Droit de vote des MRE : Le verdict des sages

22 août 2003 - 14h46 - Maroc - Ecrit par :

C’est avec une profonde consternation et stupéfaction que nous apprenons le verdict frileux de la Chambre administrative de la Cour suprême relatif au droit de vote des Marocains résidents à l’étranger, rendu le 31 du mois dernier.

Ce rejet a démontré, encore une fois, l’exclusion de 10% de la population du processus démocratique qui marginalise cette communauté marocaine laborieuse, de toute action électorale.
Cette exclusion risque de compromettre tout rapprochement avec notre pays, créer un climat délétère et ternir l’image démocratique de nos institutions.
Nous espérons que la voix démocratique continuera à cheminer, se cristallisera et démontrera cette force dans le réalisme, la sagacité et la maturité politique, qui sont des atouts incontournables de cette volonté marocaine.
Ils sont tous là, journalistes et émigrés, venus écouter le verdict tellement clamé, tellement attendu.
Verdict de l’aberration, de la consternation, de la désolation et de la spoliation totale du droit de vote et du droit à la représentation dans toutes les instances élues au Maroc de ces pauvres Marocains résidents à l’étranger.
Une affaire tellement sensible, tellement criée, qui relève d’un contentieux dont l’objet est simple : réclamer sa citoyenneté, son entité juridique et son identité marocaine d’une façon absolue et non relative.
Une affaire qui méritait d’être traitée avec considération car elle génère et régénère des intérêts économiques, financiers, socioculturels et cultuels et, en principe sans a priori, doit être traitée avec une attention particulière, vigilance et par tous les responsables gouvernementaux.
Une frange de Marocains, qui n’a aucune prétention, ni velléité de représenter tous les Marocains, s’est insurgée contre cette inéquité, contre cette marginalisation et contre ce syndrome, contre l’amalgame qui la mine depuis plus d’une décennie, depuis la disparition d’un ministère de tutelle, d’un interlocuteur qui avait une autonomie, un budget et qui, hélas, n’avait pas su assurer sa vocation et sa mission. Il avait créé cette dichotomie au sein du tissu associatif aussi bien associations qu’amicales.
Chacun se targuait de sa propre représentativité, sa propre dimension et le choix de ces pseudo-représentants demeure toujours un choix "nominé", orienté d’une façon pernicieuse et péremptoire, et tout en faisant abstraction de l’intérêt national et de la valeur intrinsèque des véritables représentants associatifs.
Cette majorité silencieuse de 2,5 millions d’âmes vivait dans une turbulence sociopsychologique inextricable, en raison du décret du Premier ministre du 8 août 2002, qui les excluait totalement du droit au vote.
Ils ont osé demander humblement que l’on reconnaisse leur citoyenneté afin de s’intégrer, c’est-à-dire être inscrits sur les listes électorales de leur pays de résidence et choisir librement et démocratiquement leurs représentants légitimes.
Ce droit a été réduit à sa plus simple expression, un droit légitime qui leur a été simplement refusé, en les priant gentiment de "plier bagage" et s’incliner devant ce verdict inique ou anticonstitutionnel.
Certes, les Sages de la Cour suprême étaient embarrassés et ne pouvaient en aucun cas contrecarrer la ligne directrice de l’agent judiciaire du Royaume du Maroc, qui d’une façon éloquente dans sa requête, avait invité les "Sages" à un prélude de "non-reconnaissance du droit de vote des Marocains résidents à l’étranger.
Cette conception a été aveuglément suivie par le procureur général, qui réitérera avec force et véhémence une opposition catégorique au droit de vote des Marocains résidents à l’étranger ; (sic), ils doivent tous revenir au Maroc, abandonner leur travail et prendre part ainsi au vote qui serait organisé dans leur pays. Quelle conception de la démocratie !
Cette décision pourrait contraindre nos compatriotes à l’exode, car elle dilapide l’avenir de toutes les générations futures qui seraient appelées à mettre en oeuvre leurs talents et compétences dans les pays étrangers ; ils ne pourront plus contribuer au développement de notre économie et notre pays en perdra son statut de démocratie.
Adieu la troisième, la deuxième, adieu les anciennes générations qui ont combattu pour l’intégrité marocaine, qui luttent pour une véritable dimension marocaine, attachées indéfectiblement au rite "malékite", à la dynastie "alaouite", symbole de progrès social, de pérennité et d’expansion économique.
En effet, la Cour suprême n’a tenu compte ni de la loi fondamentale du Royaume qui est la Constitution, ni des décisions jurisprudentielles célèbres qui font autorité, ni du "Doxa" de la pensée savante des doctes "faquih" du rite "malékite" et du grand Malékite, Cheikh Sidi Ali Ben Rahal, du XIVe ou XVe siècle...
Nous rappelons que le concept "malékite", fondé sur l’évolution, la mutation et la métamorphose de la société, est un concept de tolérance, de partage, d’ouverture, de solidarité, de sagesse et de respect de l’autre.
C’est un concept qui vise à construire et à renforcer des liens de solidarité entre des personnes d’origines et de croyances différentes, une sorte de cohabitation. Elles ont en partage "ce Maroc, cette terre bénie", adhèrent et partagent les mêmes valeurs.
Le souhait des MRE d’obtenir leur droit de vote a été balayé et renvoyé au législateur, c’est-à-dire au gouvernement afin d’en faire un projet de loi valable, qui élucidera cette question et déterminera une véritable représentativité démocratique des résidents marocains à l’étranger".
Cette décision est une réelle illustration du non-respect des principes d’égalité entre tous les Marocains, proclamée par une loi suprême de la Constitution.
Cette discrimination positive peut engendrer une alternative et diverses réflexions et, l’aveuglement peut déboucher sur l’abîme...

Voeu pieux

Cette frange de Marocains qui saisit la Cour suprême, avait le double objectif de rassembler les différentes catégories socioprofessionnelles en France qui respectent les mêmes valeurs de tolérance et de solidarité, de démocratie pour créer une phase d’interculturalité.
• Ils ont souhaité rapprocher démocratiquement toutes les tendances dans un but déterminé de représentativité, de favoriser et d’approfondir les liens avec les responsables marocains.
• Leur mission est de promouvoir les processus d’intégration des Marocains résidents à l’étranger, continuer ainsi à pérenniser les valeurs fondamentales de l’islam, soutenir la diversité de leurs ethnies, contribuer ainsi à la construction des liens sociaux entre toutes les générations et communautés.o

Brèche au conservatisme

Notre pays est en train de panser ses blessures du 16 mai dernier, en éradiquant stoïquement et courageusement la barbarie, le dogmatisme, le fondamentalisme et le nihilisme.
Cette réprobation des "Sages", teintée d’une véritable myopie et d’une amnésie volontaire, ne pourra qu’aviver le débat, et offre aux néoconservateurs et aux détracteurs le moyen de crier victoire sans s’adapter à la nouvelle donne de sa "Majesté Mohammed VI, que Dieu le glorifie".


* Directeur général du Groupe Fayol, île-de-France, professeur es sciences et techniques économiques, président du CUAPLMF.

A. Baghadi pour L’Economiste

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