Littérature : Ungal amazigh

26 février 2006 - 22h35 - Culture - Ecrit par : Bladi.net

De plus en plus de romans sont publiés en Tamazight. Leurs auteurs écrivent de mieux en mieux. Ils sont même primés. Leurs aînés étaient portés sur le militantisme politique. Et eux, les nouveaux venus, sur le social et le religieux. Mais qui le sait ? Pas grand monde, pour l’instant.

“Le roman est une histoire feinte, écrite en prose, où l’auteur cherche à exciter l’intérêt par la peinture des passions, des mœurs, ou par la singularité des aventures”. La définition que donne le littré du roman correspond parfaitement à l’Aghrum n Ihaqqaren (Le pain des
corbeaux) de lhoussain Azergui. Aghrum n ihaqqaren est le nom d’une plante, d’un champignon empoisonné qui tue les humains et le bétail. Les Rifains l’appellent “Aghrum n tbaghra”. Dans son roman, l’auteur, lui-même journaliste, s’intéresse à “l’autocensure qu’exercent les journalistes sur eux-mêmes, de peur d’être assassinés, comme c’est le cas en Algérie durant les années noires, ou d’être emprisonnés ou licenciés. L’autocensure est semblable à un champignon qui tue les personnes qui le consomment. Il les tue doucement, mais sûrement. C’est ce qui arrive d’ailleurs au personnage de mon roman. La censure est devenue pour lui une sorte de cauchemar qui le torture et finit par le tuer”. Le roman de lhoussain Azergui a reçu le prix international de la création littéraire amazighe en 2004 (Espagne/Université de Grenade). “Ce roman est né dans la douleur, le questionnement. C’est d’ailleurs le cas de la plupart des romans amazighen publiés depuis les années 90”, explique Azergui.

De la souffrance politique à la misère sociale

C’est Ali Ikken qui a ouvert le bal avec Asekkif n Inzaden (La soupe de poils). Ce roman pionnier raconte les souffrances d’un groupe de militants incarcérés en 1994 au cours des événements de Goulmima. L’auteur, Ali Ikken, fait partie des enseignants qui ont été condamnés à trois ans de prison en 1994 avant d’être graciés par Hassan II. Ce premier roman amazigh marocain a décroché le premier prix de création littéraire de Mouloud Mameri à Tizi Ouzou en 1995. Emboîtant le pas à Ikken, une nouvelle génération de romanciers va se lancer dans l’écriture romanesque avec une même constante, la peinture d’un vécu plutôt morose, axée le plus souvent sur des conflits identitaires ou sur un exil douloureux. Quand Mohamed Bouzaguou s’attelle à écrire son premier roman en 2001, il n’échappe pas à la tentation de raconter l’histoire de l’un de ses compatriotes, Omar Reddad en l’occurrence, piégé par sa candeur et qui se retrouve sur Les marches de l’échafaud (Ticri Gh tama n tsarrawt).

Dans Jar u jar (Entre ça et ça), le même Bouzaguou récidive en présentant cette fois-ci un roman qui se veut “un véritable miroir du quotidien rifain”. Tout y passe, la misère, le chômage, les affres d’une jeunesse perdue entre l’eldorado européen et “un Maroc du centre” plutôt repu. La dimension sociale de son œuvre, ancrée dans le Rif, se manifeste dans sa relecture de la confrontation entre un Rif rustique et primitif et une autre partie du Maroc alignée sur le modèle occidental. Il propose ainsi un questionnement sur la problématique identitaire des Rifains pour repenser les rapports interculturels dans notre société.

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