios », mais à quel prix ?

Des sacs à base de pomme de terre, c’est le pari que s’est lancé la société française Plastique et Tissage de Luneray (PTL). Spécialisée à la base dans les sacs plastique, cette société a été la première en France à se lancer, en 2005, dans la production de sacs « bios ».

D’après ses responsables, ces sacs n’ont que des avantages. Surtout que la tendance est au bio (après la pomme de terre, le maïs est convoité aussi). Ils consomment moins d’énergie (140 degrés au lieu de 180), ils nécessitent moins de matières premières, et 15 à 20% plus denses, ils sont plus résistants en raison de leur consistance en fécule. Ils se dégradent, par ailleurs, beaucoup plus rapidement (de 5 à 6 mois), au lieu de « siècles » pour le plastique. Et, cerise sur le gâteau, en les fabriquant, l’usine dégage une savoureuse odeur de pain grillé au lieu de celle des gaz toxiques. Mais toute innovation, de surcroît non polluante, a un prix. Et celui-ci est très élevé. Ces sacs reviennent pratiquement au double de leurs concurrents en plastique. Une petite éclaircie tout de même. Certains misent sur la hausse des prix du pétrole, matière première du plastique, au profit des sac bios, qui, eux, bénéficieraient à terme de l’augmentation des volumes et ainsi verraient leur prix baisser.

Cela dit, ces produits ont-ils vraiment un avenir ? Ils demeurent en effet le fruit d’une initiative écologique tout à fait louable, mais qui utilise des denrées alimentaires n’abondant pas dans tous les pays du monde.

Produire à base de maïs ou de pomme de terre ne contribuerait-il pas à augmenter le prix de ces denrées ? Lesquelles nécessitent, en outre, l’aménagement de surfaces supplémentaires, des engrais et quantité d’eau pour l’irrigation. Sans parler du fait que leur durée de vie est très courte. Ils finissent dans la poubelle après quelques heures d’utilisation seulement. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on commence de plus en plus à préconiser le recours à des sacs durables réutilisables, au lieu des sacs jetables.

Depuis quelques décennies, la préservation de l’environnement fait l’objet d’une prise de conscience sérieuse. Les actions « vertes » se multiplient et les initiatives rivalisent d’ingéniosité. Les sacs plastique sont particulièrement visés car superpolluants. Leur dégradation peut durer jusqu’à 400 ans. Et ils sont, en outre, distribués par centaines de milliards d’unités chaque année dans le monde.

L’Economiste - Ahlam Nazih

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Investissement - Environnement

Ces articles devraient vous intéresser :

Une belle innovation sauve des villages marocains des pénuries d’eau

Au Maroc, la mise en œuvre d’un projet novateur permet aux villages situés dans le sud-ouest du pays de s’approvisionner en eau potable. De quoi amoindrir voire mettre fin à une difficulté majeure des populations qui souffrent chaque année des pénuries...

Maroc : de nouveaux projets pour renforcer le « Made in Morocco »

Le Maroc poursuit sa marche vers la souveraineté industrielle. Mardi dernier, le gouvernement a procédé au lancement du 4ᵉ lot d’opportunités d’investissements, initiées dans le cadre de la banque à projets. Au total, 275 nouveaux projets ont été...

Blachiment d’argent : le Maroc sort de la liste grise (GAFI)

Après évaluation des dispositifs mis en place par le Maroc pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, le groupe d’action financière (GAFI) a décidé de sortir le royaume de la liste grise.

Le Français Faurecia va créer 1400 nouveaux emplois au Maroc

L’entreprise française Faurecia, spécialisée dans la fabrication d’équipements automobiles, va renforcer sa présence au Maroc, à travers la création d’une nouvelle usine à Salé. Dans ce sens, un protocole d’accord a été signé entre le groupe et l’État.

Maroc : les écologistes s’insurgent contre l’invasion des palmiers américains

Au Maroc, des écologistes appellent à mettre fin à la « plantation anarchique » de palmiers d’origine américaine et à adopter une « politique de reboisement réfléchi dans l’aménagement du territoire ».

Le miel marocain est en péril

Les apiculteurs marocains sont inquiets. Depuis des années, des colonies d’abeilles sont décimées en raison de la sécheresse et des aléas climatiques, ce qui affecte durement la production du miel.

Maroc : voici les priorités du fonds Mohammed VI pour l’investissement

Pour réussir sa mission, le directeur général du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, Mohamed Benchaâboun, a défini ses priorités et son mode de fonctionnement, qui ont été dévoilés lors de son premier Conseil d’administration.

Le Maroc envahi par les chiens interdits

Alors que la loi relative à « la prévention et la protection des personnes contre les dangers des chiens », interdit la possession, la domestication, l’achat, la vente et l’élevage de chiens classés comme dangereux, nombreux sont les jeunes qui...

Le FMI va accorder un important prêt au Maroc

Le Fonds monétaire international (FMI) s’apprête à débloquer, à partir du nouveau fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité, un énorme prêt au Maroc, afin de renforcer la résistance du pays aux catastrophes liées au climat.

Une boule de feu repérée au-dessus du Maroc

Le ciel marocain a été illuminé dans la nuit du 5 septembre par une boule de feu provoquée par la chute d’une météorite.