La nationalité dans le biberon !

4 avril 2005 - 18h59 - Monde - Ecrit par :

Il fait bon d’être Canadien ! Une belle perspective pour les enfants. A priori, il suffirait d’un rien (ou presque) pour le devenir. Quelques millions de centimes, de l’organisation et un visa visiteur pour le Canada…

Nisrine et Aya ont tout, de deux petites fillettes marocaines. Brunettes, l’une a 12 ans, l’autre en a 8. Les deux sœurs habitent au quartier Oulfa, fréquentent des écoles marocaines, passent leurs vacances à Marrakech et ont leur pédiatre à Casablanca. Les petites sont pourtant (aussi) Canadiennes. Une nationalité qu’elles ont obtenue de naissance mais dont elles ne tirent pas encore tous les avantages, les vrais. C’est une histoire de temps.
Leur maman en a bien fait le calcul. En prenant sa décision d’aller accoucher de ses deux premières filles au Canada, la jeune femme parle d’"investissement". "C’est un accouchement qui coûte cher comparé à un autre dans la meilleure des cliniques du Maroc. Mais la nationalité canadienne n’a pas de prix. J’ai calculé sur le long terme…", explique Salima.
En effet, ceux qui ont tenté l’aventure, parlent d’un accouchement qui coûte au minimum 60 mille dirhams. Ajouté au coût total du séjour de la femme enceinte au Canada qui peut durer plusieurs mois, l’"opération" reviendrait à quelque 85 mille dirhams au grand minimum.
"En tant qu’étrangère, je devais payer la totalité des prestations médicales. Et doit régler séparément les médecins qui ont intervenu lors de mon accouchement", signale Salima qui se rappelle les détails de ses frais. Mais ce qu’elle n’est pas prête d’oublier, c’est le prix de la chambre d’hôpital : "Elle ressemble plus à une chambre d’hôtel certes, mais elle reste excessivement chère". Tenez vous bien ! Une nuit dans un hôpital au Canada coûte jusqu’à 1200 dollars canadien. "Pour passer 2 ou trois nuits là-bas, il faut vraiment y mettre le prix !" lance Salima. Comme tant d’autres, cette jeune maman attendait le septième mois de sa grossesse pour prendre l’avion en direction du Canada. A l’entendre raconter son aventure, tout paraît évident : "Ce n’est pas sorcier. Je demande un visa touriste. La première démarche consiste à récupèrer mon dossier médical complet chez mon gynécologue, et réserver ma chambre d’hôtel au Canada. A ce moment je m’arrange pour camoufler mon ventre à l’aéroport aussi bien au Maroc qu’au Canada… Une fois sur place je loue un appartement parce que j’ai quand même besoin de m’installer pendant quatre mois au minimum. Trois mois avant l’accouchement et un moins après. Le temps de récupérer les papiers du bébé…"
En effet, l’enfant peut obtenir son passeport canadien dans un délai maximum d’un mois. Souvent même il est délivré à ses parents dès la première semaine de sa naissance. Un acte de naissance délivré par l’hôpital suffit pour accorder automatiquement, et dans les plus brefs délais, la nationalité canadienne à l’enfant avec tous les avantages qui s’ensuivent.
"C’est un bon investissement qu’on ne regrette pas !", résume Salima.

Du "Hrig" haut de gamme ?

Et non. Il n’y a pas de quoi regretter le déboursement de quelque 90 mille dirhams en échange de tant d’avantages. La nationalité canadienne en offre beaucoup. Pour ce jeune homme, père de trois petits garçons “Canadiens” il s’agit d’acheter la liberté : •••
•••"Avec ce passeport, on n’est plus des citoyens de seconde classe mais des citoyens du monde. Mes enfants peuvent maintenant voyager partout dans le monde sans avoir à subir le casse-tête des visas ou autres paperasses administratives". L’idée pour ce jeune papa est de "ne plus être un document. Ne plus être évalué ou traité en fonction de la nationalité mentionnée sur le passeport". La Marocaine ne procurant pas tant d’avantages dans ce sens.
Sur le long terme, le grand privilège pour ces enfants "canadiens" est lié aux études. "Mes enfants iront certainement plus tard étudier au Canada. Gratuitement et même en se faisant octroyer une bourse d’étude". Il n’est pas possible cependant de profiter de la gratuité des soins médicaux, de la couverture sociale, allocations et autres prestations sociales. Ce droit est réservé aux résidents permanents sur le territoire canadien.
Le phénomène de l’accouchement des femmes marocaines au Canada prend de plus en plus d’ampleur. Pratiqué d’abord au sein des familles les plus riches, de plus en plus de couples issus de la classe moyenne n’hésitent plus à y mettre le prix. Côté canadien, on ne s’en plaint pas. Pas encore, du moins. Les quelques mesures annoncées au niveau de l’octroi des visas aux femmes enceintes se sont avérées peu restrictives. C’est que “pour l’heure, le phénomène ne dérange pas vraiment les autorités canadiennes. Celles-ci sont en train de tout faire pour faciliter les mesures de naturalisation pour les immigrées sur leur territoire”, mentionne Mohammed Samir Lahmoun, Avocat membre du Barreau du Québec et expert en immigration au Canada. Selon lui, le fait que ces autorités montrent parfois une certaine réticence pour l’octroi de visas à ces femmes revient simplement au fait que “les programmes canadiens d’immigration sont discutés et votées au parlement et doivent répondre à une certaine logique. Le Canada veut que les gens immigrent vers lui, mais dans le respect d’une procédure normale, claire et contrôlable”.

Lamia Bouzbouz - La Gazette du Maroc

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