Les Yeux Secs : Un film aride qui donne la larme à l’œil...

1er mai 2004 - 11h23 - Culture - Ecrit par :

Une terre berbère enserrée par un étau de montagnes… Un village de femmes qui offrent leur corps. Un village où les seuls hommes qui entrent sont ceux qui paient. Un village que les vieilles auront déserté pour aller se réfugier derrière l’imposante barrière de neige. Un village où les nouveaux-nés sont abandonnés près d’un puits où un fou étale ses clous pour que s’arrête la malédiction.

Un village où à chaque aube, une jeune femme court sur les toits de chaume et hurle au vent pour ne pas oublier que jamais elle ne portera le voile rouge des vierges. Un village où défilent les saisons au rythme des hommes qui dévalent en nuée les vallons, le soir où la lune est pleine, pour remplir la couche des femmes. HALA, rebelle et revêche en est la Chef, elle impose sa loi et dicte les règles.
Sa mère, raflée il y a vingt cinq ans et oubliée dans une prison revient, accompagnée d’un homme, un jeune chauffeur de bus, orphelin et amuseur du dimanche. Tout s’ébranle alors, comme une lente agonie avant l’appel d’air.

Avis de Monsieurscinema.com

Un film aride qui donne la larme à l’œil...

Dans ces montagnes berbères, on dit que les femmes ont les yeux secs. Enfermées, comme dans un gynécée de pierre, vaste maison close à ciel ouvert, elles attendent, résignées, la venue des hommes, les soirs de pleine lune. Ces femmes sont prostituées de mère en fille et perpétuent, mi-soumises, mi-consentantes, une sorte de malédiction ancestrale. Il suffirait de peu, pourtant, peut-être la révolte de l’une d’entre elle, pour que leur condition change et qu’elles deviennent, par exemple, d’honnêtes tisseuses de tapis. Mais comme dans l’héautontimorouménos grec, la victime est souvent bourreau de soi-même…

Narjiss Nejjar, femme cinéaste marocaine, a voulu comprendre la psychologie ambiguë de ces filles damnées, qui acceptent de vendre leur corps pour la survie du clan. A qui la faute ? Celles des hommes ? De la société ? Ou bien de leurs aînées ? Dans ce film plus contemplatif qu’accusateur, nul n’a le beau rôle. Ni la mère, venue chercher sa fille après des années d’abandon. Ni le fils, unique figure masculine, qui laissera faire sans réagir. Ni même la chef revêche, au regard noir, trop fière ou trop meurtrie pour courber l’échine devant quiconque. Plutôt subir que pleurer sur son sort.

C’est bien là où le bât blesse. Cette complaisance, non pas tant de la réalisatrice, mais des protagonistes elles-mêmes, qui sacrifieront la plus jeune au rituel du dépucelage, finit par devenir gênante. Comme les yeux, les cœurs aussi semblent asséchés. Narjiss Nejjar fait bien sûr passer un message hélas inspiré de faits réels, et pointe du doigt une situation révoltante, mais certains choix de mise en scène paraissent discutables : l’esthétisme du film, la beauté trop parfaite de la comédienne, l’obstination dans le malheur. Entre l’intériorité du ressenti et l’extériorité du regard, le film ne parvient pas vraiment à trouver un positionnement clair. On eût souhaité une fin plus ouverte et un parti pris moins radical.

Laurence Berger pour Monsieur Cinéma

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Cinéma - Amazigh - Narjiss Nejjar

Ces articles devraient vous intéresser :

"Terminal" : Jamel Debbouze et Ramzy Bedia réunis 25 ans après "H"

Canal+ a dévoilé la date de sortie de « Terminal – Bienvenue à l’aéroport », la sitcom produite, écrite, réalisée et interprétée par Jamel Debbouze. Une nouvelle collaboration entre la chaîne cryptée et l’humoriste franco-marocain 25 ans après la série...

Buzz, fric et clashs : La (mauvaise) recette des artistes marocains

De plus en plus d’artistes marocains se tournent vers les réseaux sociaux, notamment Instagram et TikTok, pour interagir avec leur public et générer des revenus. Cette tendance suscite toutefois des critiques, certains pointant du doigt le recours à...

Maroc : des prix bas pour aller au cinéma

Le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication du Maroc, Mohamed Mehdi Bensaid, a annoncé un ambitieux projet visant à ouvrir 150 nouvelles salles de cinéma à travers le pays. Il est également prévu de faire un gros effort sur les...

Dounia Boutazout sous le feu des critiques : sa réponse cinglante

Critiquée par ses collègues pour son apparition dans plusieurs séries et films programmés durant ce mois de ramadan, l’actrice marocaine Dounia Boutazout répond via un post sur son compte Instagram.

Jamel Debbouze lance "Terminal", 25 ans après "H"

L’humoriste franco-marocain Jamel Debbouze retrouve son confrère Ramzy Bedia dans le cadre d’un nouveau projet pour Canal+. Le duo est connu pour son rôle dans la série à succès H (1998-2002).

Gad Elmaleh cherche l’amour… même sur les applis

À bientôt 54 ans, l’humoriste et acteur maroco-canadien Gad Elmaleh est en quête d’amour, et il n’hésite pas à tenter les applications de rencontre.

L’actrice Malika El Omari en maison de retraite ?

Malika El Omari n’a pas été placée dans une maison de retraite, a affirmé une source proche de l’actrice marocaine, démentant les rumeurs qui ont circulé récemment sur les réseaux sociaux à son sujet.

Sur Al Oula, une scène jugée humiliante pour l’homme marocain

L’actrice Sahar Seddiki essuie des critiques de la part des internautes à cause d’une scène de la série dramatique et sociale « Jarah Qadim » (“Une ancienne blessure”), diffusée sur la chaîne Al Aoula pendant le ramadan, la montrant en train de...

Farah El Fassi et Omar Lotfi : le couple star du cinéma marocain divorce

Le couple emblématique du cinéma marocain, Farah El Fassi et Omar Lotfi, a officiellement divorcé. La nouvelle, largement relayée sur les réseaux sociaux, a été confirmée par une source proche de l’actrice.

Maroc : moins de français dans les administrations

Les Marocains souffrent de la prédominance de la langue française dans les transactions informatiques des administrations marocaines. Tel est le constat fait par le groupe parlementaire du Rassemblement national des Indépendants (RNI), qui appelle la...