Le marché automobile marocain affiche un rebond encourageant en juillet 2024, avec 14 219 véhicules neufs vendus, soit une hausse de 8,42 % par rapport à juillet 2023. Cette embellie estivale fait suite à un léger fléchissement le mois précédent.
Ahmed Chami ne veut plus entendre parler du plan Envol ! Plan que la presse lui aurait prêté, à son corps défendant. Confusion probable entre Envol et Emergence ou mauvaise compréhension ? Le ministre du Commerce et de l’Industrie se refuse à tout commentaire et dit ne parler que « Emergence, Emergence, Emergence » !
Invité dans le cadre du cycle de conférences organisé par l’ONG Alliance Pro, jeudi 15 mai à Casablanca, pour faire un point d’étape du plan Emergence, il s’est prêté au jeu des questions/réponses. « Le plan Emergence, dans sa forme initiale, est-il d’actualité » ? La question du Pr. Ahmed Azirar, préposé à l’introduction du thème « Où en est le plan Emergence, trois ans après son lancement ? », tranche. La réponse du ministre ne l’est pas moins : « On a déjà positionné le Maroc sur 3 des 4 axes stratégiques définis au départ, à savoir l’offshoring, l’aéronautique et l’automobile ». Et le projet « Renault-Nissan a mis le Maroc sur la carte automobile mondiale », déclame le ministre. A noter que le constructeur a déboursé 1,1 milliard d’euros, soit 12,6 milliards de DH, mercredi 14 mai, pour démarrer son chantier à Tanger.
Capacité d’exécution à améliorer
Si l’on en croit Chami, l’objectif de ce groupe, c’est d’arriver à 80% d’intégration locale. Pour cela, Renault-Nissan vient de lancer un appel d’offres à ses fournisseurs, les incitant à venir s’installer au Maroc. Ce qui fait dire au ministre que ce projet a permis au Maroc de changer de stratégie, passant d’un simple fournisseur de main-d’œuvre, aussi qualifiée soit-elle, à la mise en place d’un plan stratégique d’industrialisation du pays. Reste à améliorer notre capacité d’exécution. D’autant plus que, dans ce secteur, une manne inestimable s’offre à nous. Allusion faite aux 28 sites européens d’assemblage d’automobiles, accessibles en franchise douanière en moins de 3 jours à partir du Maroc. Ces sites font appel aux équipementiers de 2e et 3e rangs pour des marques prestigieuses et produisent plus d’un million de véhicules par an.
Toutes ces réalisations, et bien d’autres, confortent le ministre. Pour Chami, le ciblage volontariste sur 7 secteurs moteurs de la croissance future du Maroc, est toujours d’actualité, même si, « pour des raisons de conjoncture, on peut être amenés à recadrer certaines choses, d’autant plus que le plan Emergence est la base même pour industrialiser le Maroc ». Industrialisation sans laquelle la résorption du chômage urbain n’est pas possible quand on sait qu’« un emploi industriel est beaucoup plus pérenne qu’un emploi touristique ». Il suffira pour Chami d’arriver au changement annoncé du paysage industriel et à l’implémentation des nouveaux métiers qui tirent déjà la croissance vers le haut. A eux seuls, les piliers de croissance contribuent à hauteur de 60% au PIB. Le projet de cités industrielles, intégrant zones d’activité, commerces et résidences, fait son chemin. Le nouveau paysage industriel des dix prochaines années permettra de capter 32% du PIB, provenant des métiers quasi inexistants aujourd’hui (l’offshoring et les Med Zones concentrant la sous-traitance industrielle). Là-dessus, le Pr Driss Benali rappelle que « l’ambition industrielle suppose un certain nombre de capacités. Or nous avons toujours une défaillance dans la formation des ressources humaines ».
Là où Chami semble mettre d’accord l’assistance, c’est quand il pointe, sans autre forme de protocole, les loupés du plan. Si les ITO (Internet technologies outsourcing) sont un succès, les BPO (Business process outsourcing) ont pris du retard.
Sur le plan sectoriel, beaucoup de choses ont été faites, « des projets surtout », souligne le ministre. Aussi, la lenteur des réalisations atténue les espoirs suscités par le plan Emergence en ce sens qu’il devait repositionner l’offre industrielle du Maroc. L’artisanat et les pôles agricoles restent les parents pauvres de toute cette stratégie de relance économique. A ce titre, l’interrogation du Pr Driss Benali est pleine d’à-propos : « Qu’en est-il de la mutation annoncée du plan Emergence vers les régions » ? Sur le plan agroalimentaire, des filières ont été identifiées, « mais rien n’a été fait et le récent Plan Vert du Maroc est encore à l’état de projet ». A noter que la transformation des produits de la mer relève du ministère de l’Agriculture ! Pour Chami, « vues de l’intérieur, les choses ne sont pas aussi simples que l’on pourrait croire ». Le plan est tellement ambitieux qu’il fait appel à l’intervention de plusieurs ministères.
A qui la faute ? Aux commanditaires, car « le plan Emergence, c’est le cabinet Mc Kinsey qui se fixe des objectifs et demande au pays de s’y adapter », assène le Pr Benali. Pour lui, il y a confusion entre attractivité et compétitivité. « Le premier capte la valeur ajoutée », c’est le cas d’Essaouira par exemple qui attire de plus en plus de retraités d’Europe. « Le second génère de la valeur ajoutée », Casablanca, Tanger et Agadir. Benali appelle le ministre à réaménager « son » plan en rapport avec le plan d’aménagement du territoire, en évitant de considérer le territoire comme étant un stock d’offres. Rendez-vous est pris dans trois ans.
Source : L’Economiste - Bachir Thiam
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