La Mamounia : le célèbre hôtel marocain où l’élite française se retrouvait

17 août 2025 - 09h00 - Economie - Ecrit par : S.A

Jadis, l’hôtel mythique de Marrakech, La Mamounia, était prisé des dirigeants européens, en l’occurrence français, qui en étaient des habitués. Bon nombre d’entre eux y ont séjourné à plusieurs reprises.

Au XVIIIᵉ siècle, le sultan Sidi Mohammed Ben Abdellah avait offert un domaine de huit hectares composé d’orangeraies, d’oliviers, de fontaines, de jardins, d’allées, etc. comme cadeau de mariage à son quatrième fils, le prince Mamoun. C’est ce qui deviendra plus tard La Mamounia. Un hôtel mythique qui doit donc son nom au prince Mamoun. Le palais sera construit en 1923. À l’époque, le Maroc était sous protectorat français. Avec une cinquantaine de chambres, l’hôtel commençait à recevoir quelques voyageurs. Winston Churchill, l’ancien premier ministre britannique, y a effectué plusieurs longs séjours entre les années 1930 et 1950. Il en a même fait son atelier de peinture préféré.

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« Par amour de La Mamounia, incapable de résister à son attraction, il parvint même à convaincre Roosevelt de l’accompagner après la conférence de Casablanca » entre les Alliés, en 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, pour une escapade de 48 heures, écrit André Paccard, architecte en titre d’Hassan II, dans son livre Mamounia, Marrakech, Maroc. Après la guerre, l’hôtel s’impose comme l’un des meilleurs au monde. Plusieurs rénovations ont été entreprises. Des styles les plus opulents de l’art français à l’art arabo-mauresque, l’hôtel respire luxe, modernité et fascine. L’ère du roi Hassan II fait émerger ce que l’on appellera plus tard « la diplomatie de la Mamounia ».

À lire : La Mamounia, meilleur hôtel au monde

Le souverain y recevait l’élite française. « J’ai aussi constaté à quel point la connivence entre Hassan II et l’élite politique française était grande. C’est grâce à la Mamounia. Des directeurs de journaux et de magazines, comme Jean Daniel du Nouvel Observateur ou Jacques Amalric, du Monde, venaient au Maroc à bord des avions du roi pour réaliser des entretiens avec lui. Pour résumer, autour de la piscine de La Mamounia, il y avait toute la crème de la gauche et toute la crème de la droite », décrit Gilles Perrault, auteur de Notre ami le Roi, dans une interview à Orient XXI. Pour le souverain, « il s’agit aussi d’écouter aux portes et de consigner en secret les frasques des hommes politiques français de tout bord », croit savoir La Libre.be.

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« Combien de ministres français ont séjourné gratuitement dans des palaces marocains depuis des années, au prétexte d’une visite de travail de trois jours qui commençait le vendredi, avec un entretien officiel d’une demi-heure pour tout justifier ? », avait confié en février 2011 au Monde un connaisseur du Quai d’Orsay. « Sur le Maroc, on est gêné : ils nous “tiennent” », assurait, toujours dans Le Monde, une autre source. Certaines « affaires » n’échappent aux médias : les accusations contre un ministre français en résidence à La Mamounia, ou « la célèbre querelle de Philippe Douste-Blazy, alors ministre français des Affaires étrangères, avec son épouse dans les couloirs du palace en mars 2006, qui lui valut d’entendre les députés d’opposition chuchoter “Mamounia ! Mamounia !”, sur son passage à l’Assemblée. »

À lire : Parlement européen : le Maroc aurait offert des séjours à la Mamounia

À l’avènement de François Hollande, la diplomatie de La Mamounia peine à suivre la même dynamique. Même constat depuis le début du premier quinquennat de son successeur Emmanuel Macron. « Cette diplomatie ne fonctionne plus avec Macron. Si l’actuel président a envie de visiter le Maroc, il le fera à ses frais. C’est une question de génération. Cette diplomatie marocaine de l’hospitalité est moins efficace aujourd’hui et ceux qui y succombent sont en queue de comète comme Jack Lang », assure Christian Chenot, dans une interview à l’hebdomadaire marocain TelQuel, à la suite de la publication de son livre Le déclassement français, en mars 2022.

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Le roi Mohammed VI rompt avec la tradition instaurée par son défunt père, préférant recevoir la presse et ses invités de marque, chez lui, dans ses différents palais et au Royal Mansour, un palace concurrent de La Mamounia, dont il a ordonné la construction. Aujourd’hui, ce sont les stars qui continuent à s’afficher à La Mamounia. Les hommes politiques se font eux plus discrets.

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