Le Maroc et l’Argentine s’engagent pour un modèle de coopération Sud-Sud

6 avril 2005 - 22h36 - Economie - Ecrit par :

Pour la première fois, depuis des lustres, une délégation d’hommes d’affaires argentins de haut niveau séjourne dans notre pays, depuis lundi dernier. Cette délégation, conduite par Eduardo Eurnekian, premier vice-président de la Chambre argentine du commerce (CAC) et coprésident du Comité mixte maroco-argentin des hommes d’affaires, a été reçue, mardi matin, au siège de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM).

Cette mission commerciale au Maroc intervient trois mois seulement après la visite officielle effectuée par S.M. le Roi Mohammed VI à Buenos Aires, en décembre 2004, traduisant une réelle poussée de la coopération économique et politique entre le Royaume et l’Argentine. Au fait, cette mission d’opérateurs argentins au Maroc a été rendue possible grâce à la visite Royale qui a incontestablement servi d’occasion propice pour la conclusion d’un accord-cadre pour le commerce, en vertu duquel il a été convenu de négocier un accord commercial préférentiel en tant que support d’une première étape vers la création d’une zone de libre-échange antre le Maroc et l’Argentine.

Au siège de la CGEM, à Casablanca, la délégation argentine fut accueillie par les présidents des différentes fédérations sectorielles, en présence du ministre de l’Industrie, du Commerce et de la Mise à niveau de l’économie, Salaheddine Mezouar. Dans un mot de bienvenue, Saïda Karim Lamrani, vice-président de l’organisation patronale, est confiante quant à l’avenir des relations entre nos deux pays et demeure convaincue qu’il y a « de fortes possibilités de coopération notamment au niveau du secteur de transformation de la laine (produit brut à filer au Maroc), de la pièce détachée automobile, des produits agro-industriels, de la filière bois… Notre pays, ajoutait-elle, étant en plein chantier de projets d’infrastructure, compte développer des partenariats dans les secteurs portuaires, aéroportuaires, énergie hydraulique… ».

Avis partagé par M. Mezouar qui espère, à travers cette rencontre, construire les ambitions cultivées par les deux chefs d’Etat. Ce qu’il y a de bon dans la globalisation, a-t-il souligné, c’est qu’elle permet « d’énormes possibilités d’augmenter et de partager les richesses, mais aussi de partager les cultures et de rapprocher les peuples ». Le Maroc avance dans son processus de libéralisation économique et d’ouverture vers la modernité, et « nous travaillons pour l’intégration de notre pays dans ce grand espace d’économie globalisée, disait M. Mezouar, avant d’ajouter que « nous sommes en train de préparer un accord de libre-échange avec le Mercosur. Nous sommes déterminés aujourd’hui à aller de l’avant ».

Outre les opportunités d’affaires qui s’offrent aux opérateurs économiques argentins dans les domaines du BTP, textile, agro-industrie, pêche, industrie des composants électroniques et automobile, « il y a d’autres nouveaux projets en lien avec la privatisation de l’agriculture », activité d’excellence des Argentins. « La concession des terres agricoles (Sogeta-Sodea, ndlr) est un créneau où les Argentins peuvent exceller, bénéficiant en cela de leur expertise et de leur savoir-faire ».

La délégation argentine ne peut être que fascinée par les projets de partenariat qu’offre le Maroc, tant dans le secteur industriel que dans les secteurs commercial et services. Et l’on espère que cette « mission puisse déboucher sur des actions concrètes susceptibles de renforcer notre coopération économique et commerciale bilatérale ». Car, jusqu’ici, les échanges demeurent réellement très modestes pour ne pas dire anecdotiques. Selon Hassan Alaoui, directeur de Cabinet du ministre du Commerce extérieur, le volume global des échanges, dans les deux sens, ne dépasse guère les 250 millions de dollars, malgré la tendance haussière observée ces cinq dernières années, avec une progression moyenne annuelle de près de 32%.

Cette hausse s’explique essentiellement, selon le représentant du ministère du Commerce extérieur, par la montée en puissance des importations en provenance de l’Argentine qui représentent 98% de la valeur globale des échanges bilatéraux. Nous importons beaucoup de maïs, du blé et oléagineux, tandis que nos exportations sur l’Argentine portent exclusivement sur les engrais, dont la valeur demeure inférieure à 5 millions de dollars et s’inscrit en nette baisse ces deux dernières années.

L’envolée des importations en provenance de ce pays dont la superficie représente deux fois et demie celle du Maroc, aggrave le déficit commercial au détriment du Maroc. Les milieux d’affaires argentins se veulent toutefois rassurants et entendent parvenir à un partenariat win-win. En effet, il reste encore des efforts à soutenir de part et d’autre, comme disait Mme Saïda Lamrani, en vue d’intensifier les échanges commerciaux et d’identifier les possibilités de partenariat, en tant que vecteur de relations économiques durables.

Aujourd’hui, avec un taux de croissance de son PIB de 11%, en 2004, l’Argentine se présente comme étant l’une des plus fortes croissances au monde et la première en Amérique latine. « La politique économique menée par le gouvernement Kirchner depuis son arrivée au pouvoir en mai 2003, axée sur des objectifs de court terme de stimulation de la demande » (hausses salariales, gel des tarifs publics, mesures en faveur de la consommation, politique monétaire de baisse des taux d’intérêts, hausse des dépenses primaires…) semble donner ses premiers fruits.

Déjà, l’année 2003 s’est achevée sous le signe de la reprise économique et d’une stabilisation des variables financières. Il est vrai que l’Argentine est sortie de la crise, après quatre années de grave récession, et tous les indicateurs (à l’exception de celui de la dette extérieure) affichent une nette amélioration. L’inflation est sous contrôle, contenue sous la barre des 3,7%, en même temps, les exportations enregistrent une forte croissance, soutenant une balance commerciale désormais excédentaire, avec un solde positif de l’ordre de plus de 17 milliards de dollars en 2003.

Cette belle tenue de l’économie argentine s’explique notamment par l’excellente conjoncture internationale, en particulier la bonne appréciation des cours internationaux des denrées agricoles (l’Argentine est numéro 1 mondial en matière d’exportation de tournesol, elle exporte aussi du soja transgénique, et beaucoup de produits fruitiers, du maïs, du blé, de la canne à sucre, sans oublier la viande bovine et ovine et plusieurs minerais) et la forte compétitivité de l’industrie depuis la dévaluation de la monnaie locale, le peso argentin (1 euro = 3,63 pesos).

Après la signature d’un accord d’ajustement structurel avec le FMI, le pays bénéficie, pour l’heure, d’une certaine accalmie sur le front de ses finances extérieures (l’Argentine a une dette extérieure d’un montant avoisinant les 90 milliards de dollars). Le pays est en train d’étudier, lui aussi, des contrats de concessions de services publics. C’est dire qu’entre le Maroc et l’Argentine, tout milite pour un rapprochement et un partage d’expériences.

Abdelouahed Kidiss - Le Matin

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